Certains médicaments ne font pas bon ménage avec l’exposition aux rayons du soleil. Ils peuvent être à l’origine soit d’un coup de soleil sévère alors que l’on s’est peu exposé, soit d’une allergie de type eczéma après quelques jours d’exposition.
Quels sont les médicaments qui sont à l’origine de ces phénomènes de sensibilisation excessive aux rayons du soleil ? Comment les reconnaître ? Comment prévenir cet effet indésirable, certes sans gravité, mais peu agréable ?
Qu’appelle-t-on photosensibilisation ?
La photosensibilisation médicamenteuse correspond à une réaction anormale de la peau, résultant d’une interaction entre l’exposition solaire (rayons ultraviolets – UV, mais parfois simplement la lumière du jour) et un médicament « photosensibilisant », c’est à dire qui est capable d’absorber ces rayons.
- Il existe deux types de réactions de photosensibilisation, très différentes dans leur nature :
- la phototoxicité déclenche, en quelques heures au soleil, une réaction douloureuse de type « coup de soleil », avec parfois apparition de cloques, inhabituellement sévère par rapport à la durée de l’exposition au soleil. La localisation des lésions correspond toujours à la zone exposée au soleil ;
- la photoallergie, véritable réaction allergique, est plus rare. Elle survient dans un délai de 5 à 21 jours après le début du traitement. Lors de photoallergie, la réaction de la peau ne se limite pas aux zones exposées au soleil et peut atteindre les zones couvertes par les vêtements. Les lésions s’apparentent à de l’eczéma ou à de l’urticaire.
Les médicaments pris par la bouche ou injectés déclenchent plus souvent une phototoxicité, tandis que les produits à application locale (crèmes, pommades, lotions) déclenchent plus souvent une photoallergie. Certains médicaments ne sont impliqués que dans un seul de ces deux types de réactions, mais d’autres peuvent être retrouvés dans les deux types.
La phototoxicité, un coup de soleil intense et inattendu
La phototoxicité est une réaction inflammatoire due à la transformation du médicament responsable sous l’action des rayons UV. Si ce médicament est utilisé localement, cette réaction se produira uniquement aux zones d’application du médicament. S’il est pris par voie générale (par la bouche ou par injection), la réaction concernera toutes les zones exposées au soleil.
La phototoxicité se présente le plus souvent comme une réaction de type coup de soleil, avec des rougeurs, de l’hypersensibilité de la peau, des brûlures, voire des cloques. Les lésions sont présentes uniquement sur les zones exposées aux rayons UV. Le visage, les avant-bras, le cou, la poitrine et les jambes sont souvent touchés. Les zones couvertes par les vêtements ne sont pas touchées.
Ces symptômes apparaissent généralement quelques minutes ou quelques heures après l'exposition aux rayons UV. Ils disparaissent progressivement après l'arrêt du médicament et de l'exposition au soleil. Cependant, une hyperpigmentation des lésions (couleur plus foncée) peut persister plusieurs mois. L’intensité de ce « coup de soleil » dépend de l’intensité et de la durée de l’exposition solaire, du médicament, de la dose administrée, ainsi que du type de peau de la personne. Une personne à peau claire sera plus sensible qu’une personne à peau mate ou foncée. Mais une réaction phototoxique reste possible avec une peau mate.
Les formes particulières de phototoxicité |
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Dans certains cas, la phototoxicité peut prendre des formes particulières :
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Les médicaments responsables de phototoxicité
Dans le cas des réactions phototoxiques, la liste des médicaments impliqués est longue (voir tableau ci-dessous) : les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS comme le kétoprofène ou le diclofénac), certains antibiotiques comme les tétracyclines ou les quinolones, certains diurétiques, des médicaments du cœur comme l’amiodarone ou les inhibiteurs calciques, des médicaments contre les champignons microscopiques comme le voriconazole, la quinine et ses dérivés comme l’hydroxychloroquine, la sulfasalazine, etc. Les traitements de l’acné (rétinoïdes) peuvent également être à l’origine de phototoxicité.
Les familles de médicaments le plus souvent impliquées dans les réactions de photosensibilisation | |
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Médicaments pris par la bouche ou injectés |
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Médicaments appliqués sur la peau |
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La phototoxicité, facteur de risque de cancer de la peau
À long terme, la phototoxicité peut augmenter le risque de développer un cancer de la peau. Par exemple, un traitement de longue durée par les tétracyclines semble augmenter de 11 % le risque de carcinome basocellulaire (un cancer de la peau qui se soigne bien). Par ailleurs, une étude portant sur plus de 78 000 patients a révélé une augmentation significative du risque de carcinome épidermoïde, un autre type de cancer de la peau, chez les patients prenant de l'hydrochlorothiazide (un diurétique prescrit dans le traitement de l’hypertension artérielle). Le voriconazole, certains AINS et les quinolones sont d'autres médicaments photosensibilisants qui présentent un risque accru de mélanome, même en cas d'utilisation de courte durée. En outre, le voriconazole a été associé à un risque accru de carcinome épidermoïde, en particulier chez les patients ayant subi une transplantation d’organe.
La photoallergie, une réaction allergique qui prend son temps pour apparaître
Beaucoup plus rare que la phototoxicité, la photoallergie médicamenteuse est une véritable allergie de la peau, similaire à l’eczéma de contact. L'apparition de ses symptômes nécessite une période de sensibilisation allant de 5 à 21 jours où la personne s’expose au soleil tout en prenant le médicament responsable.
À la suite d’un premier épisode de photoallergie, toute réexposition solaire lors de prise de ce médicament, même avec des doses minimes de rayons UV, entraine un nouvel épisode de réaction photoallergique. Dans ce cas, les symptômes apparaissent seulement 24 à 48 heures après la réexposition au médicament photosensibilisant et au rayons UV.
Les symptômes de la photoallergie ressemblent à ceux de la dermatite de contact allergique : rougeurs, démangeaisons avec des lésions qui peuvent présenter un léger écoulement et devenir croûteuses. Ils disparaissent d'eux-mêmes à l'arrêt de l'utilisation du médicament responsable et en évitant l'exposition au soleil, généralement sans laisser de traces sombres.
Les médicaments responsables de photoallergie
Les médicaments responsables de photoallergie (les « photoallergènes ») sont le plus souvent des médicaments destinés à être appliqués localement sur la peau. Ironiquement, les photoallergènes les plus courants sont les filtres UV des lotions de protection solaire, en particulier l'oxybenzone, l'octocrylène, les cinnamates, et les dérivés de l'acide para-aminobenzoïque. Parmi les autres photoallergènes courants figurent de nombreux parfums, dont l'ambre musquée et l'huile de santal, des désinfectants cutanés comme la chlorhexidine et l'hexachlorophène, et des AINS topiques comme le diclofénac et le kétoprofène. Bien que moins fréquemment impliqués, certains médicaments pris par la bouche ou injectés peuvent provoquer une photoallergie, notamment la quinidine, le kétoprofène, le piroxicam, ou les antibiotiques de la famille des quinolones.
Des allergies croisées |
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Des réactions de photoallergie croisées entre les gels à base de kétoprofène et des substances chimiquement proches (le fénofibrate, l’acide tiaprofénique, les écrans solaires de type benzophénone, les composants de certains parfums) ainsi que des cas d’allergie associée à l’octocrylène ont été rapportés. Les gels de kétoprofène sont contre-indiqués chez les personnes qui ont fait une allergie cutanée lors de l’utilisation d’une de ces substances. |
Comment se protéger des réactions de photosensibilisation ?
Les médicaments photosensibilisants possèdent un symbole distinctif (pictogramme représentant un soleil partiellement voilé dans un triangle rouge) sur leur boîte afin de les identifier facilement et de prendre les mesures préventives adaptées :
- s’exposer le moins possible au soleil ;
- appliquer sur la peau exposée un écran solaire avec un facteur de protection solaire (FPS) de 50 ;
- porter des vêtements couvrants ;
- porter un chapeau à large bord ;
- porter des lunettes de soleil (blocage complet des UVA et UVB) ;
- ne pas fréquenter les cabines de bronzage.
Pour certains médicaments qui sont éliminés lentement de l’organisme, il est recommandé de se suivre ces mesures pendant toute la durée du traitement et pendant plusieurs jours après son arrêt. Consultez les notices de vos médicaments si vous devez vous exposer au soleil.
En cas de survenue d’une réaction cutanée (rougeur, démangeaisons, etc.), ne poursuivez pas le traitement sans avis médical.
Attention, d’autres produits courants peuvent également provoquer des réactions de photosensibilisation :
- certaines plantes : coriandre, persil, carotte, fenouil, céleri, millepertuis, anis, figue, citron, bergamote, pamplemousse, etc.
- des ingrédients cosmétiques tels que le triclosan (dans les déodorants), le baume du Pérou, la citronnelle, et certains parfums ;
- les boissons contenant de la quinine (tonics et bitters) ;
- les édulcorants à base de cyclamate.
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