
Les souffrances en fin de vie peuvent être indicibles
Le Conseil de l'Ordre des médecins s'empare du débat ouvert par le Président de la République

Suite à cette proposition, l'Ordre National des Médecins a ouvert un débat interne incluant l'ensemble de ses conseils régionaux et départementaux afin de définir une position commune.
Inscrire dans la loi une possibilité de sédation terminale "par devoir d'humanité"
L'Ordre estime qu'il faut "envisager une évolution de la législation sur la fin de vie pour pouvoir répondre aux situations exceptionnelles", "par devoir d'humanité". En pratique, une telle décision pourrait être prise "sur des requêtes persistantes, lucides et réitérées de la personne, atteinte d'une affection pour laquelle les soins curatifs sont devenus inopérants et les soins palliatifs instaurés".
Le Conseil préconise une "sédation adaptée, profonde et terminale" qui devra être délivrée "par un collège médical, dont il conviendrait de fixer la composition et les modalités de saisine".
Il s'agirait donc, même si l'Ordre n'emploie pas le terme "euthanasie", d'un geste euthanasique, et non uniquement d'un "laisser mourir le mieux possible", tel qu'il est possible de le pratiquer actuellement avec la loi Léonetti.
Mieux connaître les soins palliatifs, mieux informer les patients, exercer sa clause de conscience

En sus de la nécessaire diffusion de ces bonnes pratiques, la loi élaborée par Jean Léonetti (photo ci-contre) préconise un arrêt des traitements dans certaines conditions : "lorsqu'une personne, en phase avancée ou terminale d'une affection grave et incurable, quelle qu'en soit la cause, est hors d'état d'exprimer sa volonté, le médecin peut décider de limiter ou d'arrêter un traitement inutile, disproportionné ou n'ayant d'autre objet que la seule prolongation artificielle de la vie de cette personne, après avoir respecté la procédure collégiale définie par le code de déontologie médicale et consulté la personne de confiance visée à l'article L. 1111-6, la famille ou, à défaut, un de ses proches et, le cas échéant, les directives anticipées de la personne".
Le Conseil de l'Ordre souhaite que ces directives anticipées et cette notion de personne de confiance soient mieux connues du grand public, ce qui pourrait éviter des surtraitements inutiles en fin de vie.
Enfin l'Ordre réaffirme avec fermeté la liberté de chaque médecin à exercer sa clause de conscience dans le cadre de l'accompagnement de la fin de vie d'un patient.
En décembre dernier, le Pr Sicard ouvrait la porte au suicide assisté, mais pas à l'euthanasie

Ce rapport, téléchargeable sur le site de l'Elysée, faisait le même constat que l'Ordre : la loi Leonetti est mal connue, le grand public a une "hantise d'un basculement dans des situations de fin de vie insupportables", avec "l'inquiétude d'être dépossédé de son corps et de ses capacités de choix à ce moment". De plus, de très nombreuses inégalités –territoriales, sociales, médicales- exposent à des prises en charge très différentes de la fin de vie.
La Commission préconisait pour remédier à ces carences de renforcer la formation des professionnels de santé et la diffusion des soins palliatifs. Elle envisageait également une évolution possible sur le suicide assisté, qui implique que le patient prenne lui-même des médicaments létaux "prescrits par un médecin".
Mais cette Commission excluait l'euthanasie, soit l'administration de tels produits par le médecin lorsque le patient est incapable de les prendre lui-même. Une position qui est donc sensiblement différente de celle du Conseil de l'Ordre.
Une loi en juin 2013 après avis du Comité Consultatif National d'Ethique

Il a donc décidé de saisir le Comité Consultatif National d'Ethique (CCNE) qui remettra son avis dans quelques semaines, avant un projet de loi qui "sera présenté au Parlement en juin prochain".
L'avis du CCNE et le texte de loi seront-ils plus proches de la position du Pr Sicard ou de celle du Conseil de l'Ordre ? Quoiqu'il en soit, il est probable qu'une décision sera prise pour maximiser le déploiement et l'efficacité des soins palliatifs en France, ce qui améliorera le vécu de la fin de vie de nombreux patients pour qui la souffrance inutile doit être absolument évitée.
Si vous êtes médecin, vous pouvez commenter cette prise de position du Conseil de l'Ordre, ou donner tout simplement votre avis sur la prise en charge optimale de la fin de vie, en cliquant sur ce bouton

Jean-Philippe Rivière
Sources :
- "Proposition 21 du Projet présidentiel de François Hollande", programme uploadé sur Scribd.com par lemonde.fr, janvier 2012
- "LOI n° 2005-370 du 22 avril 2005 relative aux droits des malades et à la fin de vie", avril 2005
- "Fin de vie, assistance à mourir" sur le site du Conseil National de l'Ordre des médecins : communiqué du 14 février 2013, position de synthèse
- "Rapport de la commission de réflexion sur la fin de vie en France", Elysee.fr, 18 décembre 2012
"Fin de vie : remise du rapport Sicard", compte-rendu et déclarations du Président sur le site Elysee.fr, 18 décembre 2012
Photo : Jean Léonetti, sur le site de l'Assemblée Nationale
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