La vitamine C est présente dans tous les végétaux à des quantités variables.yulka3ice / iStock / Getty Images Plus / via Getty Images
Une étude récente publiée dans The Lancet Regional Health – Europe atteste une augmentation significative des cas de scorbut hospitalisés et de malnutrition sévère chez des enfants à la suite de la pandémie de Covid-19 [1].
Pour arriver à ces conclusions, les auteurs ont recensé tous les cas de scorbut hospitalisés en France entre janvier 2015 et novembre 2023 en utilisant les données du Programme de médicalisation des systèmes d'information (PMSI). Ils se sont également penchés sur les diagnostics de malnutrition, de déficit en vitamine D et en fer. Deux périodes ont été distinguées : avant l’épidémie de Covid-19 (janvier 2015-mars 2020) et après.
Au total, 888 enfants dont 431 garçons (48,5 %) ont été hospitalisés pour scorbut, avec un âge médian de 11 ans (écart interquartile : 4-15 ans). Par ailleurs, 135 360 cas de malnutrition ont été rapportés dont 59 365 correspondaient à une malnutrition sévère (43,9 %) ainsi que 44 003 cas de carence en vitamine D.
Une autre conséquence de la Covid-19 ?
La pandémie de Covid-19 a été associée à une augmentation significative de l'incidence du scorbut : élévation mensuelle moyenne de + 0,05 % versus + 1,9 % en post-Covid-19. Entre 2015 et 2023, l’incidence des enfants hospitalisés pour scorbut a augmenté de 34,5 %. À noter qu’en 2020-2023, près d’un quart des enfants hospitalisés pour scorbut (22,6 %) souffraient aussi de malnutrition.
Cette élévation de l’incidence était plus particulièrement marquée chez les enfants de 5 à 10 ans (200,8 % d’augmentation ; p < 0,001) et chez les filles (augmentation de 65,8 % depuis 2015 ; p < 0,001).
Les cas de malnutrition sévère ont également augmenté significativement après la Covid-19 : + 20,3 % (surtout chez les adolescents de 11 à 17 ans associée à un déficit en fer) alors que les cas de malnutrition légère ou modérée ont diminué de 11,2 %. Ce qui s’explique probablement par le fait que les enfants légèrement malnutris ont évolué vers une malnutrition plus sévère pendant cette période.
Quel impact de l’inflation et de la précarité socio-économique ?
Il existe une corrélation positive et significative entre l’augmentation du scorbut et de la malnutrition, d’une part et l’indice des prix alimentaires, d’autre part.
De plus, les enfants hospitalisés pour scorbut bénéficiaient significativement plus souvent de la complémentaire santé solidaire (C2S) : 27,6 % en moyenne versus 20,8 % dans la première période avec une variation relative de 32,9 % (p = 0,045).
Les résultats vont dans le même sens pour la malnutrition, 15,7 % des enfants souffrant de malnutrition entre 2020 et 2023 avaient la C2S versus 13,5 % en 2015-2020 (changement relatif de 16,3 %).
Au total, ces résultats indiquent une réémergence préoccupante du scorbut chez les enfants en France, en particulier depuis la pandémie de Covid-19. Cette augmentation est probablement liée à une détérioration de la situation socio-économique et à une inflation accrue, affectant l'accès à une alimentation équilibrée riche en vitamine C. Les auteurs soulignent l'importance de mettre en place des programmes d'aide alimentaire ciblés et de renforcer la prévention et la détection précoce de ces carences nutritionnelles.
Jean-Louis Schlienger. Cette étude – qui n’a pas de valeur épidémiologique – permet de tirer la sonnette d’alarme et d’alerter sur le fait que le scorbut existe encore aujourd’hui dans des pays développés comme le nôtre ! Cette maladie est en grande partie liée à la misère sociale, insupportable au XXIe siècle. En particulier, les résultats montrent une association, tout à fait logique, entre scorbut et malnutrition, mais aussi entre scorbut et carence en fer, car la vitamine C favorise l’absorption du fer non héminique. Le scorbut touche les personnes qui n’ont pas la possibilité de consommer des fruits et légumes tous les jours. Ainsi, il n’y a pas que les enfants qui sont concernés. Comme l’ont rapporté d’autres travaux, le scorbut est diagnostiqué aussi chez des adultes, en particulier certains groupes de population comme les sans domicile fixe. En cas de précarité sociale, les subcarences sans manifestations cliniques doivent être dépistées : « |
Besoins journaliers : de 50 à 130 mg/jour (accrus dans certaines situations) Diagnostic biologique d’une carence relevant d’un traitement : taux d’ascorbémie < 2 mg/L – valeur cible : 10 mg/L Traitement curatif : administration de vitamine C par voie orale à la dose de 500 mg/j |
[1] Assad Z et al. : Scurvy incidence trend among children hospitalised in France, 2015-2023: a population-based interrupted time-series analysis. Lancet Regional Health - Europe, 2025; 49: 101159. doi.org/10.1016/j.lanepe.2024.10115
Schlienger JL. Traiter les carences vitaminiques aujourd’hui (Actualité VIDAL, 15 décembre 2022)
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