De l'importance d'examens ophtalmologiques réguliers.Panuwat Dangsungnoen / iStock / Getty Images Plus / via Getty Images
La fréquence de la dégénérescence maculaire liée à l’âge (DMLA), dont le principal facteur de risque est l’existence d’antécédents familiaux, augmente après l’âge de 50 ans.
Elle est souvent asymptomatique, découverte lors d’un examen ophtalmologique de routine. L’association d’une baisse assez rapidement progressive de l’acuité visuelle et de métamorphopsies (vision déformée des images) est très évocatrice et doit faire adresser le patient en urgence à l’ophtalmologiste.
La prise en charge dépend du degré d’évolution de la maladie maculaire et de sa forme, sans néovaisseaux (dite aussi DMLA atrophique ou sèche) ou avec néovaisseaux (dite aussi DMLA exsudative ou humide).
La récente VIDAL Reco sur la DMLA rappelle les grandes étapes du diagnostic et du traitement.
La dégénérescence maculaire liée à l’âge (DMLA) est aujourd’hui la première cause de malvoyance dans les pays industrialisés. En France, elle serait chaque année à l'origine de 3 000 nouveaux cas de cécité, définie par une acuité visuelle < 1/10.
Elle survient après 50 ans et son incidence augmente avec l'âge, passant de 1 % entre 50 et 55 ans à plus de 25 à 30 % chez les plus de 75-80 ans.
Quels sont les facteurs de risque de DMLA ?
La survenue de la DMLA découle de facteurs génétiques, environnementaux et métaboliques.
À côté de l'âge, les antécédents familiaux constituent la cause principale. Le substratum du lien génétique est complexe et multiple ; des anomalies de la voie du complément ont été incriminées.
Le tabagisme, l’obésité, un régime alimentaire pauvre en oméga 3 ou riche en graisses saturées sont d’autres facteurs de risque reconnus, tout comme l’exposition au soleil (lumière bleue) dans l’enfance, alors que le cristallin est encore parfaitement transparent. La prise fréquente d'aspirine est à l’inverse associée à un moindre risque de DMLA.
Sur le plan physiopathologique, la maladie se caractérise par l'accumulation de dépôts lipidiques (drusen), l'atrophie de l'épithélium pigmentaire rétinien, et la dégénérescence des photorécepteurs dans la forme sèche (dite aussi atrophique), ou par une croissance de nouveaux vaisseaux (néoangiogenèse) dans la forme humide (dite aussi exsudative ou néovasculaire).
Quelles sont les circonstances diagnostiques ?
La DMLA peut rester longtemps asymptomatique, en particulier au stade précoce de maculopathie liée à l'âge et elle est ainsi souvent diagnostiquée à l'occasion d'une consultation ophtalmologique de routine. Ceci souligne l’importance d’examens réguliers, une fois tous les deux ans en l’absence de trouble visuel connu, sinon tous les ans, voire plus fréquemment en cas de DMLA aux stades précoces.
Elle peut aussi se manifester par des symptômes nécessitant une consultation dans de brefs délais : baisse d'acuité visuelle, scotome central (tache noire sur le point de fixation) ou métamorphopsies (vision déformée des images).
La baisse d’acuité visuelle est de modérément à rapidement progressive, mais rarement très brutale (ce qui orienterait plutôt vers un accident vasculaire rétinien ou au niveau du nerf optique).
Les métamorphopsies peuvent bénéficier d’un autodépistage par le test de la grille d’Amsler, ou tout simplement en fixant des angles droits tels que les montants d’une porte, qui apparaissent, dans ce cas, déformés.
Quelles sont les anomalies mises en évidence par l’examen ophtalmologique ?
Examen clinique des yeux complet, approfondi du fond d'œil, tomographie par cohérence optique (OCT), voire angiographie rétinienne permettent de confirmer le diagnostic de DMLA et d’en déterminer la forme (atrophique ou exsudative).
Le diagnostic est posé devant des anomalies de la macula :
- présence de drusens (lésions blanchâtres) et anomalies de l'épithélium pigmentaire, qui définissent le stade précoce ;
- atrophie de la fovéa ou signes de néovascularisation sous-rétinienne, qui définissent la forme tardive.
La présence ou non d'une néovascularisation distingue la forme néovasculaire (dite exsudative ou humide) et la forme atrophique (dite sèche).
La classification de la DMLA
Comme le stipule la Haute Autorité de santé (HAS) [1], il est recommandé d’utiliser la classification simplifiée en quatre stades de la Age-Related Eye Disease Study (AREDS) pour le diagnostic et le suivi.
- Catégorie 1 (pas de DMLA) :
aucun ou quelques petits drusens (diamètre < 63 µm) ;
- Catégorie 2 (maculopathie liée à l’âge) :
un ou plusieurs des éléments suivants :
multiples petits drusens, quelques drusens de diamètre > 63 et < 125 µm ou anomalies de l'épithélium pigmentaire ;
- Catégorie 3 (DMLA modérée) :
au moins un des éléments suivants : multiples drusens de diamètre > 63 et < 125 µm et au moins 1 drusen > 125 µm, atrophie géographique excluant la fovéa ;
- Catégorie 4 (DMLA avancée) :
atrophie géographique touchant la fovéa et/ou présence d'une DMLA exsudative (ou humide ou néovasculaire).
Quel traitement pour quel stade ?
- Au stade précoce, le patient doit bénéficier d’une surveillance ophtalmologique régulière (une à deux fois par an), et d’une autosurveillance (concernant notamment les métamorphopsies). L'arrêt du tabac est recommandé. Aucun traitement préventif n'est indiqué.
- Au stade intermédiaire, outre le suivi régulier annuel ou bisannuel et l’arrêt du tabagisme, l’aménagement du domicile pour limiter le risque de chutes est conseillé. La HAS, dans sa publication de 2022, ne recommande pas, à ce stade, la supplémentation en vitamines antioxydantes et oligominéraux (vitamines C et E, caroténoïdes, zinc), alors qu’elle est préconisée à très forte dose dans les recommandations internationales [2].
- Dans la DMLA avancée atrophique (ou sèche) unilatérale, la supplémentation en vitamines antioxydantes et oligominéraux (vitamines C et E, caroténoïdes, zinc) est en revanche indiquée selon la HAS, afin de prévenir l’atteinte controlatérale (mais pas de supplémentation en bêtacarotène chez les fumeurs et ceux ayant arrêté depuis moins de un an).
- Dans la DMLA avancée atrophique (ou sèche) bilatérale ou dans la DMLA avancée exsudative (ou humide ou néovasculaire), il n'y a pas de preuve d'efficacité d'une supplémentation en antioxydants et oligominéraux.
- Dans la DMLA avancée exsudative (ou humide ou néovasculaire), le recours aux anti-Vascular Endothelial Growth Factor (VEGF) en injections intravitréennes stabilise et améliore la vision, sans toutefois guérir la maladie. Les patients traités par anti-VEGF doivent être informés de la nécessité de consulter immédiatement en cas de symptômes évocateurs d’une endophtalmie, complication la plus fréquente du traitement (douleurs oculaires, gêne accrue, aggravation des rougeurs oculaires, vision trouble ou diminuée, sensibilité accrue à la lumière ou augmentation du nombre de corps flottants).
En cas d’échec des divers anti-VEGF (une permutation étant possible entre les molécules en raison de modes d’action différents), l’association à une photothérapie dynamique peut être discutée.
- En cas de DMLA avancée et bilatérale, la rééducation et les aides visuelles, telles que les systèmes grossissants mono ou binoculaires, peuvent prolonger l’autonomie très longtemps.
Quel impact sur la conduite automobile ?
Les patients ayant une DMLA peuvent conduire s’ils le souhaitent, mais s’ils satisfont à la législation. Pour pouvoir conduire un véhicule léger, il faut notamment avoir une acuité visuelle à 5/10 avec les deux yeux corrigés (acuité visuelle binoculaire corrigée).
Le patient doit être informé du risque pris (y compris l’annulation des garanties de l’assurance en cas d’accident) si ces conditions ne sont pas remplies.
Quelles sont les grandes voies de recherche ?
Les traitements régulateurs du complément récemment proposés pour une arrivée sur le marché européen n’ont pas obtenu la validation des autorités de santé. D’autres approches thérapeutiques des formes sèches sont en cours d’évaluation.
Dans les formes humides, des formulations anti-VEGF d’action prolongée, permettant d’espacer les injections, voire administrées par voie systémique sont à l’étude.
D’après un entretien avec le Pr Marc Labetoulle, chef du service d’Ophtalmologie, CHU Bicêtre et Hôpital national de la vision des 15-20, université Paris-Saclay, coordinateur de la VIDAL Reco.
[1] Recommander les bonnes pratiques. Guide « Dégénérescence maculaire liée à l'âge ». HAS, octobre 2022
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