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Nouvelles recommandations pour la fibrillation atriale : une approche multidisciplinaire et dynamique

La prise en charge de la FA vise à réduire le risque d’accident vasculaire cérébral et d’événement thrombo-embolique, ainsi qu'à améliorer la qualité de vie. Elle se fonde sur la gestion des comorbidités dans le cadre d’une approche holistique avec réévaluation régulière.

Isabelle Hoppenot 21 novembre 2024 Image d'une montre6 minutes icon Ajouter un commentaire
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L’ablation en 1re ligne dans la FA paroxystique et en 2e ligne dans la FA persistante.

L’ablation en 1re ligne dans la FA paroxystique et en 2e ligne dans la FA persistante. mdisk / iStock / Getty Images Plus / via Getty Images

Résumé

La fibrillation atriale (FA) est le trouble du rythme le plus fréquent et sa prévalence devrait doubler dans les prochaines décennies en raison du vieillissement de la population et de l’impact des comorbidités (hypertension artérielle [HTA], insuffisance cardiaque, surpoids/obésité et consommation d’alcool). 

La gestion de ces comorbidités occupe une place centrale dans la mise à jour récente des recommandations de prise en charge édictées par la Société européenne de cardiologie.

L’anticoagulation, dont les indications sont indépendantes du type de FA, vise à réduire le risque d’événement thrombo-embolique et se fonde en première intention sur les anticoagulants oraux directs, sauf cas particulier. Femmes et hommes sont à égalité avec le nouveau score de risque CHADSVA.

L’ablation, technique mûre et sûre entre des mains expérimentées, est aujourd’hui indiquée en première intention dans la FA paroxystique.

Les nouvelles recommandations de la Société européenne de cardiologie (2024) concernant la fibrillation atriale font l'objet de deux actualités : « Dépistage et diagnostic » (Partie 1) et celle-ci « Prise en charge » (Partie 2).

La Société européenne de cardiologie vient de mettre à jour ses recommandations concernant la prise en charge de la fibrillation atriale (FA) [1], dont la dernière version datait de 2020.

Peu de changement dans la classification de la FA dont la prise en charge thérapeutique est guidée par la durée des épisodes :

  • paroxystique : retour de la FA à un rythme sinusal spontanément en 2 à 7 jours ;
  • persistante : une intervention, le plus souvent une cardioversion pharmacologique ou électrique, est nécessaire pour revenir à un rythme sinusal ;
  • permanente : le maintien d’un rythme sinusal ne peut pas être obtenu.

Après ABC, la stratégie CARE

En matière de prise en charge, la stratégie antérieure ABC (pour Anticoagulation, Better control, Comorbidity) laisse la place au CARE, dont les quatre volets sont :

  • les Comorbidités ; 
  • l’Anticoagulation ; 
  • la Réduction des symptômes ; 
  • l’Évaluation/réévaluation.

Le patient est au centre des soins, dans le cadre d’une approche multidisciplinaire, intégrant la prise en charge des comorbidités et des symptômes. 

Quelle gestion des comorbidités ? 

La prise en charge des comorbidités est un point central du traitement. La FA est en effet considérée comme une « maladie de société », dont l’incidence pourrait être réduite grâce à un meilleur contrôle des facteurs de risque.

Cela passe par :

  • le dépistage de l’hypertension artérielle (HTA) et le contrôle tensionnel ;
  • la reconnaissance de l’insuffisance cardiaque (grade 1) ;
  • l’adaptation des traitements ;
  • le contrôle de la volémie ;
  • la prise en charge du surpoids et de l’obésité avec un objectif de perte d’au moins 10 % du poids initial ;
  • l’éviction de la consommation d’alcool, qui doit être de moins de 3 verres par semaine (< 30 g d’alcool).

La mise en place d’un programme d’activité physique, indépendant des activités quotidiennes, est recommandée à raison de 140 minutes par semaine à 70 % de la fréquence maximale théorique. 

À noter que le dépistage systématique de l’apnée du sommeil par questionnaire n'est pas recommandé, car sa prise en charge ne modifie pas le résultat de l'ablation ou de la cardioversion.

Quand mettre en place une anticoagulation ?

Le volet anticoagulation, qui vise à réduire le risque d’accident vasculaire cérébral et d’événement thrombo-embolique, est indépendant des autres. L’approche est identique quels que soient le type des épisodes et la prise en charge proposée par ailleurs.

CHADSVA remplace CHADSVASC

Le classique score CHADSVASC (C pour insuffisance cardiaque chronique, H pour HTA, A pour Âge > 75 ans, D pour Diabète, S pour antécédents d’AVC ou d’AIT, V pour atteinte vasculaire, A pour Âge entre 65 ans et 74 ans, SC pour Sex Category) est remplacé par le score CHADSVA, traduisant l’abandon de la prise en compte du sexe du patient (SC) dans un souci de simplification. Chaque item vaut 1 point, sauf l’âge > 75 ans et les antécédents d’AVC ou d’AIT qui valent 2 points.

En pratique, les indications de l’anticoagulation sont inchangées en cas de :

  • score CHADSVA > 2 (classe I) ;
  • score CHADSVA à 1 (classe IIa).

L’indication à une anticoagulation reste systématique si la FA est associée à une cardiomyopathie hypertrophique ou une amylose cardiaque (classe IB).

HAS-BLED disparaît

Pour l’évaluation du risque hémorragique, le score HAS-BLED disparaît.

Comme dans les recommandations de 2020, le choix se porte en première intention sur les anticoagulants oraux directs (AOD), plus faciles à gérer et associés à une moindre morbi-mortalité que les antivitamines K. Ces dernières restent le traitement de choix chez les patients porteurs de valve mécanique et en cas de sténose mitrale.

L’occlusion de l’auricule peut être proposée (classe IIb) lorsque l’anticoagulation n’est pas possible.

Quelle stratégie de contrôle du rythme ?

En cas de FA paroxystique, l’ablation est désormais recommandée en première ligne (recommandation de classe I), comme un traitement par antiarythmique selon l’évaluation et les préférences du patient dans le cadre d’une décision partagée.

En cas de FA persistante, un traitement antiarythmique est recommandé en première ligne (classe I). L’ablation est proposée en deuxième intention en cas d’échec ou d’intolérance aux antiarythmiques, car elle donne de moins bons résultats dans ce contexte (classe IIb).

En cas d’insuffisance cardiaque, l’ablation est recommandée en première intention (classe I).

Trois types d’énergie sont désormais disponibles pour l’ablation ou l’isolement du tissu cardiaque responsable de l’arythmie :

  • la radiofréquence (qui génère une température élevée) ;
  • la cryoénergie (froid) ;
  • le champ électrique pulsé (électroporation).

Globalement, les trois techniques donnent de bons résultats, chacune ayant ses avantages et ses inconvénients.

Le risque de complications sévères (à type de fistule atrio-œsophagienne ou d’AVC) associées à la thermo-ablation est aujourd’hui très faible (moins de 0,1 %).

L’électroporation, qui présente l’avantage de sa spécificité pour le tissu cardiaque, n’est adaptée qu’à l’ablation des veines pulmonaires et expose à ses complications propres.

Au total, quelle que soit l’énergie utilisée, l’ablation est aujourd’hui une technique mûre et sûre dans des mains expérimentées.

Quelle stratégie de contrôle de la fréquence ? 

Le ralentissement de la fréquence cardiaque concerne surtout la FA permanente, car il y a un risque de dégradation de la fonction cardiaque.

La fréquence cible est ≤ 110/mn.

Le choix du traitement, qui vise à réduire la fréquence cardiaque et les symptômes, est guidé par la fraction d’éjection ventriculaire gauche (FEVG) :

  • bêtabloquant et/ou digoxine lorsqu’elle est < 40 % ;
  • inhibiteurs calciques (diltiazem, vérapamil) ou digoxine au-dessus de 40 %.

Évaluer et réévaluer le patient

À travers le E de l’acronyme CARE, les nouvelles recommandations européennes mettent l’accent sur la nécessité d’évaluer et de réévaluer régulièrement les patients présentant une FA, dans le cadre d’un suivi multidisciplinaire. La FA est en effet un trouble du rythme qui évolue avec l’âge, les mécanismes physiopathologiques sous-jacents (électriques, neuro-hormonaux, hémodynamiques), les facteurs de risque et les comorbidités, ce qui requiert une prise en charge dynamique.

D’après un entretien avec le Pr Jean-Claude Deharo, chef du service de Cardiologie-rythmologie, hôpital de La Timone, Marseille, secrétaire général du bureau de la Société française de cardiologie.

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