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Choléra à Mayotte : déploiement d'un dispositif de dépistage avec TROD

Pour éviter une propagation du choléra à Mayotte, un ensemble de professionnels, dont les médecins, infirmiers, sages-femmes et pharmaciens d'officine, sont autorisés à réaliser un TROD pour la détection du Vibrio cholerae chez des personnes susceptibles d'être contaminées.

David Paitraud 27 mars 2024 Image d'une montre7 minutes icon Ajouter un commentaire
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Un cas de choléra a été détecté à Mayotte le 18 mars 2024 chez une personne provenant des Comores.

Un cas de choléra a été détecté à Mayotte le 18 mars 2024 chez une personne provenant des Comores.rarrarorro / iStock/Getty Images Plus / via Getty Images

Résumé

À la suite de l'identification d'un premier cas de choléra à Mayotte, un dispositif de dépistage est mis en place. Il s'inscrit dans le cadre d'un plan d'action plus large visant à éviter une propagation du vibrion sur l'ensemble de cette île, alors qu'une épidémie est observée aux Comores.

Le dispositif de dépistage repose notamment sur l'utilisation d'un test rapide d'orientation diagnostique (TROD) réalisé sur un échantillon de selles. Un récent arrêté ministériel permet à certains professionnels de santé (médecins, infirmiers, sages-femmes, biologistes et techniciens de laboratoire médical, chirurgiens-dentistes, masseurs kinésithérapeutes, pharmaciens d'officine et préparateurs, aides-soignants et auxiliaires de puériculture, vétérinaires), à des étudiants en santé (troisième cycle de médecine et pharmacie) et aux sapeurs-pompiers professionnels et volontaires de pratiquer ce test chez des personnes susceptibles d'être contaminées.

Les professionnels concernés doivent bénéficier d'une formation spécifique au TROD Vibrio cholerae. Ils doivent respecter les bonnes pratiques définies dans l'arrêté du 19 mars 2024 : 

  • critères de sélection du test ;
  • bonnes pratiques de réalisation ;
  • bonnes pratiques de remise du résultat.

À ce jour, la vaccination anticholérique en population générale ne se justifie pas à Mayotte.

Dans le cadre des mesures d'urgence prises pour éviter la propagation du choléra sur l'île de Mayotte (cf. Encadré 1), le ministère de la Santé autorise les professionnels suivants à réaliser des tests rapides d'orientation diagnostique (TROD) [1] pour dépister les personnes susceptibles d'être contaminées par le Vibrio cholerae : 

  • les médecins, les sages-femmes, les chirurgiens-dentistes, les infirmiers, les masseurs kinésithérapeutes ;
  • les biologistes médicaux et les techniciens de laboratoire médical exerçant dans le laboratoire de biologie médicale ;
  • les pharmaciens d'officine et les préparateurs en pharmacie exerçant dans l'officine de pharmacie ;
  • les aides-soignants et les auxiliaires de puéricultures sous la supervision d'un infirmier diplômé d’État ;
  • les étudiants en troisième cycle des formations en médecine et en pharmacie ;
  • les vétérinaires ;
  • les sapeurs-pompiers professionnels et volontaires titulaires de la formation d'équipier dans le domaine d'activité du secours d'urgence aux personnes.
Encadré 1 - Point sur les cas de choléra à Mayotte et à la Réunion (mars 2024)

Dans les territoires français de l'Océan indien, un premier cas de choléra confirmé a été enregistré le 18 mars 2024, chez une personne en provenance des Comores [2]. Un cas a également été enregistré à La Réunion le 20 mars, chez une personne ayant séjourné en Inde [3]. 

Une épidémie de choléra est actuellement en cours en Union des Comores. La proximité avec Mayotte a conduit l'Agence régionale de santé (ARS) et la préfecture à mettre en place, dès février, un plan d'action visant à endiguer la transmission de la bactérie et son implantation sur le territoire mahorais.

Le premier cas identifié à Mayotte a été pris en charge au sein de la cellule « choléra » du centre hospitalier mahorais, afin de stabiliser son état de santé.

En parallèle, une opération a été menée au domicile de ce patient :

  • pour identifier les cas contacts et coexposés et leur délivrer les premiers traitements ;
  • pour procéder à la désinfection du foyer, conduire des analyses environnementales et diffuser les recommandations sanitaires aux personnes du voisinage. 

À La Réunion, la situation est très surveillée et les mesures de précaution nécessaires (dont le contact tracing) sont mises en œuvre. Contrairement à Mayotte, le risque de propagation sur le territoire est considéré de niveau faible.  

Le TROD vibrio cholerae pour dépister rapidement

Pour rappel, le choléra est une toxi-infection digestive provoquant une perte d'eau et d'électrolytes [4]. Elle se contracte par ingestion d'eau ou d'aliments contaminés par les bacilles Vibrio cholerae des sérogroupes O1 et O139 toxinogènes. Moins de 20 % des malades développent l'ensemble des symptômes typiques du choléra.

Dans les cas les plus sévères, le choléra se manifeste par de violentes diarrhées « en eau de riz » et des vomissements à l'origine d'une déshydratation. En l'absence de traitement, le décès survient rapidement (de 1 à 3 jours).

Le choléra est une maladie à déclaration obligatoire.

Le TROD constitue une réponse rapide de détection de Vibrio cholerae O1 et/ou O139 (agents pathogènes responsables du choléra), d'où son intérêt pour éviter la propagation de la maladie. Il est réalisé sur un prélèvement de selles humaines [5].

L'arrêté du 19 mars 2024 encadre la réalisation de ce TROD dans les conditions suivantes :

  • les professionnels ont au préalable bénéficié d'une formation spécifique ;
  • le test est utilisé conformément aux indications de la notice d'utilisation et aux recommandations de bonnes pratiques précisées en annexe de l'arrêté (cf. Encadré 2) ;
  • le consentement « libre et éclairé » des personnes dépistées doit être recueilli (ou celui du ou des représentants légaux pour les mineures), et une information des avantages et des limites respectives de chacun de ces tests doit être transmise. 

Les TROD utilisés doivent avoir un marquage CE ou, à défaut, disposer d'une autorisation spécifique de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM).

Encadré 2 - Bonnes pratiques pour la réalisation du TROD Vibrio cholerae [1]

Le professionnel qui réalise le test vérifie :

  • la validité de la date de péremption du test ;
  • les conditions de conservation du test ;
  • les conditions de récupération des échantillons biologiques ;
  • les règles d'hygiène pour la manipulation des prélèvements ;
  • le respect du mode opératoire pour la réalisation du test ;
  • le respect du délai de lecture du test ;
  • les informations nécessaires à fournir au patient en fonction du résultat du test.

Une procédure d'assurance qualité est rédigée par le professionnel effectuant les TROD et gardée à disposition pour être consultée lors de la réalisation des tests. Elle est composée de deux parties : 

  • la procédure générale de réalisation du TROD qui comporte (outre la notice) :
    • la nécessité :
      • de se laver soigneusement les mains avant et après le test pour le professionnel en charge du test,
      • de vérifier la date de péremption,
      • de respecter impérativement les recommandations du fabricant ;
    •  les modalités :
      • de communication du résultat au patient,
      • de la prise en charge du patient en cas de positivité,
      • de remise du résultat au patient quel que soit le statut de l'effecteur,
      • de conservation des données dans des conditions garantissant le secret médical,
      • d'élimination des déchets d'activité de soins à risques infectieux ;
  • les modalités de traçabilité de l'utilisation de chaque test pour chaque patient. Le résultat du test d'orientation diagnostique est remis sur un document mentionnant les éléments suivants :
    • le nom de la personne pour laquelle le test est utilisé (prénom, nom patronymique et date de naissance),
    • le résultat,
    • le nom commercial du TROD utilisé,
    • le numéro de lot,
    • la date de péremption,
    • la date et l'heure de réalisation,
    • l'identification du professionnel ayant effectué le test.

Pas de vaccination en population générale, mais des consignes d'hygiène et de prévention

À ce jour, la vaccination en population générale ne se justifie pas à Mayotte, ni pour les voyageurs. La vaccination n'est recommandée que pour : 

  • les personnes dites « de première ligne » : SAMU, soignants de l’unité « choléra » du centre hospitalier, ambulanciers, agents du centre de rétention administrative (CRA), agents de la lutte contre l’immigration clandestine (LIC), agents s’occupant du ramassage des déchets contaminés, associations et autres personnes amenées à intervenir autour des cas ; 
  • la communauté vivant à proximité d’un cas de choléra.

La vaccination est réalisée avec le vaccin oral recombinant inactivé DUKORAL suspension et poudre effervescente pour suspension buvable. Ce vaccin n'est efficace que sur Vibrio cholerae O1.

Dans sa foire aux questions (FAQ) [6], l'ARS de Mayotte précise que tout cas confirmé bénéficiera d’un traitement à deux niveaux :

  • un traitement permettant d’éliminer la bactérie avec la prise d’antibiotique ;
  • un traitement permettant de réduire les risques de déshydratation.

Les personnes suivantes doivent s'isoler, s'hydrater avec de l'eau potable et appeler immédiatement le 15 : 

  • celles souffrant de diarrhées ET ayant séjourné aux Comores ou en Afrique continentale depuis moins de 10 jours ;
  • ou en contact étroit avec une autre personne revenant d’un de ces pays depuis moins de 10 jours ;
  • ou ayant consommé des produits frais apportés des Comores dans les 10 jours ; 
  • ou souffrant de diarrhées aqueuses aiguë et d’une déshydratation sévère ; 
  • ou souffrant de diarrhées après avoir été en contact avec un cas suspect de choléra.

Pour les personnes se rendant aux Comores, il est recommandé d'appliquer les mesures d'hygiène : 

  • se laver les mains très régulièrement à l'eau savonneuse ou utiliser un gel hydroalcoolique ;
  • privilégier la consommation d'eau embouteillée.

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