Il est essentiel d'anticiper tout projet de grossesse et d'en parler avec son médecin.AlexRaths / iStock Getty Images Plus / via Getty Images
L'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) a réalisé une revue des données relatives aux risques de malformations congénitales et de troubles neurodéveloppementaux chez les enfants exposés in utero aux antiépileptiques.
À l'issue de ce travail, l'Agence a élaboré une fiche d'information à l'attention des professionnels de santé et des patientes.
Un classement des antiépileptiques est également proposé en fonction de leur niveau de risques malformatifs et de troubles neurodéveloppementaux :
- augmentation des risques malformatifs et de troubles neurodéveloppementaux démontrée : valproate, topiramate, carbamazépine. Pour la carbamazépine, des nouvelles mesures d'encadrement de la prescription et de la dispensation seront mises en place en 2024 ;
- augmentation du risque de malformations démontrée, mais pas du risque de troubles neurodéveloppementaux, faute de données suffisantes : primidone, phénobarbital, phénytoïne et fosphénytoïne, prégabaline. Pour la prégabaline, les données récentes ont été prises en compte ;
- pas de conclusion possible, à ce jour, sur les risques malformatifs ou de troubles neurodéveloppementaux, faute de données suffisantes : oxcarbazépine, gabapentine, zonisamide, felbamate, vigabatrine. La surveillance se poursuit ;
- aucun risque de malformations ou de troubles neurodéveloppementaux identifié : lamotrigine et lévétiracétam.
L'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) propose un classement (cf. Tableau) des médicaments antiépileptiques en fonction de leur niveau de risques malformatifs et de troubles neurodéveloppementaux [1] chez les enfants exposés in utero.
Ce classement est issu d'un récent rapport [2] intégrant les données produites depuis 2019 (date du précédent rapport).
Il permet de :
- justifier les mesures mises en place ou à mettre en place pour réduire les risques tératogènes (malformatifs) ou les risques à distance (neurodéveloppementaux) associés à certains antiépileptiques ;
- guider les prescripteurs dans le choix d'un antiépileptique chez les femmes en âge de procréer.
Ce classement des antiépileptiques est présenté dans une fiche d'information [3] destinée à être un support au dialogue entre prescripteurs et patientes.
Le niveau de risque est hiérarchisé selon les antiépileptiques notamment par comparaison à la fréquence globale de « base » observée dans la population générale qui est de 2 à 3 % de malformations congénitales majeures (indépendamment d'une exposition médicamenteuse).
Tableau - niveau de risque de malformations congénitales et de risque de troubles neurodéveloppementaux
(extrait du rapport ANSM 2023 sur les antiépileptiques)
Confirmation de l'augmentation du risque de malformations et de troubles neurodéveloppementaux
Le rapport publié par l'ANSM confirme l'augmentation du risque malformatif et de troubles neurodéveloppementaux des antiépileptiques suivants, lorsqu'ils sont pris en cours de grossesse : valproate et dérivés, topiramate, et carbamazépine.
Valproate en tête de classement, suivi du topiramate
Le valproate ou ses dérivés valpromide et divalproate (DEPAKINE, DEPAKOTE, DEPAMIDE, MICROPAKINE et génériques) sont les médicaments qui présentent le niveau de risque le plus élevé chez l'enfant exposé pendant la grossesse :
- risque de malformations majeures multiplié par 4 à 5 (11 %) par rapport au risque sans traitement ;
- risque de troubles neurodéveloppementaux élevé entre 30 à 40 %.
L'ANSM rappelle que ces médicaments sont formellement contre-indiqués pendant la grossesse dans la prise en charge des troubles bipolaires et ne doivent pas être utilisés chez les femmes enceintes épileptiques, sauf en l’absence d’alternative thérapeutique. Chez les femmes enceintes et les femmes en âge de procréer, des conditions de prescription et de délivrance particulières s'appliquent à ces médicaments.
En outre, un risque potentiel de troubles neurodéveloppementaux associé à la prise de valproate par le père dans les trois mois précédant la conception est en cours d’évaluation au niveau européen (cf. nos articles du 8 août 2023 et du 23 novembre 2023).
Le topiramate (EPITOMAX et génériques) est classé en seconde place en termes de risque malformatif et neurodéveloppemental :
- risque de malformations majeures multiplié par 3 par rapport au risque sans traitement ;
- risque de troubles neurodéveloppementaux chez les enfants exposés au topiramate pendant la grossesse augmenté par 2 à 3 fois (troubles du spectre autistique jusqu’à 6 % et risque de survenue d’une déficience intellectuelle jusqu’à 8 %) par rapport aux enfants nés de femmes épileptiques qui ne prennent pas de médicaments antiépileptiques.
En 2023, l'ANSM a réservé la prescription du topiramate aux neurologues et aux pédiatres ; la délivrance à l'officine est conditionnée par la signature d’un accord de soins annuel par la patiente et son médecin (cf. notre article du 11 mai 2023).
Une évaluation européenne a restreint l’utilisation du topiramate chez les femmes en âge d’avoir des enfants (cf. notre article du 12 septembre 2023).
Carbamazépine : des nouvelles conditions de prescription et de délivrance à venir
Le risque de malformations congénitales majeures associé à la carbamazépine (TEGRETOL et génériques) est 2 à 3 fois supérieur en comparaison à la population générale.
Concernant le risque de troubles neurodéveloppementaux : « selon les nouvelles données disponibles, il est possible que celui-ci soit augmenté chez les enfants exposés à la carbamazépine par rapport à la population non exposée », note l'ANSM qui classe la cabamazépine en troisième position des antiépileptiques les plus à risque.
Tenant compte de ces nouvelles données et « afin de réduire le nombre encore trop important de grossesses sous carbamazépine », l'ANSM prévoit, dès 2024 :
- de rendre obligatoire la signature d’une attestation d’information partagée par la patiente et le médecin prescripteur ;
- de conditionner la dispensation des médicaments de carbamazépine à la présentation de cette attestation cosignée.
Augmentation du risque de malformations, mais pas du risque de troubles neurodéveloppementaux
La phénytoïne (DI-HYDAN, DILANTIN), la fosphénytoïne (PRODILANTIN), le phénobarbital (GARDENAL), la primidone (MYSOLINE) et la prégabaline (LYRICA et génériques) sont des antiépileptiques pour lesquels :
- le risque de malformations congénitales majeures en cas d'exposition in utero est confirmé ;
- les données relatives au risque de troubles neurodéveloppementaux sont actuellement insuffisantes.
Concernant la prégabaline plus précisément, le risque de malformations majeures chez l’enfant exposé pendant la grossesse est désormais démontré. Jusqu'à présent, il n'était que suspecté. Ce risque est multiplié par près de 1,5 par rapport à la population qui n’a pas été exposée à ce médicament.
Ce risque est multiplié par 3 pour le phénobarbital et la primidone et par 2 à 3 pour la phénytoïne et la fosphénytoïne.
Concernant ces différentes molécules, les données sont insuffisantes pour évaluer le risque de troubles du neurodéveloppement et pour conclure.
Lamotrigine et lévétiracétam : aucun risque identifié
Pour la lamotrigine (LAMICTAL et génériques) et le lévétiracétam (KEPPRA et génériques, LEPTAX* et LEVIDCEN), les données disponibles ne mettent pas en évidence d’augmentation du risque de malformations congénitales majeures ou de troubles du neurodéveloppement.
* LEPTAX n'est plus commercialisé en France depuis juillet 2023.
Données insuffisantes : molécules sous surveillance
Pour les molécules suivantes, les données sont actuellement insuffisantes (ou inexistantes) pour démontrer ou écarter un risque de malformation et de troubles neurodéveloppementaux :
- oxcarbazépine (TRILEPTAL et génériques)* ;
- vigabatrine (KIGABEQ et SABRIL), le felbamate (TALOXA), le zonisamide (ZONEGRAN et génériques) et la gabapentine (NEURONTIN et génériques)** ;
- autres médicaments*** : le brivaracétam (BRIVIACT), le cannabidiol (EPIDYOLEX), le cénobamate (ONTOZRY), l’eslicarbazépine (ZEBINIX), l’éthosuximide (ZARONTIN), le fenfluramine (FINTEPLA), la lacosamide (VIMPAT et génériques), le pérampanel (FYCOMPA), la rufinamide (INOVELON) et la tiagabine (GABITRIL).
« L'absence de données ne signifie pas absence de risque, mais que l’information n’est pas connue à ce jour », souligne l'ANSM. La surveillance de ces molécules se poursuit.
** cf. tableau 3 page 22 dans le rapport [2]
*** cf. annexe 2 sommaire page 3 dans le rapport [2]
Des effets indésirables observés chez l'enfant
Enfin, comme cela est souligné dans la fiche d'information patiente, les effets indésirables de certains médicaments pris par la mère peuvent aussi être observés chez l’enfant : troubles du champ visuel pour la vigabatrine (KIGABEQ et SABRIL), hématotoxicité et hépatotoxicité pour le felbamate (TALOXA) et faible poids pour la zonisamide (ZONEGRAN et génériques).
[1] Antiépileptiques et grossesse : mieux connaître les risques pour l’enfant à naître (ANSM, 29 novembre 2023)
[2] Rapport sur les antiépileptiques et leurs risques au cours de la grossesse (ANSM, 29 novembre 2023)
[3] Fiche d'information patiente : antiépileptique et projet de grossesse (ANSM, 29 novembre 2023)
- DEPAKINE 200 mg cp gastrorésis
- DEPAKINE 200 mg/ml sol buv
- DEPAKINE 400 mg/4 ml prép inj IV
- DEPAKINE 500 mg cp gastrorésis
- DEPAKINE 57,64 mg/ml sirop
- DEPAKINE CHRONO 500 mg cp pellic séc LP
- DEPAKOTE 250 mg cp gastrorésis
- DEPAKOTE 500 mg cp gastrorésis
- DEPAMIDE 300 mg cp pellic gastrorésis
- DI-HYDAN 100 mg cp séc
- DILANTIN 250 mg/5 ml sol inj
- DIVALCOTE 250 mg cp gastrorésis
- DIVALCOTE 500 mg cp gastrorésis
- EPITOMAX 100 mg cp pellic
- EPITOMAX 15 mg gél
- EPITOMAX 200 mg cp pellic
- EPITOMAX 25 mg gél
- EPITOMAX 50 mg cp pellic
- EPITOMAX 50 mg gél
- GARDENAL 10 mg cp
- GARDENAL 100 mg cp
- GARDENAL 200 mg/4 ml pdre/solv p sol inj
- GARDENAL 40 mg/2 ml pdre/solv p sol inj
- GARDENAL 50 mg cp
- KEPPRA 100 mg/ml sol buv
- KEPPRA 100 mg/ml sol diluer p perf
- KEPPRA 1000 mg cp pellic
- KEPPRA 250 mg cp pellic
- KEPPRA 500 mg cp pellic
- KIGABEQ 100 mg cp soluble
- KIGABEQ 500 mg cp soluble
- LAMICTAL 100 mg cp dispers/croquer
- LAMICTAL 2 mg cp dispers/croquer
- LAMICTAL 200 mg cp dispers/croquer
- LAMICTAL 25 mg cp dispers/croquer
- LAMICTAL 5 mg cp dispers/croquer
- LAMICTAL 50 mg cp dispers/croquer
- LEVIDCEN 1000 mg glé enr en sachet
- LEVIDCEN 250 mg glé enr en sachet
- LEVIDCEN 500 mg glé enr en sachet
- LEVIDCEN 750 mg glé enr en sachet
- LYRICA 100 mg gél
- LYRICA 150 mg gél
- LYRICA 20 mg/ml sol buv
- LYRICA 200 mg gél
- LYRICA 25 mg gél
- LYRICA 300 mg gél
- LYRICA 50 mg gél
- LYRICA 75 mg gél
- MICROPAKINE LP 100 mg glé LP
- MICROPAKINE LP 1000 mg glé LP
- MICROPAKINE LP 250 mg glé LP en sachet-dose
- MICROPAKINE LP 500 mg glé LP
- MICROPAKINE LP 750 mg glé LP
- MYSOLINE 250 mg cp séc
- NEURONTIN 100 mg gél
- NEURONTIN 300 mg gél
- NEURONTIN 400 mg gél
- NEURONTIN 600 mg cp pellic
- NEURONTIN 800 mg cp pellic
- PRODILANTIN 75 mg/ml sol inj
- SABRIL 500 mg cp pellic
- SABRIL 500 mg glé p sol buv
- TALOXA 600 mg cp
- TALOXA 600 mg/5 ml susp buv
- TEGRETOL 20 mg/ml susp buv
- TEGRETOL 200 mg cp séc
- TEGRETOL LP 200 mg cp pellic séc LP
- TEGRETOL LP 400 mg cp pellic séc LP
- TRILEPTAL 150 mg cp pellic
- TRILEPTAL 300 mg cp pellic
- TRILEPTAL 60 mg/ml susp buv
- TRILEPTAL 600 mg cp pellic
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