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Quand les patients deviennent les acteurs de leur propre sécurité

Faire des patients les acteurs de leur propre sécurité est le thème choisi pour l’édition 2023 de la Semaine de la sécurité des patients. Mais de quoi s’agit-il en pratique ? Pourquoi cette implication est-elle importante ?

Patricia Thelliez 21 novembre 2023 Image d'une montre7 minutes icon Ajouter un commentaire
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Les patients doivent oser parler et les professionnels de santé prendre le temps d'écouter.

Les patients doivent oser parler et les professionnels de santé prendre le temps d'écouter.

Résumé

La semaine de la Sécurité des patients est l’occasion de renforcer la collaboration entre les professionnels de santé, les patients et leurs proches. Elle a lieu cette année du 20 au 24 novembre.

L’Organisation mondiale de la santé, lors de la Journée mondiale de l’OMS du 17 septembre 2023 a retenu le thème : « Faire des patients les acteurs de leur propre sécurité ».

Il a en effet été montré que lorsqu'ils sont associés aux soins qui leur sont prodigués, les résultats, leur satisfaction, ainsi que leur sécurité sont nettement améliorés.

Comment les patients sont-ils capables, aujourd’hui, de pratiquer l’autogestion de leurs soins ? Quels sont les écueils et les points d’amélioration ? Françoise Sellin, consultante en santé, patiente partenaire et fondatrice de l’agence Expertise-Patient, et Béatrice Le Floch-Meunier, chargée de mission qualité-gestion des risques, structure régionale d’appui Occitanie, nous apportent leur éclairage.

L’implication des patients dans leurs propres soins est de plus en plus encouragée. Ainsi la Journée mondiale de la sécurité des patients [1] de l’Organisation mondiale de la santé du 17 septembre dernier a eu pour thème « Faire des patients les acteurs de leur propre sécurité ». Thème qui est également, en France, celui de la Semaine de la sécurité des patients [2] se tenant du 20 au 24 novembre 2024, pour laquelle la direction générale de l’Offre de soins (DGOS) est fortement mobilisée.

Parallèlement, la notion de prise en charge holistique fait aussi progressivement son chemin et l’éducation thérapeutique gagne du terrain dans de nombreuses spécialités médicales.

Pour Françoise Sellin, consultante en santé, patiente partenaire et fondatrice de l’agence Expertise Patient, il faut d’emblée souligner qu’au-delà d’un changement de paradigme, les patients n’ont en réalité souvent pas le choix : « La situation actuelle des hôpitaux, constamment sous pression et en manque cruel de personnel, la transmission des informations entre les médecins hospitaliers et les professionnels de santé de ville qui n’est pas toujours optimale, les délais d’attente des consultations de spécialistes, les déserts médicaux ont pour effet de reporter la vigilance du suivi postopératoire, des soins de suite, de la prise des médicaments... sur le patient et son entourage. »

Et si cette responsabilisation des malades est souhaitable, notamment en ce qui concerne la sécurité, force est de constater qu'elle est « pour certains patients et leur entourage, subie plutôt que voulue ».

Une mission qui s’exerce tout au long du parcours de soins

En pratique, comment les patients sont-ils capables d’assumer ces nouvelles « fonctions » ? Pour Françoise Sellin, plusieurs points importants doivent être à cet égard soulignés : 

« Cette autosurveillance ou “self care” est particulièrement importante lorsque la personne a une maladie chronique. Elle doit bien souvent apprendre à la gérer et cela durant toute sa vie.

De même, après une chirurgie ou lors de traitements médicamenteux lourds tels que la chimiothérapie, le patient doit être attentif aux symptômes et aux effets secondaires afin d’alerter au plus vite l’équipe médicale (cf. Encadré 1). Il est donc essentiel qu’il soit informé, voire formé, par des professionnels de santé pour faire face aux diverses situations auxquelles il va être confronté.

L’entourage familial joue aussi un rôle important, en particulier lors d’une hospitalisation à domicile où il est souvent amené à pratiquer des soins. Il est donc nécessaire que les professionnels de santé éclairent et conseillent le patient et son entourage afin de les préparer aux risques éventuels et à la manière de les gérer (cf. Encadré 2).

Les soignants doivent également être attentifs aux préoccupations, angoisses, fatigue des patients et leur entourage, qui peuvent se traduire de différentes manières et nuire, par exemple, à l’observance médicamenteuse, voire même entraîner une maltraitance de la part des proches. »

La question demeure cependant de savoir « jusqu’où il est possible d’aller dans l’autocontrôle. Comment faire pour garder un équilibre entre la responsabilisation du patient et ses propres capacités ? »

 Encadré 1 - Oser parler. Prendre le temps d'écouter

En tant qu’acteurs de leur propre sécurité, les patients ont un rôle qu’ils ne s’autorisent pas toujours à jouer. Or leur participation à la surveillance de leur état de santé, de leur traitement, de leur prise en charge en général permet d’éviter des erreurs médicales.

Pour Béatrice Le Floch-Meunier, chargée de mission qualité-gestion des risques de la structure régionale d’appui Occitanie, « bien souvent, les patients hésitent à faire part de ce qu’ils constatent d’anormal comme “ce bracelet d’identité n’est pas le bon”, “ces gélules ne sont pas de la même couleur que d’habitude”, “on ne me donne plus le traitement que je prenais chez moi”, etc. ». C’est dommage, car ces constats peuvent être des informations capitales en termes de prévention de survenue d’événements indésirables graves.

Le double message serait donc, pour les patients d’« oser parler » et pour les professionnels de santé de « prendre le temps d’écouter »

D’après un entretien avec Béatrice Le Floch-Meunier, chargée de mission qualité-gestion des risques, structure régionale d’appui Occitanie.

 

  • N.B. : les vidéos de l’AP-HP mises en ligne à l'occasion de la Semaine de la sécurité des patients :
    • « Votre enfant est hospitalisé ? »
    • « Le cathéter : utile mais pas sans risque » 

 

Encadré 2 - À condition que le patient soit informé...

Le patient ne peut pas être responsable de sa propre surveillance et assumer des choix, par exemple thérapeutiques, si les professionnels de santé ne l’ont pas préalablement informé.

Béatrice Le Floch-Meunier insiste sur ce préalable nécessaire et incontournable. « C’est aux professionnels de santé de délivrer tous les éléments d’information concernant la prise en charge et de s’assurer que la personne a bien compris les explications médicales données. Il est nécessaire que le patient ait bien assimilé le rapport bénéfice-risque de telle ou telle intervention, thérapeutique ou chirurgicale, par exemple.

Ce n’est, en effet, qu’à cette condition que le patient peut devenir acteur de sa propre sécurité et qu’il puisse exercer son libre arbitre face à une décision médicale le concernant.

D’après un entretien avec Béatrice Le Floch-Meunier, chargée de mission qualité-gestion des risques, structure régionale d’appui Occitanie.

Éducation thérapeutique, applications et associations de patients

Dans ce cadre, l’éducation thérapeutique joue un rôle certain. Mais, il faut toutefois rappeler que le patient doit être consentant et que « l’éducation thérapeutique ne se limite pas à des explications ou des conseils délivrés par les professionnels de santé : il s’agit de programmes dédiés dans lequel la personne se fixe des objectifs précis », tient à ajouter Françoise Sellin.

Elle poursuit : « Aujourd’hui, se développe l’utilisation d’applications mobiles destinées à maintenir le lien entre les professionnels de santé et les patients lorsqu’ils sont à leur domicile. Ces applications permettent aux personnes suivies de communiquer des données, susceptibles de générer des alertes et ainsi d'optimiser le suivi médical. Cependant, ces outils numériques, même s’ils sont amenés à se généraliser, ne seront pas forcément adoptés par les patients. »

Un soutien et un accompagnement peuvent également être apportés par des associations de patients. « Les patients et leurs proches viennent y chercher des informations, des temps de répit et d’échange entre pairs ce qui peut permettre, entre autres, de diminuer la charge mentale, source de stress. »

Pour conclure

On le voit, il existe encore de nombreux points d’amélioration possible pour que les patients puissent apprendre à devenir acteurs de leurs propres soins et pouvoir porter cette responsabilité. Dans la réalité, il est frappant de souligner « la dichotomie qu’il y a malheureusement aujourd’hui entre, d’une part, cette volonté politique à impliquer les patients et qui prône une prise en charge holistique et, d’autre part, la situation sanitaire critique dans laquelle se trouvent aujourd’hui les professionnels de santé, notamment au sein des structures hospitalières ».

D’après un entretien avec Françoise Sellin, consultante en santé, patiente partenaire et fondatrice de l’agence Expertise Patient.

 

Sources

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