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Hanche douloureuse chez un jeune sportif : et si c’était un conflit fémoro-acétabulaire ?

Le conflit fémoro-acétabulaire est une pathologie fréquente se traduisant par une douleur au niveau de l’aine. Une prise en charge précoce permet d’éviter l’évolution vers une arthrose de hanche.

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Fréquent chez les sportifs de 15 à 50 ans.

Fréquent chez les sportifs de 15 à 50 ans.

Résumé

Chez un sujet jeune se plaignant d’une douleur au niveau de l’aine, il faut savoir penser, en dehors d’une atteinte tumorale ou abdominale (hernie inguinale), à une cause extra-articulaire, le ressaut antérieur de hanche, et aux principales causes articulaires que sont la dysplasie de hanche et le conflit fémoro-acétabulaire (CFA).

Le CFA est une pathologie microtraumatique fréquente qui résulte de la combinaison d’une déformation osseuse congénitale et d’un surmenage articulaire, comme c’est le cas chez les sportifs.

En l’absence de diagnostic précoce et d’une prise en charge adaptée, le risque est celui de l’apparition prématurée d’une coxarthose.

La douleur de hanche est une situation relativement fréquente chez les sujets âgés de 15 à 50 ans qui pratiquent une activité sportive. Les médecins généralistes jouent un rôle de premier plan dans le dépistage des deux grandes étiologies articulaires pourvoyeuses d’arthrose que sont la dysplasie de hanche et le conflit fémoro-acétabulaire (CFA). L’interrogatoire et l’examen clinique permettent d’évoquer ces diagnostics et donc d’initier rapidement les examens pour infirmer ou confirmer l’orientation clinique et permettre, le cas échéant, une prise en charge précoce.

VIDAL. Quelles sont les principales étiologies à rechercher en cas de douleurs de la hanche chez les sujets jeunes ?

Dr Linh Vu Ngoc. Une douleur au niveau de l’aine peut être d’origine extra-articulaire ou articulaire. 

Parmi les causes extra-articulaires, après avoir éliminé une pathologie tumorale ou abdominale (hernie inguinale), il faut savoir reconnaître le ressaut antérieur de hanche. Ce dernier résulte d’un conflit lors de la mise en tension du tendon de l’ilio-psoas sur le versant antérieur de la hanche, en regard de l’éminence iliopectinée. 

Ce conflit n’est pas toujours douloureux et peut ne se traduire que par un bruit. Ce dernier est souvent rapporté par le patient (typiquement une jeune danseuse) comme un « craquement » lors de la flexion-extension de la hanche.

Même en l’absence de douleurs, il doit être pris en charge afin d’éviter le risque de bursite et de lésions tendineuses. Le traitement se fonde sur le repos relatif et une prise en charge par le kinésithérapeute pour éviter les pressions sur le tendon, si besoin en corrigeant les gestes sportifs.

Les deux principales causes articulaires sont la dysplasie de hanche et le conflit fémoro-acétabulaire (CFA), dont le risque évolutif est l’arthrose de hanche précoce. Il faut donc savoir évoquer ces diagnostics.

Qu’est-ce-que la dysplasie de hanche ?

Il s’agit d’un défaut de couverture du cotyle sur la tête fémorale, que l’on recherche chez les nourrissons, mais qui a pu passer inaperçu jusqu’à l’apparition de douleurs dans l’aine à l’adolescence ou à l’âge adulte.

D’un point de vue physiopathologique, l’instabilité de la hanche liée à la dysplasie est compensée par d’importantes contractions musculaires périarticulaires et une rétraction capsulaire. Il en résulte une élévation de la pression intra-articulaire responsable de douleur et d’usure prématurée du cartilage, avec un risque de coxarthrose précoce.

Toute suspicion de dysplasie de hanche doit faire adresser le patient à un médecin ayant une expertise dans ce domaine (rhumatologue, médecin du sport, chirurgien orthopédiste). Le diagnostic est confirmé à l’aide d’une IRM et surtout d’un arthroscanner, qui permet d’analyser l’état du cartilage et du labrum (NDLR : fibrocartilage ayant une fonction de « joint d'étanchéité » et favorisant la distribution des contraintes au niveau de l'acétabulum [cotyle]).

La rééducation visant à rééquilibrer les forces entre stabilité et liberté de hanche, permet de résoudre le problème dans la majorité des cas. Cette prise en charge précoce doit permettre d’éviter le recours à un traitement chirurgical qui serait essentiellement prothétique.

Qu’est-ce que le conflit fémoro-acétabulaire ?

Le conflit fémoro-acétabulaire (CFA) est une pathologie microtraumatique qui résulte de la combinaison d’une déformation osseuse congénitale située à la hanche et d’un surmenage articulaire.

Quand l’anomalie anatomique est située au col du fémur, on parle d’ « effet came » et quand elle est située au niveau du bassin, on parle d’« effet pince » :

  • le CFA par effet came est lié à la présence d’une proéminence au niveau de la jonction cervico-céphalique antérieure du col fémoral, qui se traduit par une « bosse » sur les clichés radiologiques ;
  • le CFA par effet pince (ou tenaille) découle d’une surcouverture de la tête fémorale sur le versant acétabulaire. 

Avec une prévalence des formes symptomatiques de 10 à 15 %, le CFA est une pathologie fréquente. Sa physiopathologie est mal connue. On retrouve l’association d’antécédents familiaux de pathologie de hanche à un âge jeune et de facteurs de risque liés à la pratique sportive, comme des mouvements répétés de flexion/rotation de hanche, en particulier de grande amplitude.

Quels sont les sports favorisants ?

Tous les sports qui nécessitent des mouvements de flexion/rotation de la hanche et génèrent une impaction peuvent favoriser de développement d’un CFA.

C’est par exemple le cas des :

  • arts martiaux : pieds/poings + impact lors des coups de pied ;
  • sports à pivot tels que le football, le handball et le rugby ;
  • sports de raquette : tennis, badminton, sans oublier le tennis de table qui, de par la rotation du tronc pied fixe au sol, génère d’importantes contraintes sur l’articulation coxo-fémorale ;
  • sports à grande amplitude d’ouverture de hanche comme la danse, la natation artistique ou encore le water-polo.

Quels sont les éléments qui orientent vers le diagnostic de CFA ?

En pratique, il faut y penser systématiquement face à un patient consultant pour une douleur au pli de l’aine.

L’interrogatoire est essentiel pour préciser l’ancienneté de la douleur et ses caractéristiques.

Il s’agit d’une douleur mécanique, qui n’apparaît pas toujours lors du mouvement, mais qui peut survenir après une position assise prolongée avec mise en pression de la hanche.

Elle peut, comme en cas de coxarthrose, avoir une composante inflammatoire, et entraîner des réveils nocturnes sans forcément de raideur matinale.

Des antécédents familiaux de prothèse de hanche à un âge jeune (avant 60 ans) sont à rechercher systématiquement.

Comment mener l’examen clinique ?

Il importe, dans un premier temps, de regarder comment la personne marche, à plats, pieds nus, idéalement les hanches dégagées (boiterie ou non, asymétrie de longueur de jambe), puis d’examiner le rachis et enfin le bassin, de façon statique et dynamique. Il est intéressant de poser la main sur l’aine du patient, en position debout et en demi-squat, et de lui demander de faire des flexions de la hanche pour voir si ce mouvement accroît la douleur ou déclenche un ressaut.

L’examen clinique se poursuit en décubitus dorsal, avec l’analyse de la hanche en flexion-extension puis en flexion-rotations.

  • Le test de Faber (pour Flexion, ABduction and External Rotation) recherche une impaction postérieure de la hanche (cf. Figure 1), puis le test de Fadir (pour Flexion, ADduction and Internal Rotation) une impaction antérieure (cf. Figure 2). Le déclenchement d’une douleur lors du test de Faber ou de Fadir signe une pathologie au niveau articulaire et oriente vers un CFA.
     
  • Puis la hanche est examinée en rotation interne et externe isolée

Figure 1 - Flexion, abduction et rotation externe (test de Faber)

Légende : Le patient est allongé sur le dos. Le thérapeute place la cheville du membre inférieur à tester juste au-dessus du genou opposé, de manière à placer la hanche en flexion, abduction et rotation externe. Le thérapeute maintient l'épine iliaque antéro-supérieure controlatérale d'une main. À l'aide de l'autre main, il applique une pression sur le genou dirigée vers le sol pour augmenter l'amplitude de rotation externe de hanche. Le test est considéré comme positif s’il reproduit la douleur du patient ou limite son amplitude de mouvement.

 

Figure 2 - Flexion, adduction et rotation interne (test de Fadir)

Légende : Le patient est allongé sur le dos. Le thérapeute amène le membre à tester en flexion, adduction, rotation interne de hanche, genou fléchi à 90 °. Le test est considéré comme positif si la manœuvre est sensible, voire douloureuse pour le patient dans la région antérieure de la hanche.

 

  • Il est également utile de rechercher un hypoextensibilité des ischio-jambiers, en demandant à la personne de tendre la jambe alors que la cuisse est inclinée de 90 ° par rapport au bassin (cf. Figure 3).

Figure 3 - Extensibilité des ischio-jambiers

Légende : Le patient est allongé sur le dos. Le thérapeute effectue une flexion de hanche à 90 ° puis une extension de genou du membre à tester. Le praticien mesure l’angle entre la verticale et le segment jambier.

 

  • Toujours en décubitus dorsal, le test de Thomas (flexibilité du psoas) permet de savoir si la jambe controlatérale reste bien à plat ou tend à fléchir lors de la flexion d’une jambe sur le torse (cf. Figure 4).

Figure 4 - Extensibilité du psoas (test de Thomas)

Légende : Le patient est allongé sur le dos. Le praticien amène le membre inférieur non testé en flexion de hanche et flexion du genou jusqu’à ce que la colonne lombaire soit plaquée sur la table. Le praticien observe si le membre controlatéral (testé) décolle du plan de la table. Si c’est le cas, le praticien mesure l’angle de flexion de hanche.

 

  • Enfin, l’examinateur teste la hanche en rotation en position couchée et assise.

Quels sont les examens d’imagerie de première intention ?

Au moindre doute, il faut faire une échographie abominable pour éliminer une cause intra-abdominale (hernie inguinale).

Pour la hanche à proprement parler, dès lors qu’un test de Faber ou de Fadir est positif, il faut prescrire une radiographie du bassin de face, avec étude de la couverture des têtes fémorales, complétée d’un profil de Dunn, d’un faux profil de Lequesne et d’une coxométrie, dont les résultats seront utiles pour le spécialiste.

Ces radiographies sont très informatives. Elles permettent de visualiser la présence d’une dysplasie ou d’un CFA, et d’en préciser le type (effet came ou effet pince) grâce aux clichés de profil de Dunn et de Lequesne. 

Dans un deuxième temps, et cette démarche est généralement du ressort du spécialiste, une IRM peut être utile chez un sujet jeune pour une étude plus globale de l’articulation et la recherche d’un éventuel œdème osseux.

Un arthroscanner est toujours réalisé (parfois sans passer par la case IRM) pour apprécier l’atteinte du cartilage et du labrum, dont les lésions sont pourvoyeuses d’arthrose.

Quelles sont les grandes lignes de la prise en charge thérapeutique ?

Si la hanche est douloureuse, après avoir éliminé les contre-indications, une infiltration intra-articulaire de corticoïdes peut être faite lors de l’arthroscanner.

Ce geste permet de calmer l’inflammation, de confirmer l’origine intra-articulaire des douleurs et de débuter la rééducation en attendant un avis chirurgical.

L’avis du chirurgien orthopédiste est essentiel même si le traitement est surtout rééducatif et sportif.

Le volet rééducatif vise à lever les tensions, à rééquilibrer les forces autour de la hanche et à permettre un parfait contrôle moteur articulaire. Le volet sportif vise, quant à lui, à trouver des stratégies pour adapter le geste technique afin d’éviter les amplitudes extrêmes et à retrouver une efficience optimale dans la zone de confort articulaire.

Cette approche permet dans la plupart des cas de résoudre le problème et le recours à la chirurgie est ainsi peu fréquent, sous réserve bien sûr d’un diagnostic précoce.

Les médecins généralistes, qui sont en première ligne, jouent à cet égard un rôle majeur.

 

D’après un entretien avec le Dr Linh Vu Ngoc, médecin du sport, chef du pôle médical et paramédical du Centre de ressources d'expertise et de performance sportive (CREPS) Île-de-France.

Infographie VIDAL réalisée par Marion Grillon.

Sources

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