La biotine est à la fois apportée par l’alimentation et fabriquée par la flore intestinale.
Selon un rapport établi en octobre 2022 par le Comité pour l’évaluation des risques en matière de pharmacovigilance (PRAC) de l’Agence européenne des médicaments (EMA), les données de sécurité des spécialités à base de lévothyroxine ont mis en évidence un risque d'interférence entre la biotine (vitamine B8 ou H) et les tests évaluant la fonction thyroïdienne (TSH, Tg, T3 et T4) [1]. Celui-ci va être ajouté dans les documents d'information des spécialités concernées (cf. Encadré), c'est-à-dire les résumés des caractéristiques du produit (RCP) et les notices.
Ce risque est également rapporté avec les compléments alimentaires contenant de la biotine et disponibles en conseil à l'officine pour le soin des phanères (ongles et cheveux) et de la peau.
La biotine entre également dans la formulation de médicaments de supplémentation vitaminique injectables indiqués chez des patients recevant une nutrition parentérale :
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Résultats erronés = prise en charge inadaptée
Le risque d'interférence entre la biotine et la fonction thyroïdienne est rapporté pour les dosages des hormones thyroïdiennes basés sur l'interaction biotine/streptavidine.
Il est observé chez des patients présentant une hypothyroïdie ou une hyperthyroïdie, ainsi que chez les patients sous lévothyroxine après une thyroïdectomie ou les patients hyperthyroïdiens traités à l'iode radioactif ou par des médicaments antithyroïdiens.
Cette interférence peut aboutir à des résultats de dosage d'hormones thyroïdiennes, notamment de la thyroxine (T4), faussement élevés ou faussement bas, à l'origine :
- d'une prise en charge inadaptée du patient ;
- ou d'un diagnostic erroné d’hypothyroïdie ou d’hyperthyroïdie.
« Compte tenu de l'usage de plus en plus répandu de compléments alimentaires contenant de fortes doses de biotine et la prévalence de l'hypothyroïdie nécessitant des bilans thyroïdiens périodiques pour ajuster les valeurs de thyroxine (T4), le risque d'une mauvaise prise en charge de ces patients basée sur des résultats erronés est élevé », soulignent les laboratoires dans leur courrier adressé aux professionnels de santé [2].
Dans la plupart des cas, les résultats d'analyses de laboratoire se sont normalisés après l'arrêt de la biotine ou l'utilisation d'une autre méthode de dosage des hormones thyroïdiennes.
En pratique : identifier la prise de biotine, informer le patient et le laboratoire d'analyse de biologie médicale
Une interférence mettant en cause la biotine doit être envisagée si les résultats des tests de la fonction thyroïdienne ne sont pas cohérents avec le tableau clinique et/ou d'autres examens.
Il est recommandé aux professionnels de santé, notamment aux prescripteurs :
- de demander systématiquement au patient s'il prend de la biotine, y compris via un complément alimentaire, avant de prescrire un dosage de la fonction thyroïdienne ;
- en cas de réponse positive, d'informer le laboratoire d'analyse de biologie médicale car des tests alternatifs peuvent être utilisés.
« La connaissance de la prise de biotine est particulièrement importante dans le situations nécessitant une posologie très précise de lévothyroxine, comme les femmes enceintes, les enfants, les personnes âgées, et les patients suivis pour un cancer de la thyroïde résiduel ou récidivant », soulignent les laboratoires dans leur courrier du 13 mars 2023.
Les patients doivent également être sensibilisés à ce risque d'interférence lorsqu'ils achètent des compléments alimentaires à base de biotine, afin d'en informer leur médecin prescripteur.
[1] Interférence de la biotine avec les analyses de laboratoire de la fonction thyroïdienne (ANSM, 13 mars 2023)
[2] Lettre des laboratoires aux professionnels de santé - Biotine et analyse de fonction thyroïdienne (sur le site de l'ANSM, 13 mars 2023)
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