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Migrants ukrainiens : vérifier et compléter le statut vaccinal

Le Haut Conseil de la santé publique, la Société de pathologie infectieuse de langue française et le site Infovac insistent sur l’importance de vérifier et compléter le statut vaccinal des migrants venant d’Ukraine. En cause, des couvertures vaccinales insuffisantes.  

Corinne Tutin 05 avril 2022 Image d'une montre5 minutes icon Ajouter un commentaire
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La couverture vaccinale en Ukraine est inférieure aux objectifs de l'OMS (illustration).

La couverture vaccinale en Ukraine est inférieure aux objectifs de l'OMS (illustration).

Résumé
Le Haut Conseil de la santé publique (HCSP), la Société de pathologie infectieuse de langue française (Spilf) et Infovac rappellent que l'Ukraine est l'un des pays d'Europe où le risque infectieux doit être le plus surveillé, ce, en raison de couvertures vaccinales insuffisantes.

L'Ukraine a d'ailleurs connu récemment un foyer de poliomyélite et une épidémie de rougeole.

Le rattrapage vaccinal concernera en priorité le BCG, la diphtérie, le tétanos, la polio, la rougeole et la COVID-19.

Il pourra être complété par les vaccinations pneumocoque conjugué, méningocoque C, et HPV, lesquelles ne figurent pas dans le calendrier ukrainien.

 
Le poids des maladies infectieuses reste important en Ukraine. Cela s'explique notamment par des taux de couverture vaccinale inférieurs aux objectifs de l'Organisation mondiale de la santé (OMS), rappelle le Haut Conseil à la santé publique dans son avis du 23 mars 2022 sur le rendez-vous santé des personnes migrantes en provenance d'Ukraine (1) :

En 2021, les taux de couverture vaccinale étaient de :

  • 82 % pour le BCG ;
  • 80 % pour le vaccin contre la diphtérie, le tétanos et la coqueluche (3 doses) et le vaccin antipoliomyélitique (3 doses) ;
  • 79 % pour le vaccin contre l'hépatite B (3 doses) ;
  • 87 % pour la vaccination anti-rougeoleuse (2 doses).

Depuis septembre 2021, plusieurs cas de poliomyélite liés à un poliovirus circulant de type 2, dérivé d'une souche vaccinale, ont aussi été constatés dans le pays. Par ailleurs, l'Ukraine a connu une épidémie très importante de rougeole durant la période 2017-2019 avec plus de 50 000 cas notifiés en 2018.

Procéder à un rattrapage vaccinal en l'absence de preuve vaccinale
Il est donc essentiel d'analyser le statut vaccinal des personnes venant d'Ukraine afin, éventuellement, de mettre en place un rattrapage vaccinal, ce en tenant bien sûr compte « des éventuelles réticences à la vaccination, des croyances ou représentations culturelles ou religieuses », précise le HCSP. En cas de statut vaccinal inconnu, les recommandations édictées en décembre 2019 par la Société de pathologie infectieuse de langue française (Spilf) et la Haute Autorité de santé (HAS) (2), ont rappelé qu'il n'est pas dangereux d'administrer des vaccins à une personne éventuellement immunisée contre la maladie.

Des différences avec le calendrier français
Le calendrier vaccinal ukrainien (voir tableau ci-dessous) diffère du calendrier français. Ainsi, il ne comporte pas les vaccinations pneumocoque conjugué, méningocoque C, et papillomavirus (HPV).

Pour mieux se repérer, les professionnels de santé pourront accéder à une traduction du calendrier ukrainien. S'agissant des personnes migrantes non ukrainiennes (par exemple, des étudiants), ils pourront consulter le site de l'Organisation mondiale de la santé pour analyser calendrier vaccinal et couverture vaccinale.

 

Calendrier vaccinal ukrainien 2018 (Source Newsletter Spilf-Infovac) 

 

DTP, ROR, BCG, vaccins contre la COVID-19 : une priorité
Le rattrapage concernera en priorité les vaccins DTPCa/DTPCaHib/dTP/ dTPca/ selon l'âge, ainsi que le ROR, le BCG, et les vaccins contre la COVID-19 (cf. Vidal Recos « Vaccinations » - Rubrique Cas particulier).

Jusqu'à quatre injections peuvent être effectuées lors du même rendez-vous.

Dans une newsletter publiée le 18 mars 2022, la Spilf et Infovac (3) détaillent les conditions pratiques du rattrapage du vaccin DTPCa, qui reposera sur 3 doses à M0, M2 et M8 (avant 16 ans vaccin tétra, penta ou hexavalent). Chez les plus jeunes, dont les vaccinations sont supposées à jour, une seule dose de vaccin pourra être proposée, suivie d'une sérologie du tétanos 4 à 8 semaines plus tard. Le schéma vaccinal sera considéré comme complet, après ce rappel, si la réponse en antitoxine tétanique est supérieure à 1 UI/mL. En revanche, si, après cette dose unique, elle reste inférieure à 0,1 UI/mL, l'enfant n'a probablement jamais été vacciné et un programme complet de rattrapage sera appliqué. Lorsque le taux d'anticorps se situe entre 0,1 et 1 UI/mL, une dose supplémentaire, 6 mois après, doit être proposée.

Un rattrapage pour les vaccinations pneumocoque conjugué (moins de 2 ans), méningocoque C (moins de 25 ans) et HPV (à partir de 11 ans) sera également envisagé, tout de suite (si le calendrier ukrainien a été respecté) ou secondairement.

Un taux très faible de vaccination contre la COVID-19
La vaccination anti-COVID-19 sera aussi proposée en cas de schéma incomplet ou manquant, en l'absence de ses très rares contre-indications (myocardite associée à l'infection, allergie documentée, etc.). Elle a, de fait, été peu pratiquée en Ukraine (35,6 % de vaccinés au 16 février 2022), y compris chez les plus de 60 ans, pourtant les plus exposés au risque de maladie grave. On pourra demander un test rapide d'orientation diagnostique (TROD) pour mieux préciser le statut vaccinal.

Les vaccins anti-COVID 19, principalement utilisés en Ukraine, ont été les vaccins à ARN messager COMIRNATY et SPIKEVAX, les vaccins à vecteur viral non réplicatif VAXZEVRIA (ou son équivalent COVISHIELD), COVID-19 VACCINE JANSSEN, le vaccin russe SPUTNIK (encore nommé GAM-COVID-VAC) et le vaccin entier inactivé SINOVAC.

Les vaccins COMIRNATY, SPIKEVAX, VAXZEVRIA (ou son équivalent COVISHIELD), COVID-19 VACCINE JANSSEN sont reconnus en Europe. Le vaccin SINOVAC ne l'est pas, mais l'est, en revanche, par l'OMS ; « il faudra refaire 1 dose de vaccin à ARN messager même en cas de schéma complet avec SINOVAC, 4 semaines après la dernière injection, puis une dose de rappel », recommandent la Spilf et InfoVac. Pour le vaccin SPUTNIK, qui est non reconnu, même par l'OMS, au moins 2 doses de vaccin à ARN messager devront être prévues, quel que soit le schéma vaccinal initial.
 
Grippe : une vaccination à discuter chez les personnes à risque
La vie en promiscuité, que beaucoup de personnes migrantes venues d'Ukraine ont subi, fait aussi craindre une augmentation des infections respiratoires, dont la grippe. Ce d'autant que la couverture vaccinale semble avoir été faible en Ukraine pour la saison 2021-2022. « Cela peut faire discuter, dans le contexte de reprise de circulation virale, une vaccination des personnes à risque comme les femmes enceintes ou celles avec des comorbidités », estime le HCSP.

Les animaux aussi
Enfin, de nombreuses personnes venant d'Ukraine sont arrivées avec un animal de compagnie, une circulation facilitée par l'assouplissement de la procédure de la Commission européenne.

Il faudra recommander à ces propriétaires de vacciner leurs animaux contre la rage, si cela n'a pas été fait. La maladie reste endémique en Ukraine et la couverture vaccinale est faible.

Edit du 6 avril 2022 : Dans un DGS - Urgent publié ce jour et intitulé "Ukraine - Appui du système de santé français" (6), il est indiqué qu'un passe sanitaire (carnet de santé) en français est disponible en version interactive, avec possibilité de remplir le document directement (Passeport Santé 2022 VF-UKN) et en version à imprimer (Passeport Santé VF-UKN à imprimer). Il est précisé qu'il sera prochainement disponible en ukrainien./Fin EDIT

©vidal.fr

Pour aller plus loin

(1) Avis relatif aux enjeux de santé publique et au rendez-vous santé des personnes migrantes en provenance des zones de conflits en Ukraine. HCSP, 23 mars 2022
(2) Fiche de synthèse : rattrapage vaccinal chez les migrants primo-arrivants. HAS, décembre 2019
(3) Newsletter Spilf-Infovac Spéciale Ukraine, 18 mars 2022

 

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