Un interrogatoire détaillé et un examen clinique complet (illustration).
Résumé
Le Haut Conseil de la santé publique (HCSP) a publié le 23 mars 2022 un avis relatif aux enjeux de santé publique et au rendez-vous santé des migrants en provenance des zones de conflits en Ukraine.
Cet avis rappelle la nécessité de mettre en place un rendez-vous santé dans les quatre mois suivant l'entrée en France de ces personnes, rendez-vous que le HCSP avait d'ailleurs recommandé pour tous les étrangers primo-arrivants dans un avis précédent datant de mai 2015.
Cette consultation permettra d'informer ces personnes migrantes sur l'organisation des soins en France, de faire le point sur les affections psychiques et physiques qu'elles peuvent présenter, d'organiser le dépistage, la prise en charge médicale et l'éventuel rattrapage vaccinal.
Le Haut Conseil de la santé publique (HCSP) a publié le 23 mars 2022 un avis relatif aux enjeux de santé publique et au rendez-vous santé des migrants en provenance des zones de conflits en Ukraine.
Cet avis rappelle la nécessité de mettre en place un rendez-vous santé dans les quatre mois suivant l'entrée en France de ces personnes, rendez-vous que le HCSP avait d'ailleurs recommandé pour tous les étrangers primo-arrivants dans un avis précédent datant de mai 2015.
Cette consultation permettra d'informer ces personnes migrantes sur l'organisation des soins en France, de faire le point sur les affections psychiques et physiques qu'elles peuvent présenter, d'organiser le dépistage, la prise en charge médicale et l'éventuel rattrapage vaccinal.
Le 15 mars 2022, plus de 15 000 personnes fuyant la guerre en Ukraine avaient été accueillies en France. Cette situation a conduit la Direction générale de la santé (DGS) à demander au Haut Conseil de la santé publique (HCSP) d'actualiser son avis du 6 mai 2015 relatif à la visite médicale des étrangers primo-arrivants en provenance de pays tiers (1). Les objectifs de la DGS sont d'identifier les principaux enjeux de santé publique chez ces personnes arrivant d'Ukraine. Publié le 23 mars 2022, le nouvel avis du Haut Conseil de la santé publique (2) s'est appuyé sur les expertises et recommandations de la Société de pathologie infectieuse de langue française (Spilf), la Société française de santé publique (SFSP), la Haute Autorité de santé (HAS).
Un « rendez-vous santé » dans un délai de quatre mois
Dans son avis, le Haut Conseil de la santé publique rappelle que les personnes qui résidaient en Ukraine avant le début de la guerre, soit le 24 février 2022, bénéficient (de même que les ressortissants étrangers qui y vivaient et ne sont pas en capacité de regagner leur pays) d'une autorisation provisoire de séjour, au titre de la protection temporaire, pour une durée de un an. Elle leur permet d'accéder à l'Assurance maladie et à la complémentaire santé solidaire gratuitement, sans délai de carence. Les enfants arrivés sans leurs parents pourront être immatriculés en tant qu'ayant droit ADCA (ascendant, descendant, collatéraux ou alliés).
Le HCSP souligne que ces migrants devront, comme il le préconisait dans son avis antérieur de 2015, bénéficier, comme tous les étrangers primo-arrivants, d'un « rendez-vous santé » dans un délai maximal de quatre mois après leur entrée en France.
Cela permettra, non seulement de les informer et les insérer dans le système de soins français, d'expliquer certaines démarches administratives, mais aussi de prendre en charge des affections chroniques dont elles peuvent souffrir, de dépister et diagnostiquer des maladies infectieuses ou autres, de rechercher des vulnérabilités favorisées par le parcours de migration : psychotraumatismes, violences sexuelles. Les professionnels devront être sensibilisés à l'accueil de ces personnes.
Le Comité pour la santé des exilés (Comede) propose un livret de santé bilingue français-russe (3), qui fournit des informations pratiques sur l'accès aux soins, les structures de santé, etc.
Une consultation essentielle pour informer, dépister, organiser les soins
En pratique, ce rendez-vous santé permettra :
- d'expliquer le fonctionnement du système de santé français ;
- de rechercher un risque suicidaire ou de décompensation psychologique et organiser un soutien psychologique précoce ;
- d'établir les besoins médicaux de la personne migrante (médicaments, dispositifs médicaux : lunettes, appareils auditifs, lait maternisé pour les nourrissons) ;
- d'évaluer les signes évocateurs de maladie infectieuse (fièvre, toux, diarrhée, etc.) ;
- d'organiser le suivi des grossesses ;
- de proposer éventuellement un dépistage (maladies infectieuses, cancers gynécologiques) ;
- de prévoir la prise en charge médicale, notamment celle des nourrissons en centre de protection maternelle et infantile (PMI) ;
- de vérifier et de compléter les vaccinations manquantes (cf. notre article « Migrants ukrainiens : vérifier et compléter le statut vaccinal »).
Interroger, examiner, faire le point
Lors de la consultation, le médecin pratiquera, après interrogatoire détaillé (sommeil, troubles psychiques, antécédents médicaux, traitements), un examen clinique complet avec prise de la pression artérielle. Il fera le point sur le statut vaccinal. Mais, dans les situations complexes, ceci peut être effectué par des professionnels ou des structures référents. Les vaccinations infantiles seront, si besoin, complétées le plus rapidement possible, notamment le BCG chez les nourrissons, et le ROR. Néanmoins, la réalisation des dépistages et du rendez-vous santé ne doivent pas constituer un préalable à l'admission à l'école, qui doit être effectuée précocement, insiste le HCSP.
Les autres examens complémentaires à demander (glycémie, créatininémie, etc.) seront fonction des particularités cliniques.
Ne pas oublier les hépatites et la tuberculose
L'attention portera sur le risque de maladies infectieuses, lequel demeure notable en Ukraine. Un rapport du centre européen pour la prévention et le contrôle des maladies [European Centre for Disease Prevention and Control (ECDC)] (4) a fait le point le 8 mars 2022 sur l'épidémiologie de ces affections.
Il faudra ainsi penser à la possibilité d'hépatites B et C, l'Ukraine constituant encore une zone d'endémie intermédiaire. Le praticien vérifiera que le traitement de ces hépatites n'a pas été interrompu.
Même chose pour le VIH. L'Ukraine se caractérise, en effet, par un taux de diagnostic du VIH plus de dix fois supérieur à celui de l'Europe dans son ensemble [37,5/100 000 contre 3,3 pour 100 000 selon les chiffres de l'Organisation mondiale de la santé (OMS)]. De plus, on estimait qu'en 2020 seulement 57 % des 146 000 sujets infectés par le VIH en Ukraine recevaient des médicaments antirétroviraux, contre 82 % dans l'Union européenne.
Des symptômes évocateurs devront conduire à rechercher une tuberculose, l'Ukraine étant le deuxième pays le plus touché sur le continent avec 28 539 cas en 2019 (incidence de 65/100 000), dont 27 % de tuberculoses multirésistantes aux médicaments. Chez les mineurs, l'infection tuberculeuse latente pourra être dépistée par une intradermoréaction à la tuberculine ou par test de détection de production d'interféron gamma [Interferon Gamma Release Assay (IGRA)], remboursé seulement avant 15 ans, mais accessible gratuitement dans les centres de lutte antituberculeuse (Clat).
Penser à la COVID-19
Un dépistage de la COVID-19 devra aussi être mis en place, notamment devant des signes évocateurs ou en cas d'hébergement collectif. À la date du 14 mars 2022, l'Ukraine avait en effet enregistré 5,04 millions de cas avec 112 000 décès et, avant le début de la guerre, le pays faisait face à une quatrième vague d'infections due principalement au variant Omicron (35 978 cas le 10 février 2022).
Qu'ils soient antigéniques ou réalisés par RT-PCR, les tests pourront être pratiqués gratuitement en l'absence de schéma vaccinal complet, même sans prescription médicale, sur présentation du document préfectoral attestant le bénéfice de la protection temporaire. À savoir, des fiches d'informations sur l'infection COVID-19 (5) sont disponibles en ukrainien sur le site de Santé publique France.
Edit du 6 avril 2022 : Dans un DGS - Urgent publié ce jour et intitulé « Ukraine - Appui du système de santé français » (6), il est indiqué qu'un passe sanitaire (carnet de santé) en français est disponible en version interactive, avec possibilité de remplir le document directement (Passeport Santé 2022 VF-UKN) et en version à imprimer (Passeport Santé VF-UKN à imprimer). Il est précisé qu'il sera prochainement disponible en ukrainien./Fin EDIT
©vidal.fr
Pour aller plus loin
(1) Avis relatif aux recommandations concernant la visite médicale des étrangers primo-arrivants en provenance de pays tiers. HCSP, 6 mai 2015
(2) Avis relatif aux enjeux de santé publique et au rendez-vous santé des personnes migrantes en provenance des zones de conflits en Ukraine. HCSP, 23 mars 2022
(3) Livret de santé bilingue français/russe. Comede
(4) Rapport. ECDC, 8 mars 2022
(5) Fiche d'information. Santé publique France, 16 mars 2022
(6) 2022-DGS-Urgent 45 : Ukraine - Appui du système de santé français
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