#Santé publique #COVID-19

Bons baisers d’Omicron : quelles nouvelles de ce variant très atypique ?

Plus transmissible, Omicron est-il vraiment moins dangereux que les variants précédents ? Si c’est le cas, comment expliquer cette différence ? BA.2 est-il une menace ? Enquête sur les particularités d’un variant inattendu.
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Le variant Omicron, plus transmissible, semble moins générateur de formes sévères, donc potentiellement moins immunogène (illustration).

Le variant Omicron, plus transmissible, semble moins générateur de formes sévères, donc potentiellement moins immunogène (illustration).

Résumé
Entre son envolée soudaine et aujourd'hui, à peine deux mois se sont écoulés et, déjà, beaucoup de données ont été accumulées sur le variant Omicron : épidémiologiques, génétiques et pathogéniques.

S'il ne fait plus aucun doute que ce variant est nettement plus transmissible que les précédents, des questions persistent sur la cause de ce bond de contagiosité. Meilleure affinité pour le récepteur ACE2 ? Immunorésistance ? Capacité à infecter plus de cellules que les variants précédents ?

De la même manière, des questions persistent sur les raisons de l'évolution du tableau clinique observé lors d'infection par Omicron : symptômes davantage centrés sur la sphère ORL, moindres complications pulmonaires, diminution du taux d'hospitalisation et de décès, hospitalisations plus courtes, etc. Il semble probable que cette évolution soit en lien avec l'originalité essentielle d'Omicron : son mode d'infection cellulaire n'est plus celui privilégié par les variants précédents, modifiant ainsi son tropisme et l'exposant davantage à l'immunité innée.

Enfin, l'apparition du sous-variant BA.2, capable de supplanter BA.1, ne semble pas fondamentalement modifier la donne. Légèrement plus transmissible que la première version d'Omicron, il ne semble pas différent en termes de pathogénicité ou d'immunorésistance.

Il faudra plus de temps pour savoir si l'apparition d'Omicron constitue un tournant dans la pandémie. Un relâchement des mesures de contrôle, observé dans de nombreux pays du fait de la réduction du risque de forme sévère, expose, via l'explosion du nombre de cas, à la fois les personnes fragiles et le système de santé. Sans certitude sur les bénéfices à attendre en termes de protection de la part de ce variant.

Trois mois après son apparition (les traces d'Omicron les plus anciennes datent des premiers jours de novembre 2021), que sait-on de nouveau sur le variant Omicron ? Est-il vraiment plus transmissible et moins pathogène ? Comment expliquer ses particularités cliniques ? Quelle est l'origine de ce variant très atypique ? Étude après étude, le profil d'Omicron s'affine, des réponses se dessinent, soulevant tout autant de questions.

Un variant deux fois moins responsable de formes sévères…
Plusieurs études observationnelles pointent vers une réduction du taux d'hospitalisation et de décès pour les infections par Omicron, comparées à celles par Delta ou les variants plus anciens [données des Centers for Diseases Control and Prevention (CDC) américains, aussi d'Angleterre, d'Écosse, de Californie et d'Afrique du Sud].

Par exemple, selon les CDC, le taux de passage en soins critiques des patients hospitalisés pour Omicron est de 13 %, contre 18 % pour Delta ou pour Alpha/D614G (les deux variants présents lors de la vague hivernale 2020-2021). La durée médiane de séjour à l'hôpital est de 5,5 jours pour Omicron, 7,6 jours pour Delta et 8 jours pour Alpha/D614G. Enfin, le pourcentage de décès parmi les patients hospitalisés est de 7 % pour Omicron, 12 % pour Delta et 13 % pour Alpha/D614G. Ces différences entre Omicron et les autres variants restent significatives quel que soit l'âge des patients (adultes).

Ces données orientent donc vers un variant deux fois moins générateur de formes graves dans l'ensemble des patients affectés (et non pour chaque patient pris individuellement dont certains souffrent toujours de formes sévères !)
Pour de nombreux commentateurs, cette réduction de la sévérité des infections s'explique par le fait que, dans les pays les plus touchés par Omicron à ce jour, le pourcentage de patients à risque vaccinés est important. Néanmoins, une étude menée en Afrique du Sud a montré que, chez les personnes ni vaccinées, ni précédemment infectées par SARS-CoV-2, le risque d'hospitalisation pour infection par Omicron semble réduit de 25 % par rapport à une infection par Delta. Ainsi, il semble que l'immunité préexistante n'explique qu'en partie la réduction du nombre de formes sévères constatée.

… mais néanmoins lourd en raison de sa forte contagiosité
Comme rapidement évoqué après son apparition et confirmé depuis, Omicron semble être entre trois et quatre fois plus contagieux que Delta, donnée largement illustrée par la rapidité avec laquelle ce nouveau variant s'est imposé face à Delta et l'envolée de l'incidence de la COVID-19 dans la plupart des pays depuis son apparition.
Ainsi, en nombre absolu d'hospitalisations et de décès, la pathogénicité plus faible d'Omicron est largement annulée par sa plus forte transmissibilité, se traduisant par une tension hospitalière importante et un nombre de décès du même ordre de grandeur que celui de l'hiver 2020-2021 (autour de 300 décès par jour en France lors de la publication de cet article).

Comment s'explique cette forte contagiosité d'Omicron ? L'hypothèse d'une charge virale plus importante chez les personnes infectées ne semble pas être confirmée : selon une étude américaine, lors d'une infection par Omicron, la charge virale dans le rhinopharynx est significativement moins élevée qu'avec Delta (valeur de cycle seuil Ct = 23,3 [IC95% : 22,4-24,3] pour Omicron ; Ct = 20,5 (19,2-21,8) pour Delta) et la durée de production des particules virales plus courte [5,35 jours (4,78-6) pour Omicron ; 6,23 jours (5,43-7,17) pour Delta].

L'origine de la grande contagiosité d'Omicron pourrait se trouver dans son affinité pour le récepteur ACE2 des cellules cibles. En effet, selon une étude poussée sur les interactions entre les différentes mutations présentes sur la protéine Spike d'Omicron, la présence simultanée des mutations Q498R et N501Y multiplie par quatre l'affinité de Spike pour ACE2 (voire vingt dans une autre étude in vitro). Si ces mutations sont introduites dans un variant Alpha, l'affinité de ce dernier pour ACE2 devient similaire à celle d'Omicron.

Néanmoins, l'hypothèse d'une plus grande affinité pour ACE2 n'est pas acceptée par tous (voir, par exemple, les préprints de Han P et al. et Wu L et al.)  et certains virologistes penchent davantage pour l'hypothèse selon laquelle l'immunorésistance d'Omicron serait suffisante pour expliquer l'explosion du nombre de cas.

Treize mutations exceptionnelles qui expliquent certaines propriétés d'Omicron…
L'étude sur les interactions entre les mutations d'Omicron mentionnée précédemment, par Martin DP et al., mérite que l'on s'y penche plus avant. Cette équipe a concentré son attention sur 13 des 30 mutations présentes sur le gène de la protéine Spike d'Omicron, mutations jusque-là exceptionnellement rencontrées chez d'autres sarbecovirus, même chez ceux, nombreux, présents chez les chauves-souris. Certaines de ces treize mutations n'avaient jamais été observées auparavant parmi les millions de génomes de SARS-CoV-2 séquencés au cours de la pandémie.
Ces 13 mutations ne sont pas éparpillées au hasard sur Spike. Elles forment trois groupes (clusters), chacun modifiant une petite partie de la protéine et jouant un rôle important dans ce qui rend Omicron unique.
  • Les clusters 1 et 2 modifient l'extrémité de la sous-unité S1 de Spike et augmenteraient son affinité avec le récepteur ACE2, améliorant ainsi la contagiosité d'Omicron. De plus, ces modifications rendent moins efficaces les anticorps neutralisants de classes 1, 2 et 4 issus d'une infection ou d'une vaccination, ce qui contribue à la relative immunorésistance d'Omicron.
  • Le cluster 3 modifie Spike à proximité de sa base au niveau de son « domaine de fusion », c'est-à-dire la partie de la sous-unité S2 qui permet au virus de délivrer ses gènes à l'intérieur de la cellule cible. Cette partie de Spike est habituellement conservée (non mutée) chez les coronavirus de la famille de SARS-CoV-2, en tous cas ceux qui utilisent ACE2 pour pénétrer les cellules cibles. Les mutations du cluster 3 changent considérablement la façon dont Omicron infecte les cellules cibles (voir ci-dessous).
Prises séparément, ces mutations, lorsqu'elles avaient été observées, représentaient une gêne à la vitalité de SARS-CoV-2 et étaient rapidement éliminées par la pression sélective. Mais, ensemble, par un phénomène de synergie opérant à la fois dans et entre les clusters (baptisé « épistasie positive »), elles ont créé une série d'avantages pour Omicron, dont sa plus grande contagiosité et sa relative immunorésistance.

… et signent une origine inhabituelle pour ce nouveau variant
Les auteurs de cette étude essayent également de mieux comprendre les conditions d'apparition d'Omicron. En effet, il existe aujourd'hui trois hypothèses pour cette apparition soudaine d'un variant dont le plus proche ancêtre avait été observé plus d'une année auparavant (voir notre article du 2 décembre 2021) :
  1. une surveillance génomique des variants insuffisante dans une région isolée où Omicron aurait pu se construire progressivement de manière furtive ;
     
  2. une évolution lente au sein d'un patient immunodéprimé et chroniquement infecté, comme cela a été parfois rapporté, y compris récemment ;
     
  3. une évolution chez un hôte intermédiaire animal infecté par l'homme (une « zoonose inversée » vers une « espèce réservoir »), chez qui les mutations se seraient accumulées et qui aurait ensuite contaminé des humains avec ce variant inédit.
Pour Martin DP et al., l'apparition simultanée, dès les premiers séquençages d'Omicron, de trois sous-variants (BA.1, BA.2 et BA.3) semble favoriser l'hypothèse d'une surveillance génomique locale insuffisante, au moins dans les mois ayant précédé l'identification d'Omicron.
Néanmoins, ils reconnaissent que les modifications des clusters 1 et 2, en augmentant significativement l'affinité d'Omicron pour les récepteurs ACE2 de diverses espèces animales (souris, rat, poule, dinde ou chauve-souris rhinolophe) verse de l'eau au moulin de l'hypothèse de la zoonose inversée.

Pour départager les hypothèses, il faudrait, par exemple, que l'on identifie les trois sous-variants chez un animal ou un patient, rendant ainsi possible les deux dernières hypothèses. Un panachage des hypothèses est également possible (par exemple, apparition de l'ancêtre des sous-variants chez un patient ou un animal, puis apparition de BA.1, BA.2 et BA.3 chez divers patients infectés par cet ancêtre).
Le Groupe consultatif scientifique sur les origines des nouveaux agents pathogènes (SAGO), récemment créé par l'Organisation mondiale de la santé, devrait publier un rapport début février 2022 sur les origines d'Omicron.

Un mode d'effraction cellulaire modifié par rapport aux variants précédents…
L'analyse structurelle de la protéine Spike d'Omicron, ainsi que divers travaux de culture de ce variant in vitro, montrent qu'Omicron est fondamentalement différent des autres variants connus par son mode d'infection des cellules cibles. Les modifications de la sous-unité S2 par le cluster 3 expliquent ce changement radical, aux fortes conséquences cliniques.
Pour rappel, il existe deux modes de pénétration intracellulaire pour les SARS-CoV :
  • le clivage de S1 et S2 par la protéase transmembranaire à sérine 2 (TMPRSS2, sur la membrane de la cellule cible), suivi de la fusion de la membrane virale avec la membrane cellulaire, libérant ainsi l'ARN viral dans le cytoplasme. Ce mode d'infection est celui que privilégient tous les variants dominants de SARS-CoV-2 précédemment décrits.
  • la capture du virus dans une « bulle » de membrane cellulaire (un « endosome ») qui pénètre ensuite la cellule. Cet endosome y est dégradé par des protéases, les cathepsines (et, dans le cas des coronavirus, en particulier les cathepsines L). Ce mode d'infection est possible, mais accessoire pour les variants de SARS-CoV-2 étudiés avant l'apparition d'Omicron.
Plusieurs études de culture d'Omicron in vitro (par exemple, Peacock TP et al. ou Willett BJ et al.), utilisant des inhibiteurs sélectifs de chacun de ces deux modes d'infection, ont montré que la voie de pénétration préférée par Omicron est celle mettant en jeu la formation d'endosomes et leur digestion par les cathepsines L.

… et qui a des conséquences sur le plan clinique et thérapeutique
En quoi cette information sur le mode d'infection d'Omicron est-elle importante sur le plan clinique ? Tout d'abord, ce mode d'infection permet à Omicron de s'affranchir de la présence de TMPRSS2 sur la cellule cible : la seule présence du récepteur ACE2 lui suffit. À l'inverse des autres variants, il ne présente pas de tropisme sélectif pour les cellules portant TMPRSS2. Or, cette protéase membranaire est particulièrement présente sur les cellules des alvéoles pulmonaires, des papilles gustatives, du cœur, du tube digestif, du cerveau, etc., autant d'organes fortement ciblés par les variants précédents de SARS-CoV-2.
De fait, deux études in vitro et deux études ex vivo (Willett BJ et al. et Meng B et al. ; Chan MCW et al. et Huy KPJ et al.) ont apporté des éléments suggérant une moindre infectivité d'Omicron pour les cellules pulmonaires. Ainsi, l'indifférence d'Omicron pour TMPRSS2 pourrait contribuer à expliquer sa moindre pathogénicité, en particulier concernant les organes riches en cette protéase.

Mais cela n'explique pas tout. Au niveau des muqueuses du rhinopharynx, les cellules portant seulement les récepteurs ACE2 sont sept fois plus nombreuses que celles portant ACE2 et TMPRSS2 : il reste donc un vaste champ d'action pour Omicron qui, in vitro, se multiplie cent fois plus rapidement que Delta dans un mélange de cellules nasales. Dans ces conditions, comment expliquer la réduction de la charge virale dans le nasopharynx observée in vivo avec Omicron (voir plus haut) ?  
En fait, la préférence d'Omicron pour la voie endosomale entraîne une conséquence défavorable à sa multiplication, conséquence qui pourrait contrebalancer son affinité pour les cellules portant ACE2. Parmi les facteurs de l'immunité innée (non spécifique, à l'inverse de l'immunité acquise) se trouvent des protéines cellulaires, les protéines transmembranaires induites par les interférons (IFITM), qui ont la capacité d'empêcher les endosomes de relâcher leur contenu viral. Chez des variants comme Alpha ou Delta, la pénétration par le biais de TMPRSS2 court-circuite ce mécanisme de défense. Omicron, compte tenu de son mode d'infection endosomal, est, lui, sensible à ces protéines immunitaires ce qui pourrait expliquer sa moindre virulence et la plus faible charge virale dans le rhinopharynx.

Autre possible base biologique à la plus faible pathogénicité d'Omicron, le mode de pénétration endosomal, à l'inverse de celui utilisant TMPRSS2, ne provoque que faiblement la formation de syncitia, ces fusions de cellules infectées et de virus qui favorisent la contamination des cellules voisines. Dans le contexte des infections respiratoires virales, et en particulier de la COVID-19, la formation de syncitia semble particulièrement marquée lors de formes pulmonaires sévères. Deux études in vitro ont montré qu'Omicron était dix fois moins « fusiogène » que Delta (voir aussi Suzuki R et al.) Ainsi, il est possible que le passage du mode TMPRSS2 au mode endosomal s'accompagne d'une réduction des lésions tissulaires, d'autant plus qu'Omicron ne semble que peu infecter les cellules alvéolaires.

Enfin, pour l'anecdote et dans une optique thérapeutique assez théorique, l'inhibition d'Omicron par des substances actives pourrait davantage se faire via l'inhibition des cathepsines L (par exemple par le paclitaxel, l'amiloride, la nystatine, l'amantadine, la chlorpromazine ou… la chloroquine !) que via l'inhibition de TMPRSS2 (par exemple avec le camostat, le nafamostat, le captopril, l'enzalutamide ou le bicalutamide). Néanmoins, cette remarque est à pondérer par le fait que les tentatives de traitement précoce des autres variants par des inhibiteurs de TMPRSS2 se sont soldées par des échecs, malgré des données in vitro intéressantes. Il pourrait en être de même pour les inhibiteurs des cathepsines L, en particulier en comparaison avec l'efficacité des antiprotéases spécifiques comme PAXLOVID.

Omicron BA.2, légèrement plus transmissible, mais pas plus immunorésistant
Enfin, impossible de faire un panorama des nouvelles données sur Omicron (sous-variant BA.1 dans toutes les études citées) sans évoquer la présence de plus en plus importante du sous-variant BA.2.
Apparu en même temps que BA.1 (possiblement d'un même patient atteint d'une infection chronique selon certains virologistes), BA.2 est en train de devenir progressivement dominant dans plusieurs pays : Inde, Philippines, Singapour, Afrique du Sud, mais aussi Danemark, Suède, voire bientôt Royaume-Uni et Allemagne. Selon plusieurs experts, il est probable qu'il supplante progressivement BA.1 de manière globale.

BA.2 diffère de BA.1 par l'absence de la délétion 69-10 dans une zone de son génome recherchée par les tests PCR les plus couramment utilisés, ce qui peut le faire faussement identifier comme un variant Delta. De plus, il présente des différences notables au niveau du gène ORF1a qui code pour des protéines régulant les interactions entre SARS-CoV-2 et la cellule cible.
En termes de contagiosité, selon les données de transmission au domicile recueillies par l'Agence de sécurité sanitaire du Royaume-Uni (HKUSA), BA.2 serait environ 30 % plus transmissible que BA.1 (taux d'attaque secondaire de 13,4 % contre 10,3 % pour BA.1), ce qui expliquerait sa progressive prépondérance sur BA.1.
En termes d'immunorésistance, les projections en fonction des mutations présentes sur le domaine de liaison avec le récepteur ACE2 de la protéine Spike (faites avec le calculateur d'échappement aux anticorps du Bloom Lab) ne font pas ressortir de différences entre BA.1 et BA.2. De fait, le UKHSA indique que l'effet protecteur de la vaccination semble identique pour les deux sous-variants.

La question des réinfections par Omicron
Le taux de réinfection par Omicron après une première infection par Omicron (« réinfections homologues ») semble tourner autour de 6 %, un taux plus élevé qu'avec Delta qui pourrait s'expliquer par la forme moins sévère des infections par Omicron, donc moins immunogènes. Au Danemark, ces réinfections homologues n'étaient pas particulièrement le fait de BA.2.
À noter, le taux de réinfection hétérologue par Omicron (après une infection par un autre variant) est plus élevé que celui observé avec Delta (multiplié par 5,4 (IC95% : 4,9-6) selon l'Imperial College de Londres), du fait de la relative immunorésistance d'Omicron. Au Royaume-Uni, sur un échantillon de 3 500 personnes infectées par Omicron, 64,5 % signalaient avoir déjà eu un épisode de COVID-19 auparavant.

En conclusion, les dernières données disponibles confirment qu'Omicron est un variant nettement plus contagieux que Delta, en particulier le sous-variant BA.2 qui est en train de devenir prédominant. À l'échelle des populations, Omicron semble être moins pathogène que Delta, mais pas forcément à l'échelle individuelle. Malheureusement, cette diminution de la fréquence des formes sévères ne se traduit pas en termes de soulagement de la tension hospitalière, étant donné sa forte transmissibilité.

Les modifications fonctionnelles induites par les mutations atypiques observées chez Omicron peuvent expliquer cette moindre pathogénicité, mais également son tableau clinique particulier : infection plus centrée sur la sphère ORL avec moins d'atteintes pulmonaires, symptômes moins durables. Le prix à payer pour cette moindre sévérité est une moindre immunogénicité (en tout cas humorale), exposant les personnes infectées à un risque plus élevé de réinfection par ce même variant.

Omicron n'est probablement pas le variant qui permettra d'atteindre une hypothétique (et désormais quasi utopique) immunité de groupe efficace. S'il semble raisonnable de penser qu'il contribuera, à sa mesure, à mieux protéger les personnes immunocompétentes contre de futures formes graves, la stratégie qui consisterait à le laisser courir dans la population à cet effet se heurte à la réelle possibilité d'une saturation des services hospitaliers, une exposition irraisonnable des personnes immunodéprimées non protégées par des anticorps monoclonaux ad hoc et, en l'attente de données contraires, à une augmentation significative des cas de COVID-19 longs.

Edit du 4 février 2022 : Les chiffres donnés par les CDC ont été précisés et actualisés.

©vidal.fr

Pour aller plus loin
 
 
 
 
Ferguson N, Ghani A, Hinsley W et al. Report 50: hospitalisation risk for Omicron cases in England. Imperial College COVID-19 response team, 22 décembre 2021.
 
 
Les données sud-africaines sur la pathogénicité chez les personnes non immunisées
Davies MA, Kassanjee R, Rosseau P et al. Outcomes of laboratory-confirmed SARS-CoV-2 infection in the Omicron-driven fourth wave compared with previous waves in the Western Cape Province, South Africa. medRxiv, 12 janvier 2022.

Les données de charge virale lors d'infection par Omicron
Hay J, Kissler S, Fauver JR et al. Viral dynamics and duration of PCR positivity of the SARS-CoV-2 Omicron variant. Preprint, Harvard School of Public Health, janvier 2022.

L'étude qui a exploré les effets de treize mutations exceptionnelles de la protéine Spike
Martin DP, Lytras S, Lucici AG et al. Selection analysis identifies unusual clustered mutational changes in Omicron lineage BA.1 that likely impact Spike function. bioRxiv, 14 janvier 2022.

Sur les effets de la combinaison des mutations Q498R et N501Y sur l'affinité pour ACE2
Bate N, Savva CG, Moody PCE et al. In vitro evolution predicts emerging CoV-2 mutations with high affinity for ACE2 and cross-species binding. bioRxiv, 23 décembre 2021.

Les préprints qui signalent une affinité pour ACE2 identique à celle de Delta
Han PC, Li LJ, Liu S et al. Receptor binding and complex structures of human ACE2 to Spike RBD from Omicron and Delta SARS-CoV-2. Cell, 6 janvier 2022.

Wu L, Zhou L, Mo M et al. SARS-CoV-2 Omicron RBD shows weaker binding affinity than the currently dominant Delta variant to human ACE2. Letter to the editor, Signal Transduction and Targeted Therapy, 5 janvier 2022.

Sur les trois hypothèses d'origine d'Omicron
Mallapathy S. Where did Omicron come from? Three key theories. Nature, 28 janvier 2022.

Deux cas d'apparition de mutations chez des patients immunodéprimés
Karim F, Moosa MYS, Gosnell BI et al. Persistent SARS-CoV-2 infection and intra-host evolution in association with advanced HIV infection. medRxiv, 3 juin 2021.

Maponga TG, Montenique J, Tegally H et al. Persistent SARS-CoV-2 Infection with Accumulation of Mutations in a Patient with Poorly Controlled HIV Infection. SSRN, 21 janvier 2022.

Sur l'affinité d'Omicron pour les récepteurs ACE2 des animaux
Wei C, Shan KJ, Wang W et al. Evidence for a mouse origin of the SARS-CoV-2 Omicron variant. bioRxiv, 14 décembre 2021.

Sur le changement de mode d'infection d'Omicron
Peacock TP, Brown JC, Zhou J et al. The SARS-CoV-2 variant, Omicron, shows rapid replication in human primary nasal epithelial cultures and efficiently uses the endosomal route of entry. bioRxiv, 31 décembre 2021.

Willett BJ, Grove J, MacLean OA et al. The hyper-transmissible SARS-CoV-2 Omicron variant exhibits significant antigenic change, vaccine escape and a switch in cell entry mechanism. medRxiv, 3 janvier 2022.

Hui KPY, Ho JC, Cheung MC et al. SARS-CoV-2 Omicron variant replication in human bronchus and lung ex vivo. Nature, 27 janvier 2022.

Sur la répartition des récepteurs ACE2 et de la protéine TMPRSS2 dans le corps
Lukassen S, Lorenz Chua R, Trefzer T et al. SARS-CoV-2 receptor ACE2 and TMPRSS2 are primarily expressed in bronchial transient secretory cells. The EMBO Journal, 2020; 39:10.

Dong M, Zhang J, Ma X et al. ACE2, TMPRSS2 distribution and extrapulmonary organ injury in patients with COVID-19. Biomed Pharmacother, 2020; 131: 110678.

Sato T, Ueha R, Goto T et al. Expression of ACE2 and TMPRSS2 Proteins in the Upper and Lower Aerodigestive Tracts of Rats: Implications on COVID 19 Infections. The Laryngoscope
, 2021; 131:3.

Sur la moindre infectivité d'Omicron pour les cellules pulmonaires
Chan MCW, Hui KPY, Ho J et al. SARS-CoV-2 Omicron variant replication in human respiratory tract ex vivo. Research square, 21 décembre 2021.

 
Meng B, Abdullahi A, Ferreira IATM et al. Altered TMPRSS2 usage by SARS-CoV-2 Omicron impacts tropism and fusogenicity. Nature, 26 janvier 2022.
 
Suzuki, R., Yamasoba, D., Kimura, I. et al. Attenuated fusogenicity and pathogenicity of SARS-CoV-2 Omicron variant. Nature, 1er février 2022.

Sur les IFITM
Tartour K & Cimaarell A. Les IFITM, un obstacle commun à de nombreux virus. médecine/sciences, 2015; N
° 4; 31: 377-82.

Sur l'effet du camostat sur SARS-CoV-2 in vitro
Hoffman M, Kleine-Weber H, Schroeder S et al. SARS-CoV-2 Cell Entry Depends on ACE2 and TMPRSS2 and Is Blocked by a Clinically Proven Protease Inhibitor. Cell, 2020; 181: 271-280.

Singh N, Decroly E, Khatib AM et Villoutreixa BO. Structure-based drug repositioning over the human TMPRSS2 protease domain: search for chemical probes able to repress SARS-CoV-2 Spike protein cleavages. European Journal of Pharmaceutical Sciences, 2020; 153.

Les essais cliniques terminés ou en cours utilisant un inhibiteur de TMPRSS2, ClinicalTrials.gov

Sur le sous-variant BA.2
SARS-CoV-2 variants of concern and variants under investigation in England - Technical briefing 35, UK Health Security Agency, 28 janvier 2022.

Le Calculateur d'échappement aux anticorps du Bloom Lab
Greaney AJ, Starr TN & Bloom JD. An antibody-escape calculator for mutations to the SARS-CoV-2 receptor-binding domain. bioRxiv, 7 décembre 2021.

Sur les réinfections par Omicron
Servellita V, Syed AM, Brazer N et al. Neutralizing immunity in vaccine breakthrough infections from the SARS-CoV-2 Omicron and Delta variants. medRxiv, 25 janvier 2021.

Ferguson N, Ghani A, Cori A et al. Report 49: Growth, population distribution and immune escape of Omicron in England. Imperial College COVID-19 response team, 16 décembre 2021.

Elliott P, Eales O, Bodinier B et al. Post-peak dynamics of a national Omicron SARS-CoV-2 epidemic during January 2022. School of Public Health, Imperial College London, 26 janvier 2022.

Notre article précédent évoquant les origines d'Omicron
« Omicron, un variant en marche ? », VIDAL Actus, 2 décembre 2021
Sources

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