Un dosage inutile avant ou après la vaccination contre la COVID-19 (illustration).
Résumé :
Le dosage des D-dimères, marqueur indirect de l'activation de la coagulation, a des indications bien spécifiées par les recommandations françaises et internationales. Il s'agit notamment de la suspicion de maladie thrombo-embolique veineuse (MTEV) avec une probabilité faible ou intermédiaire, où sa normalité permet d'exclure le diagnostic.
Dans le cadre de la COVID-19, il est utilisé comme marqueur pronostique lors du bilan initial, uniquement chez les patients hospitalisés. Ce dosage n'est en revanche pas indiqué en pratique quotidienne avant ou après la vaccination contre la COVID-19, puisque la vaccination n'est pas associée à un surrisque de MTEV.
Le dosage des D-dimères, marqueur indirect de l'activation de la coagulation, a des indications bien spécifiées par les recommandations françaises et internationales. Il s'agit notamment de la suspicion de maladie thrombo-embolique veineuse (MTEV) avec une probabilité faible ou intermédiaire, où sa normalité permet d'exclure le diagnostic.
Dans le cadre de la COVID-19, il est utilisé comme marqueur pronostique lors du bilan initial, uniquement chez les patients hospitalisés. Ce dosage n'est en revanche pas indiqué en pratique quotidienne avant ou après la vaccination contre la COVID-19, puisque la vaccination n'est pas associée à un surrisque de MTEV.
Face aux interrogations de nombreux praticiens et de patients, parfois déconcertés par des informations circulant sur les réseaux sociaux, les experts de la Société française de médecine vasculaire (SFMV), du Groupe français d'études sur l'hémostase thrombose (GFHT) et du réseau F-CRIN INNOVTE (INvestigation Network On Venous Thrombo-Embolism) ont fait le point sur les indications actuelles du dosage des D-dimères.
Petit rappel : qu'est-ce que les D-dimères ?
L'activation de la coagulation, qu'elle soit physiologique, notamment après une brèche vasculaire, ou pathologique, induit des mécanismes de fibrinoformation : génération de thrombine après cascade enzymatique, à l'origine de la transformation du fibrinogène en fibrine, qui assure l'hémostase.
Parallèlement, des mécanismes de dégradation de la fibrine sont mis en jeu. Cette fibrinolyse, qui se fait sous l'action de la plasmine, génère des produits de dégradation, dont les D-dimères, qui lui sont spécifiques, et qui constituent donc un marqueur indirect de l'activation de la coagulation.
Quand sont-ils augmentés ?
Les D-dimères sont ainsi augmentés dans toutes les situations ou de la fibrine est générée en excès. C'est bien sûr le cas de la survenue récente d'un événement thrombo-embolique veineux (MTEV), mais aussi de très nombreuses situations pathologiques accompagnées d'un état inflammatoire (traumatismes, hématomes, période post-opératoire, maladie inflammatoire, infectieuse, etc.), de pathologies néoplasiques, de malformations vasculaires ou lors d'une coagulation intravasculaire localisée ou disséminée.
Les D-dimères augmentent aussi avec l'âge, au cours de la grossesse et en post-partum, témoignant d'une hypercoagulabilité physiologique.
Quelles sont les grandes indications du dosage des D-dimères ?
La grande indication du dosage des D-dimères est la suspicion de MTEV de probabilité clinique faible ou modérée. Ils ont en effet une excellente valeur prédictive négative dans ce contexte et la normalité de leur taux permet d'exclure le diagnostic de MTEV.
Les recommandations françaises et européennes proposent de retenir pour le diagnostic d'exclusion de l'embolie pulmonaire un seuil ajusté à l'âge. Avec la majorité des techniques, ce seuil est de 500 mg/mL pour les sujets de moins de 50 ans, et de 10 ng/mL x âge pour les patients de plus de 50 ans. Certaines techniques, moins couramment utilisées, ont des seuils inférieurs, qui sont indiqués sur le compte rendu du laboratoire d'analyse.
En pratique, en cas de suspicion faible à modérée de MTEV et de taux de D-dimères inférieur au seuil, le recours à un angio-scanner ou à une scintigraphie de ventilation/perfusion est inutile.
Pour la thrombose veineuse profonde, les seuils définis dans les recommandations sont propres à chaque technique utilisée. Mais, dans ce cadre aussi, un taux de D-dimères inférieur au seuil défini permet d'éliminer le diagnostic et le recours à un écho-Doppler est inutile.
Ainsi, en l'absence de traitement anticoagulant, un taux de D-dimères « négatif » élimine la MTEV dans un contexte de probabilité faible ou intermédiaire. À l'inverse, un taux de D-dimères augmenté n'est pas spécifique de la thrombose et ne doit donc pas être utilisé comme paramètre diagnostique.
Et ses indications plus spécialisées ?
Le dosage des D-dimères a d'autres indications plus spécialisées, telles que l'évaluation du risque de récidive de MTEV à la fin du traitement anticoagulant chez la femme (mais pas chez l'homme) et pour le diagnostic biologique de coagulation intravasculaire systémique (CIVD).
Il est également aujourd'hui utilisé comme marqueur pronostique lors du bilan initial réalisé chez les malades hospitalisés pour une COVID-19 (mais pas chez les patients suivis en ambulatoire). Les taux élevés de D-dimères reflètent la microthrombose vasculaire dans le contexte de coagulopathie associée à la COVID-19 et, selon plusieurs études, ils sont associés à la gravité de la maladie et au risque de passage en réanimation et de décès.
Pourquoi ce dosage n'est-il pas indiqué avant ou après une vaccination anti-COVID-19 ?
La vaccination contre la COVID-19 n'est pas associée à un sur risque de MTEV et aucune surveillance biologique ne doit être réalisée avant ou après la vaccination.
Une thrombophilie ou un antécédent de thrombose ne constituent pas une contre-indication à la vaccination.
De rares cas de thrombopénie associée à la vaccination ont été décrits avec les vaccins AstraZeneca et Johnson & Johnson/Janssen. Ce syndrome clinico-biologique, dénommé VITT (Vaccine induced Immune Thrombotic Thrombocytopenia), a été évoqué face à une suspicion de thrombose chez un patient dans un délai de 4 à 30 jours après la vaccination anti-COVID-19, associée à une thrombopénie.
Le diagnostic se fonde sur la présence d'anticorps anti-PF4, confirmée par un laboratoire d'un centre expert. Il n'y a donc pas d'indication spécifique à doser les D-dimères dans ce contexte. À noter que les patients atteints de VITT ne présentaient aucun facteur de risque médical identifiable, et notamment pas de thrombophilie, ni d'antécédents de thrombose ou de maladies auto-immunes.
D'après un entretien avec le Pr Marie-Antoinette Sevestre-Pietri, Présidente de la Société française de médecine vasculaire (SFMV), au nom de la SFMV, du Groupe français d'études sur l'hémostase thrombose GFHT, et du réseau F-CRIN INNOVTE (INvestigation Network On Venous Thrombo-Embolism).
©vidal.fr
Pour en savoir plus
- Sanchez O et al. [Recommendations of good practice for the management of thromboembolic venous disease in adults. Short version]. Rev Mal Respir 2019; 36: 249–83.
- Konstantinides SV et al. 2019 ESC Guidelines for the diagnosis and management of acute pulmonary embolism developed in collaboration with the European Respiratory Society (ERS). Eur Heart J 2020; 41: 543–603.
- Godon A et al. Prevention of venous thromoembolism and haemostasis monitoring in patients with COVID-19 : Updated proposals (April 2021): From the French working group on peroperative haemostasis (GIHP) and the French study group on thrombosis and haemostasis (GFHT), in collaboration with the French Society of anaesthesia and intensive care (SFAR). Anaesth Crit Care Pain Med 2021 ; 40 : 100919.
- Tang N et al. Abnormal coagulation parameters are associated with poor prognosis in patients with novel coronavirus pneumonia. J Thromb Hemost 2020 ; 18 : 844-847.
- Chocron R et al. D-dimer at hospital admission for COVID-19 are associated with in-hospital mortality, independent of venous thromboembolism: Insights from a French multicenter cohort study. Arch Cardiovasc Dis 2021 ; 114: 381-93.
- Smadja DM et al. Vaccination against COVID-19: insight from arterial and venous thrombosis occurrence using data from VigiBase. Eur Respir J 2021 ; 58 : 2100956.
- Greinacher A et al. Thrombotic thrombocytopenia after ChAdOx1 nCoV Vaccination. N Engl J Med 2021 ; 384 : 2092-101.
Sources
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