Pour les moins de 55 ans, la 2e dose de vaccin contre la COVID-19 n'aura pas lieu avec VAXZEVRIA, mais avec un vaccin à ARNm (illustration).
Le 19 mars 2021, suite à un signal de pharmacovigilance de type thrombose atypique et trouble de la coagulation portant sur le VACCIN COVID-19 ASTRAZENECA (récemment dénommé VAXZEVRIA), la Haute Autorité de santé (HAS) a recommandé de n'utiliser ce vaccin que chez les personnes de 55 ans et plus (avis du 19 mars 2021).
La question de l'injection d'une deuxième dose chez les personnes de moins de 55 ans ayant initié le schéma de vaccination anti-COVID avec ce vaccin, soit 533 000 français, s'est alors posée.
Le 8 avril 2021, la HAS a rendu un nouvel avis afin de préciser la stratégie vaccinale à suivre chez ces patients de moins de 55 ans.
Une deuxième dose : oui, mais avec un vaccin ARNm
Chez les personnes de moins de 55 ans ayant déjà reçu une première dose de vaccin COVID-19 AstraZeneca VAXZEVRIA, la HAS confirme la nécessité de maintenir un schéma à deux doses, mais elle recommande de réaliser cette seconde dose avec un vaccin à ARNm (COMIRNATY ou MODERNA). Un délai de 12 semaines entre les 2 doses est recommandé.
Pour la HAS, cette stratégie dénommée prime boost hétérologue est un compromis acceptable entre sa recommandation de ne plus utiliser le vaccin VAXZEVRIA chez les moins de 55 ans, tout en maintenant l'injection de 2 doses pour un schéma vaccinal complet.
En pratique, l'injection d'une dose de vaccin à ARNm suite à une première injection par le vaccin VAXZEVRIA chez des personnes de moins de 55 ans doit s'appliquer dès la mi-avril, dans les régions où les premières initiations de vaccination avec le vaccin d'AstraZeneca ont été réalisées entre le 6 février et le 15 mars 2021.
Les options écartées par la HAS
Manque de données sur le risque de thrombose après une seconde dose de VAXZEVRIA
L'option de maintenir une seconde dose avec VAXZEVRIA chez des sujets de moins de 55 ans n'a pas été retenue, pour les raisons suivantes :
- les cas de thrombose concernant des localisations inhabituelles et les thrombocytopénies associées rapportés avec le vaccin VAXZEVRIA ont tous été décrits après l'injection de la première dose du vaccin ;
- peu de données sont disponibles pour évaluer ce risque d'effet indésirable après l'injection de 2 doses.
Protection insuffisante en cas de schéma à une dose
L'autre option explorée par la HAS consistait à réduire le schéma vaccinal avec VAXZEVRIA à une seule dose. Cette option a été écartée en raison de l'incertitude sur la protection conférée par une seule dose, surtout à long terme.
Option retenue : un schéma prime boost hétérologue
Le principe de la technique prime boost hétérologue est d'utiliser des plateformes vaccinales différentes au cours d'un cycle vaccinal (dans le cas suivant, vaccin à adénovirus, puis vaccin à ARNm) avec l'objectif de booster l'immunogénicité.
Plusieurs arguments sont en faveur de ce choix retenu par la HAS pour les personnes de moins de 55 ans :
- les vaccins à adénovirus ou à ARNm actuellement utilisés dans la vaccination anti-SARS-CoV-2 ciblent le même antigène (protéine S) ;
- cette stratégie est déjà mise à profit dans le contexte du développement de nombreux vaccins notamment des vaccins contre le virus de l'immunodéficience humaine (VIH) où elle vise à induire une réponse lymphocytaire T ;
- cette stratégie a également été développée pour les vaccins contre le virus de l'hépatite B (HBV), de l'hépatite C (HCV), le papillomavirus humain (HPV), le virus Influenzae (responsable de la grippe) ou encore le virus T-lymphotrope humain (HTLV) et a conduit plus récemment à l'obtention d'une autorisation de mise sur le marché (AMM) européenne pour deux vaccins contre le virus Ebola utilisant des vecteurs viraux.
Pour la HAS, il existe donc "un rationnel scientifique" à proposer cette technique.
Quelques données à l'appui pour démontrer l'intérêt de la stratégie prime boost hétérologue
Selon la HAS, depuis le début des années 2000, des études essentiellement effectuées chez l'animal ou dans des essais de phase 1 et/ou 2 chez l'homme ont montré que cette stratégie présentait plusieurs avantages :
- contourner la réaction immunitaire dirigée contre le vecteur viral, qu'elle soit préexistante ou induite par un vaccin ;
- augmenter l'intensité des réponses immunitaires ;
- renforcer une réponse lymphocytaire T, notamment T CD4+ induite en prime, par un boost susceptible d'aider à l'établissement d'une réponse humorale ;
- diversifier la réponse contre les souches virales tout en augmentant l'intensité des réponses immunitaires contre une souche particulière.
Prime boost hétérologue faisant intervenir un vaccin à adénovirus et un vaccin à ARNm : des études en cours
Très peu de données sont disponibles sur la stratégie prime boost hétérologue avec les plateformes ARNm utilisées à la suite d'une plateforme à adénovirus, mais quelques études en cours suggèrent des résultats encourageants :
- étude d'immunogénicité menée sur la souris : Spencer AJ, McKay PF, Belij-Rammerstorfer S, Ulaszewska M, Bissett CD, Hu K, et al. Heterologous vaccination regimens with self- amplifying RNA and Adenoviral COVID vaccines induce robust immune responses in mice ; this version posted March 23, 2021 (preprint) ;
- étude d'efficacité menée chez le singe Rhésus macaque, évaluant la supériorité de la co-administration d'un vaccin ADN et d'un vaccin protéique comparativement à l'utilisation de ces vaccins utilisés en prime boost homologue dans la protection contre une infection contre le SARS-CoV-229 : He Q, Mao Q, An C, Zhang J, Gao F, Bian L, et al. Heterologous prime-boost: breaking the protective immune response bottleneck of COVID-19 vaccine candidates. Emerging microbes & infections 2021.
Enfin, la HAS évoque le vaccin Gam-COVID-Vac (SPUTNIK V), utilisé chez l'homme et correspondant à un schéma prime boost hétérologue du fait de sa formulation :
- adénovirus recombinant (rAd26) en prime,
- adénovirus recombinant (rAd5) en boost.
"La stratégie prime boost hétérologue est utilisée ici (dans le vaccin SPUTNIK V) a minima puisque les deux plateformes sont très proches, l'objectif étant essentiellement de contourner la réaction immunitaire dirigée contre le vecteur adénoviral. Les données disponibles semblent montrer un profil satisfaisant de tolérance et une bonne réponse humorale et cellulaire dans les essais de phase 1/2, mais encore trop peu de données sont disponibles quant à son innocuité en phase 3 ou en vie réelle", commente la HAS.
Pourquoi utiliser un vaccin à ARNm, et non un autre vaccin de type adénovirus ?
Le choix de recommander un schéma en prime boost hétérologue faisant intervenir un vaccin à ARNm en deuxième injection (boost) plutôt qu'un autre type de vaccin à adénovirus repose sur les arguments suivants :
- les données de pharmacovigilance ne permettent pas d'exclure un effet de classe portant sur l'ensemble des vaccins à vecteur adénoviral (et pas seulement l'adénovirus de chimpanzé utilisé dans VAXZEVRIA) ;
- il n'existe pas à ce jour de signal de sécurité de type thrombose atypique (sinus veineux cérébraux, veine splanchnique/mésentérique) ou thromboses artérielles associées à une thrombopénie avec les vaccins à ARNm.
Une étude en vie réelle pour évaluer l'efficacité de cette stratégie
La HAS recommande de mettre en place en place très rapidement une étude "en vie réelle", afin d'évaluer en vie réelle la réponse immunitaire conférée par le schéma de vaccination mixte recommandé (vaccin adénovirus/vaccin ARNm).
Pas de VAXZVRIA chez les moins de 55 ans
Dans son avis du 8 avril 2021, la HAS confirme sa recommandation du 19 mars 2021 de ne pas utiliser le vaccin VAXZEVRIA chez les moins de 55 ans, en première comme en seconde dose.
Au niveau international, cette limite d'âge diffère selon les pays :
- 55 ans et plus au Canada, en Espagne et en France,
- 60 ans et plus en Allemagne, en Estonie, en Islande et aux Pays-Bas,
- 65 ans et plus en Finlande et en Suède.
Pour aller plus loin
Communiqué de presse - Covid-19 : quelle stratégie vaccinale pour les moins de 55 ans ayant déjà reçu une dose d'AstraZeneca ? (HAS, 9 avril 2021)
Avis n° 2021.0027/AC/SEESP du 8 avril 2021 du collège de la Haute Autorité de santé concernant le type de vaccin à utiliser pour la seconde dose chez les personnes de moins de 55 ans ayant reçu une première dose du vaccin AstraZeneca (nouvellement appelé VAXZEVRIA) contre la covid-19 (HAS, 8 avril 2021)
Pour aller plus loin
Consultez les monographies VIDAL
Consultez les VIDAL Recos
Sources
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