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L'entreprise américaine Novavax a utilisé une plateforme proche de celle mise en œuvre par Sanofi pour développer le vaccin NVX-CoV2373 : la protéine S (AgS), antigène majeur du SARS-CoV-2, a été exprimée en totalité et sous une forme stabilisée (1). Des trimères se sont formés, comme ils se forment à la surface du virus, et ont été insérés dans des nanoparticules. Un adjuvant (Matrix-M™) est ajouté à la préparation. Testé dans des candidats vaccins contre la grippe, des adjuvants de ce type (Matrix-M™, Iscomatrix™) permettent d'induire des anticorps contre des épitopes (des parties d'antigènes) plus nombreux, qui restent "cachés" en l'absence d'adjuvant, et d'obtenir ainsi une réponse neutralisante plus puissante, élargie à des virus grippaux autres que celui qui était inclus dans le vaccin.
Matrix-M™ se présente sous forme de nanoparticules composées de saponine (extraite de l'arbre Quillaja saponaria ou "bois de Panama", ou "bois à l'écorce de savon"), de cholestérol et de phospholipides. Dans les essais précliniques de vaccination contre le SARS-CoV-2 effectués chez le Macaque, l'adjuvant a permis d'obtenir une immunité stérilisante avec une dose très faible d'antigène S : 5 µg ont suffi pour empêcher totalement la réplication du virus au niveau des voies respiratoires inférieures et supérieures chez des animaux vaccinés depuis 38 jours auxquels le virus a été inoculé expérimentalement. Aucun des autres vaccins développés contre la covid 19 n'a permis d'obtenir un tel résultat.
Des essais cliniques de phase 1/2 effectués avec l'antigène grippal H7N9 et achevés en juillet 2015 ont par ailleurs montré que Matrix-M™ avait un profil de sécurité acceptable chez l'Homme. Novavax a pu lancer les essais cliniques du vaccin NVX-CoV2373 (phases 1, 2 et 3), dont plusieurs sont encore en cours. Les résultats qui viennent d'être rendus publics sont donc encore ceux des analyses intermédiaires. Plusieurs schémas vaccinaux ont été testés, utilisant deux doses de vaccin avec 5 ou 25 µg d'antigène, associé ou non à 50 µg d'adjuvant, à 21 jours d'intervalle. Certains volontaires n'ont reçu qu'une dose de vaccin (25 µg AgS – 50 µg Matrix-M™) suivie d'une dose de placébo, d'autres n'ont reçu que 2 doses de placébo.
En phase 1 et 2, le vaccin s'est révélé immunogène, même avec la dose la plus faible d'antigène : après la 2ème injection, des anticorps ont été détectés à des niveaux équivalents à ceux détectés chez des malades précédemment hospitalisés pour covid 19. Ces anticorps sont restés à un niveau élevé pendant 6 mois. Les effets indésirables locaux (douleur au point d'injection) et généraux (fatigue, céphalées, myalgies) sont restés ceux qui sont habituellement rencontrés avec des vaccins. Ils ont été de courte durée (moins de 48 heures), plus fréquents et marqués chez les volontaires les plus jeunes (18 à 59 ans), et après la 2ème dose de vaccin adjuvanté. La réactogénicité était moins importante chez les participants les plus âgés (60 à 84 ans).
La dose de 5 µg d'antigène étant apparue suffisante, elle a été retenue pour les essais de phase 3. Celui qui est mené au Royaume Uni a inclus près de 15 000 participants, 7 016 dans un groupe "vaccin" (2 doses) et 7 033 dans un groupe "placébo". Il a analysé les cas de covid 19 bénigne, modérée ou grave, avec RT-PCR positive, diagnostiqués à partir du 7ème jour après la 2ème injection. Six cas ont été observés parmi les participants vaccinés, contre 56 parmi ceux qui ont reçu le placébo. L'efficacité globale de protection est ainsi estimée à 89,3%. Sur la période étudiée, le variant 501Y.V1 ("variant anglais", B.1.1.7) est devenu de plus en plus fréquent : il a été responsable de 32 des 62 cas de covid 19. Une analyse a posteriori a montré que l'efficacité de protection avait été de près de 95 % contre le virus original, et d'environ 85 % contre le variant. L'analyse de sécurité retrouve les résultats des phases antérieures : on a observé 1,1% d'évènements "sévères" dans le groupe "vaccin" contre 0,7% dans le groupe "placébo", et 0,4% d'évènements "graves" dans les deux groupes.
Un essai de phase 2b mené en Afrique du Sud, où un autre variant du SARS-CoV-2 (501Y.V2 ou B.1.351) circule activement, a donné des résultats importants. Il a mis en évidence que les personnes ayant fait une première infection avec le virus original, et présentant donc une sérologie positive au moment de leur inclusion dans l'essai (30 % des volontaires), pouvaient être infectées par le variant aussi fréquemment que des personnes jamais infectées. L'immunité acquise contre le premier virus ne suffit donc pas à empêcher une nouvelle infection par un virus antigéniquement trop différent. Ce constat fait craindre que les vaccins développés à partir du virus original soient inefficaces contre des virus mutés comme 501Y.V2. Toutefois, bien que 93 % des infections observées chez les participants à l'essai aient été attribuées au variant (cette proportion reste à confirmer sur un échantillon plus nombreux), l'efficacité du vaccin contre les formes symptomatiques d'infection a été évaluée à 49,4 %, et même à 60,1 % lorsqu'on ne prend en compte que les personnes non infectées par le VIH.
Ce niveau d'efficacité est inférieur à celui obtenu contre le SARS-CoV-2 original ou le variant anglais, mais il est compatible avec les exigences des agences de régulation qui autorisent les vaccins. Il doit cependant être confirmé sur des effectifs plus nombreux, ce sera l'un des objectifs d'un essai de phase 3 en cours aux Etats Unis et au Mexique où le variant sud-africain est présent. L'essai inclura 30 000 volontaires de 18 ans et plus, d'origine ethnique différente, dont 25 % de plus de 65 ans.
Novavax, qui met en avant les résultats très encourageants obtenus avec sa formule et l'adjuvant Matrix-M™, indique d'autre part dans son communiqué qu'il travaille déjà sur des vaccins incluant des protéines S mutées, correspondant aux différents variants.
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