La prescription des médicaments à base de valproate a fortement baissé chez les femmes enceintes mais persiste encore (illustration).
L'ANSM (Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé) a publié les résultats de l'étude EPI-PHARE sur le suivi de l'exposition au valproate (cf. Tableau I) dans la population des femmes en âge de procréer ou enceintes.
Tableau I - Périmètre d'utilisation du valproate et de ses dérivés en France
Indications | Médicaments |
En neurologie : traitement de l'épilepsie (cf. VIDAL Recos "Epilepsie de l'adulte" et "Epilepsie de l'enfant") | DEPAKINE, DEPAKINE CHRONO et génériques, MICROPAKINE |
En psychiatrie (valproate semisodique/valpromide) : traitement des épisodes maniaques ou des troubles bipolaires (cf. VIDAL Reco "Trouble bipolaire"). | DEPAKOTE, DEPAMIDE |
Les données analysées sont issues du SNDS (système national des données de santé) et couvrent la période allant du premier trimestre 2013 au second trimestre 2019.
La population des femmes en âge de procréer correspond à la tranche d'âge de 15 à 49 ans.
Une exposition en décroissance de 55 %
D'une manière générale, sur la période étudiée de 5 années, l'exposition des femmes en âge de procréer a continuellement baissé, toutes indications confondues.
De 72 925 femmes en âge de procréer traitées par valproate ou dérivés en 2013, ce nombre est passé à 32 736 en 2019, soit une baisse de 55 %.
Répartition épilepsie/troubles bipolaires
L'analyse des données par indication montre que la diminution de l'exposition est plus importante pour les femmes souffrant de troubles bipolaires (- 60 %) que dans le groupe des femmes traitées pour une épilepsie (- 49 %).
Au total, en 2019, le nombre de femmes en âge de procréer et traitées par valproate ou dérivé est approximativement identique dans les deux indications :
- 16 659 femmes épileptiques
- 16 214 femmes ayant des troubles bipolaires
Moins d'initiations de traitements et moins de renouvellements
Les données de l'étude EPI-PHARE suggèrent par ailleurs un changement des pratiques thérapeutiques.
Les renouvellements de traitements par valproate ont accusé une baisse de 53 % entre 2013 et 2019.
Cette baisse est encore plus marquée pour les initiations de traitement, de l'ordre de 69 %. Ainsi, en 2019, 1 001 traitements par valproate ont été initiés chez des femmes en âge de procréer contre plus de 2 000 en 2013. Dans le cadre de l'épilepsie, 1 537 initiations ont été répertoriées, contre 6 000 en 2013.
Cette évolution de la stratégie thérapeutique est possible du fait de l'existence d'alternatives sur le marché, pour traiter tant l'épilepsie que les troubles bipolaires.
Profil des patientes : vigilance maximale chez les 20-29 ans
Autre enseignement de cette étude EPI-PHARE, en 2019, les initiations de traitement par valproate et dérivés sont particulièrement basses chez les femmes âgées de 15 à 29 ans, quelle que soit l'indication. Au-delà de 30 ans, elles progressent régulièrement pour atteindre 700 initiations dans le groupe des 45-49 ans.
Au fur et à mesure de l'avancée en âge, on note une inversion de la répartition entre l'indication psychiatrique et l'indication neurologique. Chez les adolescentes de 15 à 19 ans, l'utilisation du valproate dans le cadre de l'épilepsie est majoritaire. Dans les autres groupes d'âge (après 20 ans), les initiations de traitement par valproate en psychiatrie (trouble bipolaire) augmentent régulièrement et sont supérieures aux initiations en neurologie. Dans le groupe des 45-49 ans (deuxième trimestre 2019), 502 initiations de traitement concernent les troubles bipolaires, contre 204 pour l'épilepsie.
Une baisse significative des grossesses sous valproate
En raison des risques malformatifs et neuro-développementaux chez le nouveau-né exposé in utero au valproate et dérivés (cf. Encadré 1), ces substances sont :
- contre-indiquées chez les femmes enceintes souffrant de troubles bipolaires,
- utilisées en dernière intention dans le cadre de l'épilepsie, en l'absence d'alternative thérapeutique satisfaisante.
Encadré 1 - Estimation de la toxicité du valproate chez l'enfant exposé in utero
|
Suite à l'application de ces contre-indications, le nombre de femmes enceintes traitées par valproate s'est effondré entre 2013 et 2019, passant de 1 044 à 224 (baisse de 79 %) :
- baisse de 82 % pour l'indication troubles bipolaires,
- baisse de 76 % pour l'indication épilepsie
Une persistance néanmoins
Parmi les 224 grossesses menées sous valproate en 2019, 124 naissances ont été rapportées.
Les autres grossesses n'ont pas été menées à termes, dévoilant une autre tendance : le taux d'IVG/IMG (interruption volontaire/médicamenteuse de grossesse) parmi les femmes enceintes traitées par valproate a constamment progressé entre 2013 et 2018, passant de 31 % à 42 %.
Cette tendance est particulièrement marquée dans l'indication troubles bipolaires, où on dénombre plus d'IVG/IMG en 2018 que d'accouchements.
On notera que conformément à l'AMM en vigueur, il ne devrait plus être observé de grossesse chez des femmes souffrant de troubles bipolaires, puisque la grossesse est une contre-indication au valproate. En 2019 pourtant, 32 femmes répondant à ce profil ont donné naissance à un enfant.
Des analyses complémentaires sont en cours afin de caractériser de façon plus détaillée le contexte de prescription chez ces femmes enceintes et d'étudier l'intérêt de mettre en place des mesures ciblées auprès des prescripteurs.
Une série d'autres mesures à venir pour renforcer celles déjà en place
Suite à la publication de ce rapport, l'ANSM souligne que les mesures en place pour encadrer l'utilisation du valproate chez les femmes en âge de procréer et réduire l'exposition in utero sont maintenues (contre-indications, restriction de la prescription initiale aux neurologues/psychiatres/pédiatres, sécurisation de la délivrance conformément au programme de prévention des grossesses, pictogrammes d'avertissement).
D'autres mesures sont prévues pour renforcer l'information des patients vis-à-vis de ces risques fœtaux :
- intégration de la carte patiente à l'intérieur ou sur l'extérieur de la boîte (actuellement, cette carte est remise par le prescripteur),
- apposition d'un QR code sur les boîtes de médicaments et les notices renvoyant vers une page d'information dédiée sur le site de l'ANSM.
Pour aller plus loin
Valproate et dérivés : l'exposition des femmes enceintes a fortement diminué mais persiste - Point d'information (ANSM, 4 février 2020)
Suivi de l'exposition au valproate parmi les femmes en âge de procréer et pendant la grossesse (ANSM, 4 février 2020)
Sur VIDAL.fr
Antiépileptiques et grossesse : 5 molécules associées à un risque élevé de malformation congénitale s'ajoutent au valproate (26 avril 2019)
Valproate : interdiction chez toutes les patientes enceintes ou en âge de procréer, sauf exception (13 juin 2018, actualisé le 20 juillet 2018)
Valproate et dérivés : des conditions de prescription et de délivrance insuffisamment respectées en 2017 (25 octobre 2017)
DEPAKOTE et DEPAMIDE : contre-indiqués chez les femmes enceintes ou en âge de procréer sans contraception efficace (6 juillet 2017)
- DEPAKINE 200 mg cp gastrorésis
- DEPAKINE 200 mg/ml sol buv
- DEPAKINE 400 mg/4 ml prép inj IV
- DEPAKINE 500 mg cp gastrorésis
- DEPAKINE 57,64 mg/ml sirop
- DEPAKINE CHRONO 500 mg cp pellic séc LP
- DEPAKOTE 250 mg cp gastrorésis
- DEPAKOTE 500 mg cp gastrorésis
- DEPAMIDE 300 mg cp pellic gastrorésis
- MICROPAKINE LP 100 mg glé LP
- MICROPAKINE LP 1000 mg glé LP
- MICROPAKINE LP 250 mg glé LP en sachet-dose
- MICROPAKINE LP 500 mg glé LP
- MICROPAKINE LP 750 mg glé LP
- VALPROATE DE SODIUM AGUETTANT 400 mg/4 ml sol inj
- VALPROATE DE SODIUM ARROW 200 mg/ml sol buv
- VALPROATE DE SODIUM ARROW LP 500 mg cp pellic séc LP
- VALPROATE DE SODIUM BIOGARAN LP 500 mg cp pellic séc LP
- VALPROATE DE SODIUM EG LP 500 mg cp pellic séc LP
- VALPROATE DE SODIUM SANDOZ LP 500 mg cp pellicul séc LP
- VALPROATE DE SODIUM TEVA SANTE LP 500 mg cp pellic séc LP
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