De nouvelles recommandations de traitement contre l'infection sexuellement transmissible à Mycoplasma genitalium (illustration).
Mycoplasma genitalium, une bactérie parasite de l'épithélium génital
Mycoplasma genitalium, la plus petite bactérie capable de se reproduire, vit en parasite des cellules épithéliales du tractus génital, chez la femme comme chez l'homme.
Elle est également retrouvée dans les cellules épithéliales du rectum et des poumons.
Ce mycoplasme se transmet par des contacts génitaux/génitaux ou génitaux/rectaux.
La majorité des patients infectés par Mycoplasma genitalium ne développe pas de symptômes.
De croissance lente, ce micro-organisme est parfois à l'origine d'infections aiguës, mais également d'infections latentes qui peuvent persister avec des symptômes épisodiques. Il est fréquemment retrouvé lors d'infections à Chlamydia ou par le VIH/sida.
Une IST méconnue mais relativement fréquente
Bien que méconnue de nombreux praticiens, l'infection génitale à Mycoplasma genitalium toucherait entre 1 et 2 % des adultes, avec une prévalence un peu plus élevée chez les femmes, et jusqu'à 40 % des personnes consultant pour des IST à répétition.
Les jeunes adultes sont plus fréquemment touchés, ainsi que les hommes d'âge mûr.
Seul l'usage systématique du préservatif lors de pénétration protège contre cette infection à mycoplasme.
Chez l'homme, des symptômes d'urétrite, voire d'épididymite
Chez l'homme, l'infection à Mycoplasma genitalium se traduit par une urétrite avec écoulements et des sensations de brûlure au niveau du pénis, en urinant ou au repos.
Cette infection peut se compliquer de douleurs et d'œdème au niveau des testicules (épididymite), voire d'une arthrite réactionnelle.
Chez la femme, des écoulements et un syndrome pelvien douloureux
Chez la femme, l'infection à Mycoplasma genitalium provoque un syndrome inflammatoire pelvien douloureux lié à l'infection du tractus génital.
Des écoulements vaginaux sont observés, parfois des saignements après les rapports sexuels ou entre les règles.
Non traitée, cette infection peut être à l'origine d'infertilité, de fausses couches, de naissances prématurées, voire de décès du fœtus. Comme chez l'homme, une arthrite réactionnelle peut survenir.
Un diagnostic difficile pour un micro-organisme lent à se multiplier
La difficulté du diagnostic de l'infection à Mycoplasma genitalium est liée à sa croissance lente (plusieurs semaines, voire plusieurs mois pour être visible) et à ses exigences particulières pour se multiplier in vitro.
Les techniques d'amplification génique (ou PCR, pour "polymerase chain reaction") ont facilité son diagnostic, mais elles restent coûteuses et ne sont pas remboursées.
La mise en évidence de Mycoplasma genitalium se fait soit à partir des urines du matin (chez l'homme, grade 1C), soit à partir d'un écouvillon (vulve, vagin et col de l'utérus) chez la femme (grade 1C).
De nouvelles recommandations motivées par une antibiorésistance croissante
La British Association of Sexual Health and HIV (BASHH) vient donc de publier de nouvelles recommandations de prise en charge de l'infection par Mycoplasma genitalium.
En effet, le taux d'antibiorésistance des souches identifiées au Royaume-Uni est particulièrement élevé depuis quelques années, atteignant 40 % pour l'azithromycine, voire davantage pour la doxycycline.
Une recherche systématique en cas d'urétrite non gonococcique ou de syndrome pelvien sans cause identifiée
Les experts de la BASHH recommandent une recherche systématique de Mycoplasma genitalium :
- chez les hommes présentant une urétrite non gonococcique (grade 1B)
- chez les femmes présentant un syndrome inflammatoire pelvien sans cause identifiée (grade 1B).
Ils recommandent également que cette recherche s'accompagne systématiquement d'un antibiogramme visant à rechercher une éventuelle résistance aux macrolides (grade 1B).
Quels patients traiter ?
En termes de traitement, les recommandations de la BASHH sont de ne traiter que les patients symptomatiques afin de réduire le risque d'acquisition d'une antibiorésistance.
Dans ce cas, un traitement antibiotique doit être instauré chez le patient et ses partenaires sexuels (même en l'absence de symptômes chez ces derniers, grade 1D), avec une abstinence sexuelle jusqu'à la fin du traitement.
Un test de contrôle doit être effectué après 5 semaines pour s'assurer de l'efficacité du traitement.
Quels antibiotiques privilégier en cas d'infection à Mycoplasma genitalium ?
Selon les recommandations de la BASHH, en cas d'infection sans complication, deux protocoles antibiotiques peuvent être proposés en première intention et sans attendre le profil de résistance :
- de l'azithromycine pendant 5 jours (500 mg puis 4 x 250 mg) ;
- de la doxycycline pendant 7 jours (100 mg deux fois par jour) suivie par 3 jours d'azithromycine (1 g puis 2 x 500 mg) (grade 1D).
Dans le second protocole, le traitement par azithromycine peut être repoussé de quelques jours en attendant les résultats de l'antibiogramme.
Si le mycoplasme est résistant aux macrolides, ou en cas d'échec de l'azithromycine (sans antibiogramme étayant une résistance), le traitement recommandé est la moxifloxacine pendant 10 jours (400 mg/jour, grade 1D).
En cas de complications ou d'infection rectale, le protocole à base de moxifloxacine doit être prolongé pour un total de 14 jours (grade 1B).
Que faire en cas d'échec ?
En cas d'échec du traitement, les experts insistent sur le fait de ne pas répéter un traitement par azithromycine. De ce fait, le traitement en monodose souvent prescrit (voir par exemple sur Antibioclic) ne devrait plus être prescrit, au profit du traitement sur 5 jours en cas d'échec.
La moxifloxacine reste efficace en Europe mais présente de nombreuses résistances dans le zone Pacifique du fait d'un usage plus courant.
Des protocoles alternatifs sont également proposés à base de pristinamycine et de minocycline.
En conclusion : une mise à jour des protocoles, mais des questions sans réponse
De nombreuses questions persistent sur l'infection génitale à Mycoplasma genitalium. En particulier, celle de la possibilité de porteurs sains.
La majorité des patients infectés par ce mycoplasme ne développant pas de symptômes, se pose la question de la persistance du micro-organisme de manière chronique chez ces patients, à une concentration insuffisante pour déclencher des symptômes mais suffisante pour contaminer un partenaire sain. Néanmoins, les experts de la BASHH ne recommandent pas le dépistage systématique de ce mycoplasme.
Autre question non explorée par la BASHH : les récurrences symptomatiques sont possibles, mais les facteurs déclenchants ne sont pas identifiés et surtout un traitement spécifique (de fond ? ou antibiotique à prendre immédiatement ?), à l'instar de ce qui est décrit pour l'herpès par exemple, n'est pas spécifié.
Dernière question nous venant à la lecture de ces recommandations : pour la PrEP (prophylaxie pré-exposition), dont il est beaucoup question actuellement en raison de son efficacité préventive contre la transmission du virus du VIH/sida, le mycoplasme genitalium est-il recherché en routine lors du bilan précédant la PrEP ? Et lors du suivi instauré sous PReP (pour mémoire, la PrEP protège de l'infection par le VIH mais pas des autres IST, dont le nombre est d'ailleurs en forte augmentation) ?
Si vous avez des réponses à ces questions, par connaissance et/ou expérience, n'hésitez pas à réagir dans les commentaires.
Pour aller plus loin
Les recommandations de la BASHH sur l'infection par Mycoplasma genitalium
Soni S, Horner P et al. BASHH « UK national guideline for the management of infection with Mycoplasma genitalium. » British Association of Sexual Health and HIV, 2018
Une présentation du CHU de Bordeaux sur Mycoplasma genitalium
Cazenave, Charles « Mycoplasma genitalium – Pathogénicité et antibiothérapie » Hopital Pellegrin, USC-EA 3671 Infections humaines à mycoplasmes et à chlamydiae – INRA, Université de Bordeaux, avril 2017
Les recommandations d'Antibioclic sur le traitement de l'urétrite non compliquée
1er résultats de l'étude ANRS Prevenir : 1 500 volontaires, 0 contamination, ANRS, 24 juillet 2018
Infections sexuellement transmissibles (IST) : préservatif et dépistage, seuls remparts contre leur recrudescence, Santé Publique France, 18 juillet 2018
Commentaires
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Bonjour, quelles sont les préconisations à ce jour en cas de résistance du MG à la Moxifloxacine également? La pristinamycine?