A partir du 29 septembre, plusieurs spécialités ne seront plus prises en charge par l'assurance maladie (illustration)
Radiation de plusieurs spécialités au remboursement et à l'agrément aux collectivités
Deux arrêtés relatifs à la radiation de spécialités au remboursement et à l'agrément aux collectivité ont été publiés au Journal officiel du 15 août :
Concernant les médicaments radiés au remboursement, on y trouve :
- CETORNAN 5 g poudre pour solution buvable et solution entérale en sachet (oxoglurate de L(+)ornithine) ainsi que ses 2 génériques OXOGLURATE D'ORNITHINE CHIESI et MYLAN 5 g,
- KEAL 1 g Gé comprimé sécable et suspension buvable, et KEAL 2 g suspension buvable (sucralfate),
- TARDYFERON B9 comprimé enrobé (sulfate ferreux, acide folique).
S'agissant des médicaments radiés de l'agrément aux collectivités, y figurent :
- CETORNAN 10 g poudre pour solution buvable et solution entérale en sachet (oxoglurate de L(+)ornithine) ainsi que ses génériques OXOGLURATE D'ORNITHINE CHIESI 5 g et MYLAN 10 g,
- ULCAR 1 g suspenion buvable et son générique KEAL Gé 1 g suspension buvable, KEAL Gé 1 g comprimé sécable et KEAL 2 g suspension buvable (sucralfate),
- TARDYFERON B9 comprimé enrobé (sulfate ferreux, acide folique).
Ces spécialités bénéficient d'un délai de 45 jours avant l'entrée en application du déremboursement.
Concrètement, elles ne seront plus prises en charge par l'Assurance maladie à compter du 29 septembre 2017.
Trois autres spécialités, MACUGEN, STEDIRIL et ULCAR 1 g granulés pour suspension buvable, sont également mentionnées dans les listes publiées au JO du 15 août. Cependant, le déremboursement de ces dernières n'a pas de conséquences puisqu'elles ne sont plus commercialisées en France.
Une efficacité mal démontrée et des alternatives thérapeutiques plus pertinentes
La décision de dérembourser les spécialités CETORNAN, KEAL et TARDYFERON B9 s'appuie sur les avis de la Commission de la transparence émis lors de leurs réévaluations en 2015. Pour chacune de ces spécialités, un SMR (service médical rendu) insuffisant a été attribué, compromettant le maintien de la prise en charge par l'Assurance maladie.
CETORNAN : pas d'études satisfaisantes
CETORNAN 5 g est composé d'un sel d'acide aminé, l'oxoglurate de L(+)ornithine. Il dispose d'une AMM (autorisation de mise sur le marché) comme adjuvant de la nutrition chez le sujet âgé dénutri (Cf. VIDAL Reco "Dénutrition de la personne âgée").
NB : la dénutrition est définie par la perte de poids d'au moins 3 kg au cours des 6 derniers mois, associée soit à un indice de masse corporelle (poids corporel/taille2) inférieur à 22, soit à une albuminémie inférieure à 36 g/L.
Le SMR de CETORNAN 5 g est passé de modéré en 2010 à insuffisant en 2015. Cette régression a été motivée par :
- l'absence de donnée clinique démontrant l'efficacité de CETORNAN 5 g : l'efficacité a été évaluée au sein d'une étude randomisée sur 194 sujets âgés. Cependant, la méthodologie de cette étude, qu'il s'agisse des critères d'inclusion ou des critères de jugement principaux, est insuffisante et les résultats sont donc à prendre avec précaution ;
- l'existence d'alternatives non médicamenteuses basées sur une alimentation enrichie et l'utilisation de CNO (complément nutritionnel oral),
- l'absence de recommandation préconisant l'emploi de l'ornithine chez le sujet âgé dénutri : CETORNAN n'a pas de place dans la stratégie thérapeutique chez le sujet âgé dénutri.
De façon cohérente et pour des raisons identiques, le dosage à 10 g (CETORNAN 10 g), exclusivement disponible à l'hôpital, est radié de la liste des spécialités agréées aux collectivités.
KEAL (sucralfate) face aux alternatives tels les IPP
Le sucralfate est un pansement gastrique sans action antisécrétoire ni antiacide.
KEAL 1 g en comprimé sécable ou en suspension buvable est indiqué dans le traitement des ulcères gastriques et duodénaux évolutifs (Cf. VIDAL Reco "Ulcère gastroduodénal").
KEAL 2 g en suspension buvable est indiqué uniquement dans le traitement de l'ulcère duodénal évolutif.
Les deux dosages sont également indiqués dans le traitement d'entretien des ulcères duodénaux chez les patients non infectés par Helicobacter pylori ou chez qui l'éradication n'a pas été possible.
A ce jour, KEAL a une place très limitée dans la stratégie thérapeutique du traitement des ulcères gastriques et duodénaux évolutifs. En effet, les alternatives médicamenteuses représentées notamment par les IPP (inhibiteurs de la pompe à protons) présentent un niveau de preuve supérieur dans le traitement de l'ulcère gastroduodénal, tandis que l'efficacité du sucralfate est faible.
Les recommandations préconisent l'association antibiothérapie/traitement antisécrétoire (IPP) comme traitement de référence, en présence d'Helicobacter pylori. En l'absence d'Helicobacter pylori, un traitement antisécrétoire (IPP) est recommandé, au long cours si nécessaire.
Dans le traitement d'entretien des ulcères duodénaux chez les patients non infectés par Helicobacter pylori ou chez qui l'éradication n'a pas été possible, il n'y a pas de donnée clinique nouvelle permettant de réévaluer le SMR de KEAL (insuffisant).
Les spécialités KEAL sont également radiées de l'agrément aux collectivités.
TARDYFERON B9 : une supplémentation systématique non justifiée pendant la grossesse
TARDYFERON B9 est un médicament associant du fer sous forme de sulfate ferreux (50 mg par comprimé) et de l'acide folique (0,35 mg). Il est indiqué seulement chez la femme enceinte, dans le traitement préventif des carences en fer et en acide folique en cas de grossesse lorsqu'un apport alimentaire suffisant ne peut être assuré.
Depuis 2014, l'AMM précise que :
- TARDYFERON B9 ne doit pas être utilisé dans la prévention primaire des risques d'anomalies embryonnaires de fermeture du tube neural (AFTN : spina bifida, etc.)
- TARDYFERON B9 doit être pris pendant les 2 derniers trimestres de la grossesse (ou à partir du 4e mois) et non plus à partir de la 24e semaine.
Ces modifications d'AMM ainsi que les recommandations françaises en vigueur relatives à la grossesse (Cf. VIDAL Reco "Suivi de grossesse") ont été prises en compte par la Commission de la transparence lors de la dernière réévaluation de 2015 : ainsi, la supplémentation systématique des femmes enceintes par une association de fer et d'acide folique, en prévention d'une éventuelle carence, n'est pas justifiée et seule une carence martiale avérée (par des dosages biologiques) nécessite d'être traitée (Cf. VIDAL Reco "Anémie ferriprive de l'adulte").
Seul l'acide folique est à conseiller systématiquement en période périconceptionnelle pour prévenir les AFTN".
Association médicamenteuse de fer et d'acide folique, TARDYFERON B9 n'a donc pas de place dans la stratégie de prévention de la carence martiale au cours des deux derniers trimestres de la grossesse.
Suite à ce déremboursement, le laboratoire Pierre Fabre prévoit d'adapter sa gamme afin de répondre aux besoins thérapeutiques de la femme enceinte. Deux nouvelles spécialités devraient être lancées prochainement :
- une spécialité composée de fer, à 50 mg par unité de prise (TARDYFERON 50 mg), en complément de TARDYFERON 80 mg,
- une spécialité d'acide folique, SPINAFOL 400 µg comprimé.
Pour aller plus loin
Avis de la Commission de la transparence relatif à CETORNAN 5 g (HAS, 4 novembre 2015)
Avis de la Commission de la transparence relatif à KEAL (HAS, 23 septembre 2015)
Avis de la Commission de la transparence relatif à TARDYFERON B9 (HAS, 1er avril 2015)
Arrêté du 8 août 2017 portant radiation de spécialités pharmaceutiques de la liste des spécialités remboursables (Journal officiel du 15 août 2017 - texte 16)
Arrêté du 8 août 2017 portant radiation de spécialités pharmaceutiques de la liste des médicaments agréés à l'usage des collectivités publiques (Journal officiel du 15 août 2017 - texte 17)
Helicobacter pylori – Traiter pour prévenir ulcère et cancer chez l'adulte (HAS, 21 juin 2017)
Pour aller plus loin
Consultez les monographies VIDAL
Consultez les VIDAL Recos
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