Des tests de grossesse en initiation de traitement en augmentation mais en nombre encore insuffisant (illustration).
Une nouvelle étude d'impact sur les mesures de réduction du risque tératogène de SORIATANE
L'ANSM (Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé) a publié les résultats d'une étude dont le but était d'évaluer l'impact des mesures de réduction du risque tératogène chez les patientes traitées par acitrétine (SORIATANE).
Ces mesures ont été renforcées en 2014, avec la limitation du traitement d'initiation aux dermatologues et l'obligation de faire établir une prescription chaque année par ces spécialistes (notre article du 27 février 2014).
Le renouvellement dans l'année est possible par tout médecin.
Cette étude concerne la période allant de 2007 à 2015 et permet de comparer les données recueillies avant et après la mise en oeuvre de la restriction de prescription.
Réalisée à partir des données du SNIIRAM (Système national d'information interrégimes de l'assurance maladie, données de remboursement) et du PMSI (Programme de médicalisation des systèmes d'information, données d'hospitalisations), elle a porté sur une cohorte de 10 402 femmes âgées de 15 à 49 ans. Toutes les patientes de l'étude ont débuté un traitement entre janvier 2007 et décembre 2015.
Les auteurs se sont particulièrement intéressés à l'analyse des données suivantes :
- réalisation des tests plasmatiques de grossesse en initiation de traitement par acitrétine : les tests de grossesse ont été identifiés à partir des remboursements de tests biologiques de bêta-hCG, et leur fréquence a été étudiée selon différents délais par rapport à la prescription et la délivrance ;
- qualité du prescripteur initial ;
- respect des règles de délivrance ;
- nombre de grossesses parmi les patientes sous SORIATANE : les grossesses ont été identifiées par un séjour hospitalier lié à une grossesse ou par la réalisation d'une interruption volontaire de grossesse médicamenteuse en ambulatoire.
Moins d'acitréine prescrite chez les femmes en âge de procréer
Les résultats de cette étude montre, en premier lieu, une diminution du nombre d'instaurations d'acitrétine chez les femmes âgées de 15 à 49 ans.
De 1 407 en 2012, ce nombre est passé à 929 en 2015 soit une diminution de 34 %.
Le généraliste initie le traitement dans encore 1 cas sur 5
Bien que depuis 2014, la prescription initiale de SORIATANE soit réservée aux dermatologues, l'étude montre que 20 % des initiations de traitement ont encore été effectuées par un médecin généraliste en 2015.
Ce taux, qui était de 35 % en 2012, reste néanmoins très élevé au vu de la réglementation en vigueur.
Les médecins généralistes ayant initié un traitement par SORIATANE depuis l'interdiction qui leur en a été faite en 2014 sont plus souvent des hommes (77 % vs 65 %), plus âgés que la population des médecins généralistes en activité en 2015, et exerçant principalement dans des villes à indice de défavorisation élevé (Seine-Saint-Denis, Val de Marne et Bouches-du-Rhône).
Plus de tests de grossesse mais en nombre encore insuffisant
Le taux de réalisation d'un test de grossesse à l'initiation du traitement a progressé, passant de 14 % en 2007 à 37 % en 2015 (test réalisé entre 10 jours avant la délivrance et le jour de la délivrance).
En outre, on observe un plus grand respect de cette mesure lorsque le prescripteur initial est un dermatologue. En 2015, la réalisation d'un test de grossesse à l'initiation du traitement était de 53 % quand le prescripteur était un dermatologue contre 12 % quand il s'agissait du généraliste.
Pour l'ANSM, l'augmentation des tests de grossesse à l'initiation de traitement est encourageante mais le fait qu'ils ne soient réalisés que chez 1/3 environ des patientes reste insuffisant.
Persistance des grossesses sous SORIATANE
La survenue d'une grossesse est encore observée chez des femmes exposées à l'acitrétine, malgré le plan de prévention de la grossesse associé à la commercialisation de ce médicament.
Entre 2007 et 2015, 694 grossesses ont été recensée dont :
- 470 grossesses sur la période 2007 - 2013, soit avant le renforcement des mesures de prévention ;
- 109 grossesses commencées en 2014 ou 2015 (92 en 2014 et 17 en 2015), donc après la mise en oeuvre des nouvelles mesures.
La majorité des grossesses a commencé après l'arrêt du traitement par acitrétine :
- 68 ont débuté entre 0 et 2 mois après la dernière délivrance d'acitrétine ;
- 273 sont survenues entre 2 mois et 1 an après la dernière délivrance ;
- 269 sont survenues plus d'un an après l'arrêt du traitement.
Les délivrances de SORIATANE en pharmacie
Parmi les 694 grossesses répertoriées entre 2007 et 2015, 376 sont intervenues chez des patientes ayant eu au moins deux délivrances d'acitrétine remboursées par l'assurance maladie au cours de la période d'étude.
Les auteurs rapportent également que des délivrances d'acitrétine ont eu lieu au cours de la grossesse pour 84 des 694 grossesses répertoriées.
La période réglementaire de 7 jours (suivant la prescription) pour la délivrance de SORIATANE semble respectée.
Dans 53 % des cas, la première délivrance d'acitrétine est associée à une prescription effectuée le jour même.
Près de 90 % des premières délivrances sont associées à une prescription réalisée au cours de la semaine précédente.
Des mesures de prévention à respecter "impérativement"
Si cette seconde étude montre une tendance à plus et mieux respecter les mesures de réduction du risque tératogène, l'ANSM "prend en compte qu'il n'est pas acceptable qu'actuellement une femme exposée au SORIATANE débute une grossesse au regard des risque encourus (risque tératogène estimé à environ 25 %)".
Dans ce contexte, l'agence rappelle aux professionnels de santé les mesures de prévention qui doivent être impérativement respectées (Cf. Encadré 1).
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De nouvelles mesures de sécurisation du risque tératogène
A l'occasion de ce point d'information, l'ANSM a souhaité informer les professionnels de santé d'une décision prise par l'Agence européenne des médicaments (EMA) concernant l'extension de la période de contraception jusqu'à 3 ans après l'arrêt d'un traitement par SORIATANE.
Cette période était initialement fixée à 2 ans.
Cette décision repose sur de nouvelles données en faveur d'un risque d'accumulation dans les graisses, et donc de relargage, d'un métabolite tératogène du SORIATANE, dont la formation est favorisée par la prise d'alcool.
De la même manière, les dons du sang ne peuvent avoir lieu pendant le traitement et au cours des 3 ans suivant son arrêt pour les patients (hommes et femmes) traités par SORIATANE
Une décision thérapeutique "éclairée"
L'ANSM recommande aux prescripteurs, lors de leur décision thérapeutique, de prendre en compte les informations relatives à SORIATANE, "alors qu'il existe, tant pour le psoriasis que pour le lichen plan, des alternatives efficaces n'ayant pas les mêmes contraintes vis-à-vis de la survenue d'une grossesse chez les femmes en âge de procréer".
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Elle précise en outre que la classe des rétinoïdes dans son ensemble fait actuellement l'objet d'une procédure d'arbitrage européen qui pourrait conduire au renforcement des mesures de réduction des risques des spécialités de cette classe (toutes indications confondues).
Pour aller plus loin
Étude d'impact des mesures de réduction du risque tératogène de Soriatane (acitrétine) : persistance de grossesses en cours de traitement ou dans les mois suivant son arrêt - Point d'information (ANSM, 22 juin 2017)
Conditions de prescriptions et de délivrance de l'acitrétine (Soriatane®) chez les femmes en âge de procréer : Étude d'impact du renforcement de la réglementation - Rapport final (22/06/2017)
Sur VIDAL.fr
SORIATANE (acitrétine) et risque tératogène : les recommandations de prévention insuffisamment suivies (étude ANSM - CNAMTS) (8 avril 2015)
SORIATANE (acitrétine) : les mesures de minimisation du risque tératogène sont renforcées (27 février 2014)
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