#Médicaments #Vigilance

PREVISCAN (fluindione) : surrisque immuno-allergique et recommandations de l'ANSM

Les anticoagulants oraux de la classe des antivitamines K (AVK) peuvent être à l'origine d'effets indésirables d'ordre immuno-allergique, de nature et de fréquence différentes entre la fluindione (PREVISCAN) et les coumariniques (warfarine COUMADINE, acénocoumarol SINTROM et MINISINTROM).

Selon les résultats d'une enquête réalisée par le Centre de pharmacovigilance (CRPV) de Lyon, il ressort que "l'utilisation de la fluindione est plus fréquemment associée à la survenue d'atteintes immuno-allergiques, rares mais souvent sévères, en particulier des atteintes rénales, hépatiques, hématologiques ou des atteintes cutanées à type de DRESS (association variable d'une éruption cutanée, d'une fièvre et d'une hyperéosinophilie)".

Survenant habituellement au cours des 6 premiers mois de traitement, ces réactions immuno-allergiques évoluent généralement de manière favorable après l'arrêt précoce du traitement et l'instauration d'une corticothérapie.

Cependant, s'agissant des atteintes rénales, le
 retard de diagnostic est fréquent et l'arrêt de traitement parfois tardif après le diagnostic, probablement par méconnaissance du lien de causalité avec la fluindione, selon le laboratoire Merck Serono. Chez certains patients, une altération de la fonction rénale peut persister avec apparition d'une insuffisance rénale chronique (IRC) ou l'aggravation d'une IRC préexistante.

Ce profil particulier d'effets indésirables de la fluindione conduit l'ANSM à émettre des recommandations à l'intention des professionnels de santé et des patients, concernant :
  • le choix de l'anticoagulant oral en initiation de traitement,
  • la surveillance des patients traités par fluindione,
  • les manifestations immuno-allergiques devant conduire les patients à consulter leur médecin.
David Paitraud 21 juin 2017 Image d'une montre5 minutes icon Ajouter un commentaire
1
2
3
4
5
1,0
(1 note)
Publicité
Commercialisé en France depuis 1988, PREVISCAN est le médicament anticoagulant le plus utilisé en France (illustration).

Commercialisé en France depuis 1988, PREVISCAN est le médicament anticoagulant le plus utilisé en France (illustration).


Des atteintes immuno-allergiques plus fréquentes, rares mais souvent sévères
Les antivitamines K (AVK) sont à l'origine d'effets indésirables (EI), notamment hémorragiques et communs à tous les anticoagulants, mais aussi d'ordre immuno-allergique dont la nature et la fréquence diffèrent entre la fluindione (PREVISCAN) et la famille des coumariniques (warfarine et acénocoumarol).

Il ressort en effet d'une enquête menée par le centre régional de pharmacovigilance (CRPV) de Lyon (Cf. Compte rendu de la séance du Comité technique de Pharmacovigilance du 20 mai 2014, pages 10-16) que "l'utilisation de la fluindione est plus fréquemment associée à la survenue d'atteintes immuno-allergiques, rares mais souvent sévères, en particulier des atteintes rénales, hépatiques, hématologiques, des atteintes cutanées à type de DRESS (association variable d'une éruption cutanée, d'une fièvre, et d'une hyperéosinophilie)."

 
Le taux de notification des atteintes immuno-allergiques est estimé :
  • à 2,77 cas/10 000 patients traités par fluindione ;
  • à 1,9 cas/10 000 patients traités par warfarine.

Des effets indésirables immuno-allergiques déjà mentionnés dans le RCP
Commercialisée en France depuis 1988, PREVISCAN est le médicament anticoagulant le plus utilisé en France (82 % des patients sous AVK), alors que le recours à la warfarine est majoritaire dans les autres pays du monde (13 % en France).

Le résumé des caractéristiques du produit (RCP) de PREVISCAN mentionne
 déjà les effets indésirables immuno-allergiques potentiels de la fluindione (Cf. Monographie VIDAL de PREVISCAN - Rubrique Effets indésirables), ceux-ci pouvant notamment se manifester par :
  • une atteinte rénale, de type néphropathie tubulo-interstitielle
  • des atteintes cutanées de type DRESS (éruption cutanée, fièvre, hyperéosinophilie et atteinte d'organe), pustules exanthématique aiguë généralisée, toxidermies sévères, vascularites,
  • une atteinte hépatique de type hépatite
  • une neutropénie brutale.
 
Un lien de causalité probablement méconnu
Selon les données de l'enquête du CRPV, les effets indésirables immuno-allergiques liés à la fluindione surviennent habituellement au cours de 6 premiers mois de traitement et leur évolution est généralement favorable après l'arrêt précoce du traitement et la mise en place d'une corticothérapie

S'agissant des atteintes rénales, l'altération de la fonction rénale a persisté chez 43 % des patients, notamment avec l'apparition d'une insuffisance rénale chronique (IRC) ou l'aggravation d'une IRC préexistante.

A noter que le traitement a été arrêté tardivement dans 43 % des cas, "probablement par méconnaissance du lien de causalité avec ce médicament" précise le laboratoire Merck dans un courrier à l'attention des professionnels de santé en date du 30 mai 2017


Cette enquête n'a pas mis en évidence de réaction croisée entre la fluindione et les dérivés coumariniques. Le relais du traitement anticoagulant par un dérivé coumarinique après l'arrêt définitif de PREVISCAN est donc possible.

Les recommandations de l'ANSM
Dans un point d'information en date du 19 juin 2017, l'ANSM met en garde les professionnels de santé sur ce risque rare mais grave d'EI immunoallergiques et émet des recommandations à leur attention.

Lors de l'initiation d'un traitement anticoagulant oral, il est recommandé de choisir de l'anticoagulant en prenant en compte l'ensemble des bénéfices et des risques attendus, et notamment le risque immuno-allergique.

L'agence "invite les professionnels de santé à privilégier la prescription d'AVK de la famille des coumariniques lors d'une initiation de traitement par AVK".


Chez les patients ayant récemment débuté un traitement par fluindione (moins de 6 mois), l'agence invite les professionnels de santé "à être particulièrement attentifs à ce risque immuno-allergique au cours des 6 premiers mois d'un traitement par fluindione".
Durant ce 1er semestre, il est recommandé :
  • de surveiller régulièrement :
    • la fonction rénale,
    • tout signe pouvant évoquer un effet indésirable immuno-allergique de type cutanéhépatique ou hématologique ;
  • de considérer le rôle potentiel de la fluindione surtout dans les mois qui suivent l'initiation du traitementen cas :
    • d'altération de la fonction rénale et/ou du bilan hépatique
    • d'apparition d'une neutropénie brutale ou de manifestations cutanées ;
  • en cas de confirmation de diagnostic d'atteinte immuno-allergique, d'arrêter rapidement et définitivement le traitement par fluindione, d'envisager le remplacement par un autre anticoagulant et la mise en place d'une corticothérapie à débuter dans les meilleurs délais.

Pour les patients traités par fluindione au long cours (plus de 6 mois) et bien équilibrés, il n'est pas justifié de modifier le traitement, toute période de changement de traitement anticoagulant constituant une situation à risque d'évènements hémorragiques et/ou thromboemboliques potentiellement graves.

Les professionnels de santé doivent néanmoins rester vigilants tout au long du traitement.

Informer les patients
L'ANSM préconise que les patients soient sensibilisés aux manifestations immuno-allergiques afin qu'ils puissent contacter rapidement leur médecin :
  • baisse importante et brutale du volume des urines ou fatigue inhabituelle, pouvant traduire une insuffisance rénale ou une aggravation d'une insuffisance rénale préexistante ;
  • apparition de signes cutanés tels qu'un Å“dème local, un brusque gonflement du visage et du cou, une démangeaison, un urticaire, un eczéma, des taches rouges sur la peau, une rougeur se généralisant à tout le corps avec des pustules ;
  • anomalie de la formule sanguine et de certains paramètres biologiques en particulier hépatiques,
  • gêne respiratoire,
  • fièvre.
Les patients devront être informés de ne pas arrêter leur traitement avant d'en avoir parlé avec leur médecin.

Pour mémoire
Comme tous les AVK, PREVISCAN est autorisé dans les indications suivantes :
  • cardiopathies emboligènes : prévention des complications thromboemboliques en rapport avec certains troubles du rythme auriculaire (fibrillations auriculaires, flutter, tachycardie atriale), certaines valvulopathies mitrales, les prothèses valvulaires (Cf. VIDAL Reco "Fibrillation auriculaire") ;
  • prévention des complications thromboemboliques des infarctus du myocarde compliqués : thrombus mural, dysfonction ventriculaire gauche sévère, dyskinésie emboligène, etc., en relais de l'héparine ;
  • traitement des thromboses veineuses profondes et de l'embolie pulmonaire ainsi que la prévention de leurs récidives, en relais de l'héparine (Cf. VIDAL Reco "Thrombose veineuse profonde : traitement").

Pour aller plus loin
Point d'information : PREVISCAN et risque immuno-allergique (ANSM, 19 juin 2017)
Lettre aux professionnels de santé - Fluindione : mises en garde sur le risque d'effets indésirables immuno-allergiques (ANSM, 30 mai 2017)

Sur VIDAL.fr

Commentaires

Ajouter un commentaire
En cliquant sur "Ajouter un commentaire", vous confirmez être âgé(e) d'au moins 16 ans et avoir lu et accepté les règles et conditions d'utilisation de l'espace participatif "Commentaires" . Nous vous invitons à signaler tout effet indésirable susceptible d'être dû à un médicament en le déclarant en ligne.
Pour recevoir gratuitement toute l’actualité par mail Je m'abonne !
Presse - CGU - Conditions générales de vente - Données personnelles - Politique cookies - Mentions légales