Adaptation par la Haute Autorité de Santé de l'outil SCORE (version tronquée pour illustration).
Evaluation du risque cardiovasculaire : préférer une approche globale plutôt que segmentaire
Pour une meilleure évaluation du risque cardiovasculaire, en prévention primaire entre 40 et 65 ans (avant 40 ans des outils spécifiques existent, après 65 ans l'âge est le facteur principal, l'approche doit être personnalisée), la Haute Autorité de Santé (HAS) rappelle, dans la première fiche mémo centré sur l'évaluation, qu'il est plus utile d'aborder l'ensemble des facteurs de risque, et non de se focaliser sur l'un ou l'autre.
Pour cela, la HAS conseille aux médecins d'utiliser l'outil européen SCORE (Systematic Coronary Risk Estimation), adapté des recommandations européennes 2016 (Eur Heart J. 2016 Aug 1;37(29):2315-81), "plus fiable et plus précis que la simple sommation de facteurs utilisée auparavant" pour évaluer le risque cardiovasculaire.
Cet outil SCORE, dont la première version date de 2003, ne tient pas compte du taux de HDL ni du diabète éventuel, et ne peut s'appliquer ni avant 40 ans ni après 65 ans, contrairement au score américain de Framingham.
Mais le score de Framingham a été élaboré en 1976 (et révisé en 1998) à partir des données de la population d'une petite ville du Massachussetts suivie depuis 1948, alors que SCORE a été adapté en fonction des caractéristiques générales des populations d'Europe à moindre risque (France, Andorre, Autriche, Belgique, Chypre, Danemark, Finlande, Allemagne, Grèce, Islande, Irlande, Israël, Italie, Luxembourg, Malte, Pays-Bas,Norvège, Portugal, San Marin, Slovénie, Espagne, Suède, Suisse et Royaume Uni) et de celles à risque plus élevé (Arménie, Bellarussie, Bulgarie, Géorgie, Kazahkhstan, Kyrgyzstan, Lettonie, Lituanie, Macédoine, Moldavie, Russie, Ukraine et Ouzbejistan).
L'outil SCORE permet une évaluation du risque de décès d'origine cardiovasculaire à 10 ans
Cet outil SCORE tient compte du sexe, de l‘âge, du tabagisme, du taux de cholestérol et de la tension artérielle, "avec des coefficients modulés". Vous pouvez y accéder sur la fiche mémo de la HAS, ou utiliser une version électronique en ligne (après inscription), ou encore une application mobile.
Voici ci-dessous la version de la HAS, légèrement adaptée pour être lisible correctement sur notre site :
Le risque d'événement cardiovasculaire fatal à 10 ans est donc évaluable en déterminant la case la plus proche des caractéristiques du patient : son sexe (colonne gauche ou droite), son âge, sa tension et son taux de cholestérol (en mmol/L - 4 à 8 mmol/L - ou g/L).
Les couleurs des cases correspondent aux risques suivants de décès cardiovasculaire à 10 ans :
Quatre niveaux de risque cardiovasculaire global
Outre ces données, l'existence d'un diabète, d'une insuffisance rénale ou d'une maladie cardiovasculaire documentée (prévention secondaire donc) influe sur le risque cardiovasculaire global.
Voici une synthèse que propose la HAS pour évaluer ce niveau global de risque en intégrant les résultats de SCORE et ces possibles pathologies associées :
RISQUE FAIBLE :
- SCORE < 1 %
- 1 % --
- ou diabète de type 1 ou 2 chez un patient de moins de 40 ans sans facteur de risque cardiovasculaire(RCV) ni atteinte d'organe cible
- 5% --
- Diabète de type 1 ou 2 :
- < 40 ans avec au moins un facteur de RCV ou atteinte d'organe cible ;
- >/= 40 ans sans facteur de RCV ni atteinte d'organe cible
- Patient ayant une insuffisance rénale chronique modérée
- TA >/= 180/110 mmHg
- SCORE >/= 10 %
- Diabète de type 1 ou 2 ?chez un patient de 40 ans ou plus avec au moins un facteur de RCV ou atteinte d'organe cible
- Patient ayant une insuffisance rénale chronique sévère
- Maladie cardio-vasculaire documentée (prévention secondaire)
Quelque soit le risque cardiovasculaire, des conseils d'hygiène de vie peuvent être prodigués suite à cette évaluation
Modification du mode de vie dans la prise en charge cardiovasculaire
Pour la première fois, la HAS publie une fiche mémo sur ce sujet. Cette fiche, accessible ici, rappelle les piliers du conseil hygiéno-diététique en prévention cardiovasculaire, succinctement résumés ci-dessous :
- Encourager à l'arrêt du tabac, prévention de l'exposition au tabac ;
- Décourager "fortement" la consommation d'alcool [NDLR : rappelons cependant que de multiples études ont montré qu'une consommation modérée, d'1 à 2 verres par jour, n'était pas associée à une augmentation du risque cardiovasculaire] ;
- Prôner une alimentation adaptée pour participer à la réduction du risque cardiovasculaire (régime type méditerranéen, consommation de poisson 2 à 3 fois par semaine, prise d'aliments riches en polyphénols, 5 fruits et légumes par jour, aliments riches en vitamines et caroténoïdes, etc.) et à l'amélioration du profil lipidique (augmentation de la prise acides gras insaturés, de fibres, de poissons gras, diminution des produits carnés, du fromage, du beurre, des acides gras trans, etc.) ;
- Conseiller une activité physique pour lutter contre la sédentarité de notre époque, avec augmentation progressive pour aboutir à cumuler 30 minutes d'exercice plusieurs jours de la semaine (marche rapide par exemple) et au moins 150 minutes par semaine d'activité physique modérée (ou 75 minutes d'activité intense).
Mises en garde, en particulier contre certains compléments alimentaires
La HAS met aussi en garde, dans cette même fiche mémo, contre les compléments alimentaires à base de levure rouge de riz (contenant de la monacoline K, également appelée lovastatine), qui exposent à des événement indésirables "similaires à ceux des statines", sans représenter une alternative à ces médicaments car "leur efficacité est faible".
D'autres mises en garde sont aussi mentionnées : pas de restriction recommandée après 80 ans ; les aliments enrichis en phytostérols n'ont pas fait leurs preuves ; les produits laitiers n'augmentent pas le risque cardiovasculaire, contrairement à la viande rouge ; le cholestérol alimentaire (abats, oeufs) n'augmente pas le risque cardiovasculaire mais augmente le cholestérol total et le LDL-C.
Stratégie de prise en charge des principales dyslipidémies
La troisième fiche mémo est accessible ici.
La HAS recommande de "ne pas recourir à la prescription systématique d'une statine" en se focalisant uniquement sur le cholestérol, mais plutôt "d'envisager la prise en charge en fonction du niveau de risque cardiovasculaire global [défini par SCORE et la présence, ou non, de comorbidités, cf. supra] et de la concentration en LDL-cholestérol (LDL-C)" :
- Pour les patients dont le risque cardiovasculaire est faible ou modéré, la prise en charge démarre par au minimum 3 mois de modifications du mode de vie pour atteindre des objectifs thérapeutiques de LDL-C de < 1,9 g/L pour le risque faible, < 1,3 g/L pour le risque modéré.
- Pour les patients dont le risque cardiovasculaire est élevé ou très élevé, une statine peut être prescrite en première intention, en complément des modifications de mode de vie. Les objectifs thérapeutiques de taux de LDL-C à atteindre sont alors de < 1,0 g/ L pour le risque élevé, < 0,70 g/L pour celui très élevé.
Tableau récapitulatif de cette stratégie thérapeutique en fonction des niveaux de risque cardiovasculaire :
En ce qui concerne le choix des statines, la HAS estime que "la simvastatine et l'atorvastatine doivent être préférées en raison de leur meilleur coût-efficacité. En cas d'intolérance, une autre statine peut être utilisée".
Cette fiche mémo détaille également le suivi, en particulier de la tolérance d'un traitement par statines, l'éducation thérapeutique, les cas particuliers (hypercholestérolémie isolée, dyslipidémie mixte, hypertriglycéridémie isolée, hypercholestérolémie familiale hétérozygote) et la place, encore mal définie, des anticorps monoclonaux anti-PCSK9 (evolocumab et alirocumab).
En savoir plus :
Traiter l'hypercholestérolémie seule n'est pas suffisant dans la prise en charge du risque cardiovasculaire, communiqué de la HAS , 30 mars 2017
Fiche Mémo - Évaluation du risque cardiovasculaire, HAS, février 2017
Fiche Mémo - Modifications du mode de vie dans la prise en charge du risque cardio-vasculaire, HAS, février 2017
Fiche Mémo - Principales dyslipidémies : stratégies de prise en charge, HAS, février 2017
Sources
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