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Eradication de la poliomyélite : dernières recommandations pour la lutte finale

05 juin 2016 Image d'une montre7 minutes icon Ajouter un commentaire
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Cet article est assez technique. Nous recommandons aux lecteurs intéressés de lire d'abord cet article sur la poliomyélite et sa vaccination.

La 9ème réunion du Comité d'urgence en ce qui concerne la propagation internationale du poliovirus a été convoquée par téléconférence par le Directeur général de l'Organisation mondiale de la santé, le 12 mai 2016, pour examiner les données sur la circulation des poliovirus sauvage et des poliovirus dérivés de la souche vaccinale (PVDVc).

La circulation de poliovirus dérivés de la souche vaccinale dans un pays est possible lorsque la couverture vaccinale contre la poliomyélite est insuffisante.

En outre, toute nouvelle propagation du poliovirus de type 2 dérivé de la souche vaccinale est considéré comme une urgence de santé publique car le type 2 a été retiré du vaccin polio oral le 1er mai 2016.

1. Circulation des poliovirus sauvages

Dans le cadre du RSI (Règlement sanitaire international), la propagation internationale du poliovirus est définie par la propagation du poliovirus entre deux États membres.

A l'exception de l'Afghanistan et du Pakistan, diminution de la propagation internationale du poliovirus sauvage (pas d'exportation de cas de poliomyélite de l'année 2015 à mai 2016). Malgré des progrès, la propagation internationale n'a pas encore été stoppée entre le Pakistan et l'Afghanistan (une exportation en octobre 2015, reconnue récemment grâce à une analyse des données génétiques, une autre en février 2016). Ces cas sont survenus dans les provinces de Nangarhar et Kunar, dans la région orientale, contiguë à la frontière avec le Pakistan. Le nouveau virus isolé à Kunar est étroitement lié aux virus circulant au Pakistan depuis juin 2014 au niveau de la région frontalière Khyber-Peshawar. Le nouveau virus afghan isolé à Nangarhar était étroitement lié aux virus pakistanais circulant en 2015 dans la région frontalière de Khyber-Peshawar.

Alors que la vaccination à la frontière entre ces deux pays est limitée aux enfants de moins de dix ans, des efforts ont été déployés pour vacciner tous les voyageurs au départ de l'Afghanistan et du Pakistan.

Tous les pays, et en particulier ceux qui ont des ambassades en Afghanistan et au Pakistan, devraient faciliter la mise en œuvre des recommandations temporaires, incluant notamment une preuve de vaccination contre la polio pour toute demande de visa des voyageurs au départ de l'Afghanistan ou du Pakistan.

Le comité se dit préoccupé par la détérioration de la sécurité dans certaines parties de l'Afghanistan, rendant plus d'enfants inaccessibles à la vaccination. Ces difficultés pourraient retarder la date d'éradication de la poliomyélite, qui était espérée pour l'année 2016.

Il persiste pas ailleurs des zones vulnérables à la poliomyélite au Moyen-Orient, dans la Corne de l'Afrique, en Afrique centrale et dans certaines parties de l'Europe.
Le risque de sous-vaccination contre la poliomyélite est plus élevé au sein des populations réfugiées ou déplacées. On estime que 3 à 4 millions de personnes ont été déplacées vers la Jordanie, le Liban et la Turquie et migrent en masses à travers l'Europe.

2. Virus vaccinaux antipoliomyélitiques dérivés

Les poliovirus dérivés de la souche vaccinale circulent dans quatre régions de l'OMS : ils sont la traduction de graves lacunes dans les programmes de vaccination de routine. En 2015, six foyers de circulation de ces poliovirus ont été identifiés, trois dérivés de la souche vaccinale de type 1 (Laos, Madagascar et Ukraine) et trois dérivés de la souche de type 2 vaccinale (Guinée, Myanmar et Nigéria). 

En 2016, la transmission se poursuit au Laos, au Nigeria et peut-être en Guinée. L'épidémie semble se limiter à une seule région, Kankan, mais pourrait se poursuivre après le retrait du vaccin poliovirus oral de type 2. 

  • Au Libéria et en Sierra Leone, la qualité de la surveillance de la poliomyélite est insuffisante et doit être renforcée. 
  • Au Laos, les poliovirus dérivés de la souche vaccinale continuent à se transmettre dans les populations difficiles à atteindre.
  • Au Nigéria, la situation est préoccupante car un poliovirus dérivé de la souche vaccinale de type 2 a été détectée dans un échantillon environnemental en mars 2016 à Maiduguri (État de Borno, nord-est du Nigeria). Le séquençage génétique de la souche isolée indique qu'elle est étroitement liée à une souche dérivée de la souche de type 2 vaccinale (PVDVc2) isolée dans l'État de Borno en novembre 2013 puis en mai 2014. La souche (différente de la souche identifiée en 2015) a circulé, sans détection pendant près de deux ans, sur le territoire de la capitale fédérale et Kaduna. Le risque de propagation internationale de cette souche est élevé. Les activités de surveillance et de vaccination doivent donc être renforcées dans les pays voisins de la région du lac Tchad.

En résumé, le Comité considère que la propagation internationale du poliovirus reste une urgence de santé publique de portée internationale (USPI). Il recommande l'extension des recommandations temporaires pour trois mois.

  • Les souches de poliovirus dérivés de la souche vaccinale posent un risque de propagation internationale, et s'il n'y a pas de réponse d'urgence avec des mesures appropriées, les populations vulnérables sont menacées.
  • Il y a une urgence particulière de prévenir la propagation du Poliovirus dérivés de la souche de type 2 vaccinale après le retrait du type 2 du vaccin antipoliomyélitique oral en avril 2016.
  • La pénurie mondiale de vaccin antipoliomyélitique inactivé pose de nouveaux défis.

3. Catégories de risque

Les recommandations du Comité pour réduire le risque de propagation internationale des poliovirus sauvage et des poliovirus dérivés de la souche vaccinale sont basés sur la stratification du risque.

  • États exportateurs de poliovirus (sauvage ou dérivé de la souche vaccinale) ;
  • États infectés par le poliovirus mais non exportateurs actuellement ;
  • États qui ne sont plus infectés par le poliovirus, mais qui restent vulnérables à la propagation internationale.

Les États ne sont plus exportateurs quand il n'est plus détecté de nouveau cas de poliovirus sauvage ou vaccinal ou de cas de paralysie aiguë flasque 12 mois après la date d'apparition du dernier cas PLUS un mois.

4. Recommandations temporaires

4.1. États exportateurs de poliovirus sauvage ou vaccinal

Il s'agit du Pakistan (dernière exportation le 1er février 2016) et de l'Afghanistan (dernière exportation le 6 juin 2015).

Ces pays exportateurs doivent :

  • Officiellement déclarer que l'interruption de la transmission du poliovirus est une urgence nationale de santé publique.
  • Veiller à ce que tous les résidents et les visiteurs à long terme (plus de quatre semaines), de tous les âges, reçoivent une dose de vaccin antipoliomyélitique oral (VPO) ou le vaccin antipoliomyélitique inactivé (VPI) entre quatre semaines et 12 mois avant un voyage international.
  • S'assurer que celui qui entreprend un voyage d'urgence (à savoir dans les quatre semaines) et qui n'a pas reçu une dose de VPO ou VPI dans les quatre semaines précédentes à 12 mois reçoive une dose de vaccin contre la polio au moins au moment du départ.
  • S'assurer que ces voyageurs présentent un certificat international de vaccination ou de prophylaxie dans la forme indiquée à l'annexe 6 du RSI pour enregistrer leur vaccination contre la poliomyélite et s'en servir comme preuve de vaccination.
  • Restreindre au point de départ un voyage international à tout résident qui ne présente pas un document de vaccination contre la polio approprié.
  • Reconnaître que la circulation des personnes à travers la frontière entre le Pakistan et l'Afghanistan continue de faciliter l'exportation du poliovirus sauvage : les deux pays doivent donc intensifier les efforts transfrontaliers en améliorant de manière significative la coordination aux niveaux national, régional et local pour augmenter sensiblement la couverture vaccinale des voyageurs franchissant la frontière et des populations transfrontalières à risque élevé.
  • Maintenir ces mesures jusqu'à ce que des critères définis par le Comité soient atteints.
  • Fournir un rapport mensuel à l'OMS sur l'application de ces mesures.

4.2. États infectés par le poliovirus sauvage ou vaccinal, mais non exportateurs

Actuellement sont concernés le Nigéria, la Guinée, Madagascar, l'Ukraine, Myanmar et le Laos.

Ces pays devraient :

  • Déclarer que l'interruption de la transmission du poliovirus est une urgence nationale de santé publique.
  • Encourager les résidents et les visiteurs à long terme pour recevoir une dose de vaccin antipoliomyélitique oral (VPO) ou le vaccin antipoliomyélitique inactivé (VPI) dans les quatre semaines à 12 mois avant de voyage international, ceux qui entreprennent un voyage d'urgence (à savoir dans les quatre semaines) devraient être encouragés à recevoir une dose au moins au moment du départ.
  • Veiller à ce que ces voyageurs présentent un certificat international de vaccination ou de prophylaxie dans la forme indiquée à l'annexe 6 du RSI pour enregistrer leur vaccination contre la poliomyélite et s'en servir comme preuve de vaccination.
  • Intensifier la coopération régionale et la coordination transfrontalière pour améliorer la surveillance par la détection rapide des poliovirus et augmenter sensiblement la couverture vaccinale chez les réfugiés, les voyageurs et les populations transfrontalières.
  • Maintenir ces mesures jusqu'à ce que des critères définis par le Comité soient atteints.
  • A la fin de 12 mois sans preuve de transmission, fournir un rapport au Directeur général sur les mesures prises pour mettre en œuvre les recommandations temporaires.

4.3. États qui ne sont plus infectés par le poliovirus sauvage ou vaccinal, mais qui restent vulnérables à la propagation internationale, et États à risque pour l'émergence et la circulation du poliovirus vaccinal

Actuellement sont concernés la Somalie, la Guinée équatoriale et le Cameroun.

Ces pays devraient :

  • Renforcer la vaccination systématique d'urgence pour renforcer l'immunité de la population.
  • Améliorer la qualité de la surveillance pour réduire le risque de poliovirus sauvage non détecté et la transmission de poliovirus vaccinal, en particulier parmi au sein des populations vulnérables ou déplacées.
  • Intensifier les efforts pour assurer la vaccination des populations transfrontalières, les personnes déplacées, les réfugiés et d'autres groupes vulnérables.
  • Renforcer la coopération régionale et la coordination transfrontalière pour assurer la détection rapide du poliovirus sauvage ou vaccinal, et la vaccination des groupes de population à haut risque.
  • Maintenir ces mesures avec la documentation de l'application complète des activités de surveillance et de vaccination de haute qualité.
  • A la fin de 12 mois sans preuve de réintroduction du poliovirus sauvage ou sans nouvelle émergence de poliovirus vaccinal, fournir un rapport au Directeur général sur les mesures prises pour mettre en œuvre les recommandations temporaires.

4.4. Considérations supplémentaires pour tous les "pays infectés"

Le Comité a exhorté les partenaires mondiaux dans l'éradication de la poliomyélite à fournir un soutien optimal à tous les "pays infectés" à ce moment critique dans le programme d'éradication de la poliomyélite. Reconnaissant que la circulation du poliovirus vaccinal témoigne de graves lacunes dans les programmes de vaccination systématique, le Comité a recommandé que les partenaires internationaux dans la vaccination de routine, par exemple Gavi, aident de toute urgence les pays concernés à améliorer leur programme national de vaccination.

Le Comité a demandé une analyse des avantages et des coûts de la mise en œuvre de la recommandation temporaire obligeant les pays exportateurs à vacciner tous les voyageurs internationaux avant leur départ.

Le Directeur général a approuvé les recommandations du Comité pour réduire la propagation internationale du poliovirusLes mesures préconisées sont entrées en application à compter du 20 mai 2016.

Source : Organisation mondiale de la santé.

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