L’hypnose semble efficace dans le cadre de l'antalgie et du syndrome du côlon irritable (illustration).
L'hypnose, une technique favorisant la suggestion
Par la parole, l'hypnothérapeute induit chez le patient un état de conscience particulier caractérisé par une indifférence au monde extérieur et une hypersuggestibilité.
Cet état modifié de la conscience, dit "hypnotique", est traditionnellement utilisé pour mobiliser les ressources internes du patient dans la lutte contre l'anxiété et la douleur.
Un impact neuronal mesurable par imagerie cérébrale
Concrètement, l'état de conscience hypnotique se traduit par des variations de l'activité de certaines régions cérébrales. La diminution de la perception de la douleur observée en hypnose semble liée à une augmentation de la modulation exercée par le cortex cingulaire antérieur sur un réseau de structures corticales et sous-corticales, selon des évaluations effectuées avec un PET scan (tomographie par émission de positons).
Or ces structures corticales et sous-corticales sont connues pour être impliquées dans l'évaluation de la douleur, en particulier le cortex pré-frontal (Faymonville ME et coll., 2006).
Plusieurs types d'hypnose pour des indications distinctes
Selon leur objectif thérapeutique, on distingue plusieurs types d'hypnose :
- l'hypnoanalgésie, à visée antalgique chez des patients souffrant de douleur chronique, ou lors d'interventions mineures ;
- l'hypnosédation, lorsque l'hypnose est associée à des substances anesthésiques ou sédatives (par exemple lors de soins dentaires ou de fibroscopies) ;
- l'hypnothérapie, dans le cadre d'une prise en charge psychothérapeutique.
Formation et pratiques hétérogènes en France
En France, l'hypnose souffre d'une pratique très hétérogène. Le terme d'hypnothérapeute n'est pas protégé et s'applique indistinctement à des professionnels de santé comme à des personnes sans formation médicale.
Les formations à l'hypnose sont dispensées par des universités, mais également par des associations ou des organismes privés.
Une méta-analyse de l'Inserm pour mieux évaluer l'efficacité de l'hypnose
Pour essayer de juger plus clairement de l'utilité de l'hypnose, Bruno Falissard et l'équipe de l'U108 de l'Inserm ("Santé mentale et santé publique") ont effectué un travail de méta-analyse.
Ils ont identifié 52 études cliniques sur l'hypnose, analysé leurs méthodologies et résultats. Les critères d'évaluation de l'utilité de l'hypnose concernaient le ressenti des patients (intensité douloureuse, anxiété, consommation médicamenteuse, effets indésirables), ainsi que la durée et le coût des interventions.
L'hypnose, efficace comme adjuvant des sédatifs et pour soulager le syndrome du côlon irritable
Selon l'analyse des auteurs, publiée sous forme d'un rapport (PDF) sur le site de l'Inserm, l'hypnosédation réduit la consommation d'antalgiques et de sédatifs pendant des examens de chirurgie et de radiologie interventionnelle : extraction de dents de sagesse, biopsies mammaires, interventions transcathéter, interruptions de grossesse, coloscopies, etc.
De plus, la méta-analyse confirme que des séances régulières d'hypnothérapie limitent les symptômes digestifs liés au syndrome du côlon irritable (maux de ventre, sensations de ballonnement, phases de diarrhées ou de constipation).
Une bonne tolérance des techniques hypnotiques
L'équipe de l'Inserm a également examiné la sécurité de l'hypnose rapportée dans la littérature. Même si on ne peut exclure l'existence d'effets indésirables, leur incidence semble relativement faible et aucun effet indésirable grave ne paraît attribuable à cette pratique.
Autres utilisations médicales "traditionnelles" de l'hypnose : efficacité non évaluable avec les études publiées
Less études disponibles n'ont pas permis à l'équipe de l'U108 de trancher sur l'efficacité des techniques hypnotiques dans d'autres indications "traditionnelles" : prise en charge de la douleur pendant l'accouchement, prévention de la dépression post-partum, schizophrénie, sevrage tabagique et soins dentaires.
L'EMDR plus efficace que la psychothérapie et l'hypnothérapie traditionnelle dans le stress post-traumatique
Créé dans les années 1990 par Francine Shapiro, l'EMDR (Eye Movement Desensitization and Reprocessing, ou Technique de Désensibilisation et Retraitement par Mouvements Oculaires) fait intervenir certaines pratiques issues de l'hypnose. Elle est utilisée pour soigner le syndrome de stress post-traumatique.
En 2004, dans une expertise sur l'efficacité des psychothérapies (à laquelle Bruno Falissard avait participé), l'Inserm avait déjà reconnu l'EMDR comme plus efficace que les traitements médicamenteux contre le syndrome de stress post-traumatique.
Dans son expertise sur l'hypnose, l'équipe de l'U108 a analysé 17 études portant sur l'EMDR et a mis en évidence que, chez l'adulte, cette pratique semble aussi efficace que les thérapies cognitivo-comportementales pour soulager les symptômes du stress post-traumatique, et plus efficace que l'hypnothérapie traditionnelle.
Une nécessité de repenser la méthodologie des études cliniques sur l'hypnose
Les auteurs rapportent également que le travail accompli avec cette méta-analyse fait ressortir la nécessité de repenser les standards méthodologiques classiques lorsqu'il s'agit d'évaluer l'efficacité de pratiques alternatives telle que l'hypnose : choix des groupes contrôle, critères de jugement, prise en compte de critères de qualité de vie, etc.
Mettre en place d'un système de surveillance équivalent à la pharmacovigilance
Face à l'hétérogénéité des praticiens de l'hypnose, les auteurs recommandent la création d'un système de surveillance pour recueillir les données d'efficacité et de sécurité issues du terrain (comme pour la pharmacovigilance), ainsi que pour éviter le risque inhérent à tout recours aux thérapeutiques non conventionnelles : la perte de chances thérapeutiques en retardant l'accès à des soins conventionnels nécessaires.
En savoir plus :
Le communiqué de presse de l'Inserm, septembre 2015
Evaluation de l'efficacité de la pratique de l'hypnose, Juliette Gueguen, Caroline Barry, Christine Hassler, Bruno Falissard avec l'expertise critique d'Arnaud Fauconnier et d'Elisabeth Fournier-Charrière, Inserm, juin 2015
Functional neuroanatomy of the hypnotic state, Faymonville ME, Boly M et Laureys S., Journal of Physiology-Paris, juin 2006
Sur VIDAL.fr :
Opérée d'une tumeur de la gorge sous hypnose, elle chante pendant l'intervention (juin 2014)
Avis de l'Académie de médecine sur l'acupuncture, l'hypnose, l'ostéopathie et le tai chi (mars 2013)
Sources
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