La mésothérapie esthétique fait partie des multiples réponses actuelles à la demande grandissante d'une "plus belle peau, plus jeune, etc." (illustration).
Qu'est-ce que la mésothérapie ?
La technique consiste en une injection intra ou hypodermique de produit (ou d'un mélange de produits) en petite quantité à l'aide d'aiguilles fines au plus près de la zone à traiter. L'injection se fait soit manuellement, soit à l'aide d'un pistolet électronique injecteur.
La mésothérapie est une technique de soins à visée locale :
- soit dans un but antalgique : un acte intitulé "Séance de mésothérapie à visée antalgique" a été introduit en 2005 sous le code ANLB003 dans la nomenclature des actes médicaux. Mais bien que cet acte soit codé, il n'est pas pris spécifiquement en charge par l'assurance maladie, rappelle l'HAS dans son rapport.
- soit dans un but esthétique : injection d'acide hyaluronique, de vitamines ou encore d'oligo-éléments, médicaments pour tenter de modifier l'aspect cutané (recherche d'un "rajeunissement"), lutter contre la cellulite ou l'alopécie (chute de cheveux). La mésothérapie à visée esthétique utilise donc différents produits, pharmaceutiques ou non.
HAS : efficacité de la mésothérapie "non concluante" sur le rajeunissement de la peau et l'alopécie
La HAS a analysé les résultats d'une étude française publiée en 2013 sur l'éventuelle efficacité de la mésothérapie sur le "rajeunissement cutané", étude randomisée en simple insu avec 53 femmes volontaires. Le critère principal d'évaluation était l'influence de la mésothérapie sur l'élasticité de la peau à 1 mois. Les résultats montrent que l'élasticité et l'épaisseur du derme de la partie traitée de la peau (une hémiface traitée) n'étaient pas significativement améliorées à 1 mois et 3 mois par rapport à l'hémiface qui avait reçu des injections de placebo. Malgré ces résultats non significatifs, les auteurs concluaient tout de même à l'efficacité de ces injections, s'étonne la HAS…
Une autre étude cherchant à démontrer l'éventuel intérêt dans le cadre d'une alopécie d'origine androgénique a été également publiée en 2013. 126 patients ont bénéficié soit d'injections à base de Dutastéride, soit d'injections placebo (solution saline). Là encore, si une pousse supérieure a été constatée dans le groupe traité (63 % dans le groupe traité, 17,5 % seulement dans le groupe placebo, p > 0,05), pousse saluée par les auteurs, pas d'amélioration significative n'a été relevée quant au nombre de cheveux perdus par traction avant et après traitement. Le diamètre des cheveux des personnes traitées n'a également pas augmenté.
Des accidents infectieux et systémiques inquiétants, identifiés depuis des années mais impossible à quantifier
Ces risques sont notamment liés à la multiplicité des injections effectuées. La HAS rappelle qu'entre 1986 et 1992, la mésothérapie à visée esthétique s'est avérée responsable de 15 % des infections à mycobactéries cutanées recensées, soit 92 cas. Entre 2006 et 2007, 16 cas d'infections à mycobactéries ont à nouveau été relevés et en 2009, 7 infections du même type ont été signalées aux autorités sanitaires, toutes secondaires à des soins de mésothérapie esthétique.
La HAS souligne également que d'autres risques pharmacologiques à type de réactions granulomateuses (papules et nodules prurigineux, taches érythémateuses), systémiques (thyrotoxicose, maladie de Behçet) et allergiques (un cas de choc anaphylactique, réaction allergique extrême) ont été relevés. Ces incidents sont graves, voire mortels (la personne atteinte d'un choc anaphylactique est décédée).
Leur fréquence n'a par contre pas pu être établie, "en l'absence de données chiffrées", y compris lorsque toutes les règles de bonne pratique (hygiène, matériel à usage unique) sont respectées : les systèmes de vigilance actuellement en place ne permettent pas une surveillance satisfaisante des effets secondaires de cette technique à visée esthétique. LA HAS redoute aussi une sous-notification possible des effets indésirables.
Pas de standardisation des produits, un recours à des médicaments parfois hors AMM
L'HAS, dans un avis rendu le 25 juin (s'appuyant sur le rapport évoqué ci-dessus), souligne également l'absence de standardisation en termes de produits injectés. Elle regrette, par ailleurs, le recours à des médicaments parfois utilisés en dehors de leur AMM (autorisation de mise sur le marché), ce qui rend "complexe voire impossible" l'évaluation de leur rapport bénéfices-risques.
Elle estime donc "illusoire une information suffisante du public lui permettant d'exercer des choix éclairés". Le patient devrait donc, au moins, être informé de l'éventuel caractère hors AMM de l'utilisation d'un produit, utilisation "dont le médecin est responsable".
Pas de reconnaissance de l'intérêt de cette technique "sans aucun fondement scientifique"
La HAS tient à préciser que ses recommandations de renforcement de l'information des patients et des bonnes pratiques "ne constituent en aucun cas une reconnaissance ou une légitimation de la pratique de mésothérapie à visée esthétique qui en tout état de fait ne repose sur aucun fondement scientifique".
Un avis lapidaire qui a le mérite d'être tranché, même s'il est vraisemblable que les médecins utilisant cette technique esthétique ne soient probablement pas du tout du même avis, en raison de ce qu'ils observent sur le terrain, de la probable hétérogénéité des pratiques et du nombre très faible, voire nul, d'infections constatées par chacun sur le nombre total d'actes qu'il a effectué…
En savoir plus :
Évaluation des risques liés aux pratiques de mésothérapie à visée esthétique, rapport de l'HAS, juin 2014
Avis n°2014.0048/AC/SEAP du collège de la Haute Autorité de santé relatif à l'Évaluation des risques liés aux pratiques de mésothérapie à visée esthétique, HAS, 25 juin 2014
Clinical and biometrological efficacy of a hyaluronic acid-based mesotherapy product: a randomised controlled study, Martine Baspeyras et coll., Archives of dermatological research, octobre 2013
Mesotherapy using dutasteride-containing preparation in treatment of female pattern hair loss: photographic, morphometric and ultrustructural evaluation, N Moftah et coll., Journal of the European Academy of Dermatology and Venereology, juin 2013
Sources
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