Mise à jour : 11 avril 2023

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Diagnostic

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Quels patients traiter ?

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Objectifs de la prise en charge

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Prise en charge
Patient VIH+
Patient VIH+
1
Bilan initial recommandé
Voir rubrique « Bilans paracliniques ».
2
Choix et objectif du 1er traitement antirétroviral (TAR)
Son instauration est recommandée chez toute personne vivant avec le VIH (c'est-à-dire séropositive), quel que soit le nombre de lymphocytes CD4. Le TAR doit être individualisé en faisant participer le patient au choix afin d'atteindre un niveau maximal d'adhérence. Il tient compte du niveau de la charge virale (< ou > 100 000 copies/ml), des résultats du test de résistance génotypique préthérapeutique, de la tolérance attendue et de la facilité de prise, des interactions avec des médicaments associés, des comorbidités, en particulier cardiovasculaires, rénales, hépatiques, des conduites addictives et troubles psychiatriques, de l'existence d'une tuberculose, des perspectives de procréation, de la présence d'une co-infection par le VHC et/ou le VHB et des conséquences potentielles d'un échec sur les options thérapeutiques ultérieures, et des résultats de recherche de l'allèle HLA-B*5701.
L'objectif est d'obtenir une charge virale (CV) plasmatique indétectable (< 50 copies/ml) au plus tard 6 mois après le début du TAR : à M1, la CV doit avoir baissé d'au moins 2 log10 copies/ml, à M3, la CV doit être < 400 copies/ml. Toutefois chez certains patients (CV > 5 log, CD4 très bas), si indétectabilité non obtenue et CV < 200 copies/ml à 6 mois, un délai supplémentaire peut être accordé. L'échec virologique est défini par une CV détectable après 12 mois de TAR.
3
Infection(s) opportuniste(s) nécessitant un traitement spécifique
Le traitement en urgence des infections opportunistes est recommandé, avec une évaluation de l'efficacité et de la tolérance après 2-3 semaines. L'introduction du TAR doit être réalisée dans les 2 semaines après le début du traitement de l'infection opportuniste, ce qui permet de réduire le risque de décès ou de progression de l'infection par le VIH. Ce délai sera différé d'au moins 4 semaines en cas de tuberculose ou de cryptococcose neuroméningée en raison du risque de mortalité lié au syndrome de restauration immunitaire (voir Cas particulier).
4
En cas de cancer associé
Le traitement antirétroviral doit être entrepris sans délai en tenant compte des interactions des antirétroviraux avec la chimiothérapie. Voir paragraphe dédié « TAR et cancer ».
5
Prophylaxie secondaire des infections opportunistes
Il s'agit du traitement d'entretien à posologie réduite de l'infection opportuniste à poursuivre jusqu'à la restauration immunitaire. La prophylaxie primaire et secondaire des infections opportunistes ne peut être interrompue sous antirétroviral que si lymphocytes CD4 > 200/mm3 depuis au moins 3 mois pour la pneumocystose et 6 mois pour la toxoplasmose. Voir rubrique dédiée.
1
Bilan initial recommandé
Voir rubrique « Bilans paracliniques ».
2
Choix et objectif du 1er traitement antirétroviral (TAR)
Son instauration est recommandée chez toute personne vivant avec le VIH (c'est-à-dire séropositive), quel que soit le nombre de lymphocytes CD4. Le TAR doit être individualisé en faisant participer le patient au choix afin d'atteindre un niveau maximal d'adhérence. Il tient compte du niveau de la charge virale (< ou > 100 000 copies/ml), des résultats du test de résistance génotypique préthérapeutique, de la tolérance attendue et de la facilité de prise, des interactions avec des médicaments associés, des comorbidités, en particulier cardiovasculaires, rénales, hépatiques, des conduites addictives et troubles psychiatriques, de l'existence d'une tuberculose, des perspectives de procréation, de la présence d'une co-infection par le VHC et/ou le VHB et des conséquences potentielles d'un échec sur les options thérapeutiques ultérieures, et des résultats de recherche de l'allèle HLA-B*5701.
L'objectif est d'obtenir une charge virale (CV) plasmatique indétectable (< 50 copies/ml) au plus tard 6 mois après le début du TAR : à M1, la CV doit avoir baissé d'au moins 2 log10 copies/ml, à M3, la CV doit être < 400 copies/ml. Toutefois chez certains patients (CV > 5 log, CD4 très bas), si indétectabilité non obtenue et CV < 200 copies/ml à 6 mois, un délai supplémentaire peut être accordé. L'échec virologique est défini par une CV détectable après 12 mois de TAR.
3
Infection(s) opportuniste(s) nécessitant un traitement spécifique
Le traitement en urgence des infections opportunistes est recommandé, avec une évaluation de l'efficacité et de la tolérance après 2-3 semaines. L'introduction du TAR doit être réalisée dans les 2 semaines après le début du traitement de l'infection opportuniste, ce qui permet de réduire le risque de décès ou de progression de l'infection par le VIH. Ce délai sera différé d'au moins 4 semaines en cas de tuberculose ou de cryptococcose neuroméningée en raison du risque de mortalité lié au syndrome de restauration immunitaire (voir Cas particulier).
4
En cas de cancer associé
Le traitement antirétroviral doit être entrepris sans délai en tenant compte des interactions des antirétroviraux avec la chimiothérapie. Voir paragraphe dédié « TAR et cancer ».
5
Prophylaxie secondaire des infections opportunistes
Il s'agit du traitement d'entretien à posologie réduite de l'infection opportuniste à poursuivre jusqu'à la restauration immunitaire. La prophylaxie primaire et secondaire des infections opportunistes ne peut être interrompue sous antirétroviral que si lymphocytes CD4 > 200/mm3 depuis au moins 3 mois pour la pneumocystose et 6 mois pour la toxoplasmose. Voir rubrique dédiée.
Cas particuliers
VIH et grossesse
Un suivi multidisciplinaire rapproché de grossesse à risque est nécessaire, avec notamment le dépistage du risque d'accouchement prématuré, une évaluation thérapeutique mensuelle (examen clinique, charge virale et bilan biologique de tolérance), ainsi qu'une séance d'hospitalisation de jour pendant la grossesse (voire plusieurs) si la situation sociale, obstétricale, l'observance, et les résultats immunovirologiques le justifient.
Chez une femme traitée, le traitement antirétroviral doit être poursuivi au cours de la grossesse, s'il est bien toléré, sauf s'il existe une contre-indication (exemple : efavirenz et dolutégravir contre-indiqués au 1er trimestre, ANSM, juin 2018), nécessitant de le modifier.
Chez une femme qui ne reçoit pas encore de traitement, celui-ci doit être envisagé le plus tôt possible, quel que soit le terme de la grossesse, pour prévenir la transmission maternofœtale (TME). Le taux de TME du VIH-1 en France métropolitaine est passé de 15-20 % en l'absence de traitement à 0,3 % sur la période 2010-2015, grâce notamment aux TAR. Les médicaments pour lesquels le recul d'utilisation est le plus long et rassurant au plan tératogène et fœtotoxique doivent être privilégiés, en excluant les plus récents (rilpivirine, etravirine, eviltégravir/cobicistat, dolutégravir).
Dans tous les cas, il faut utiliser une trithérapie associant 2 INTI et un IP, en privilégiant soit [l'association abacavir + lamivudine (en l'absence d'allèle HLA-B*5701), ou ténofovir + emtricitabine, ou zidovudine + lamivudine] et [une association IP/r à base de darunavir, ou en alternative atazanavir ou lopinavir].
Pour le darunavir, une posologie de 800/100 mg en 1 prise par jour durant les deux premiers trimestres est recommandée, suivie d'une posologie de 600/100 mg 2 fois par jour au 3e trimestre.
Le raltégravir est une alternative possible, car les données sur un nombre croissant de patientes sont rassurantes, mais les publications portent principalement sur l'utilisation en fin de grossesse.
Prise en charge tardive : à l'approche du terme, le traitement peut être débuté rapidement après le dépistage en informant la patiente, sans attendre les résultats du bilan immunovirologique. Une trithérapie associant deux INTI (citées au-dessus) et darunavir/r est recommandée. L'ajout de raltégravir est proposé pour réduire plus rapidement la charge virale (CV) avant l'accouchement, selon le niveau de CV initiale.
Suivi du traitement antirétroviral pendant la grossesse :
mesure de l'ARN-VIH plasmatique tous les mois pour évaluer l'observance et l'efficacité du traitement ; la charge virale à 34-36 semaines d'aménorrhée permet de décider du mode d'accouchement ;
lymphocytes CD4 une fois par trimestre.
Choix du mode d'accouchement : d'après les recommandations françaises depuis 2015, ce choix est fonction de la charge virale autour de 36 SA :
voie basse lorsqu'elle est < 50 copies/ml,
césarienne programmée à 38-39 SA lorsqu'elle est > 400 copies/ml,
décision au cas par cas lorsqu'elle est entre 50 et 400 copies/ml, en envisageant un renforcement du traitement TAR et un contrôle rapproché.
Une co-infection par le VHC ou le VHB n'est pas une indication de césarienne.
Il est recommandé de réaliser une perfusion de zidovudine si la dernière charge virale disponible est > 50 copies/ml ou en cas de complication obstétricale, telle qu'un accouchement prématuré, une hémorragie ou une chorio-amniotite pendant le travail.
L'allaitement maternel reste strictement contre-indiqué chez les mères séropositives.
VIH et projet de grossesse
La mise en route d'un TAR répond à 3 objectifs : la santé à long terme de la PVVIH, la prévention de la transmission dans le couple et, s'il s'agit d'une femme infectée, la réduction optimale du risque de transmission maternofœtale.
En cas de désir d'enfant, il convient de proposer au couple dont l'un(e) ou les deux personnes vivent avec le VIH et ayant un projet de procréation, une prise en charge préconceptionnelle afin de les informer sur les différentes modalités de conception et leurs risques respectifs, en fonction de leurs conditions de fertilité et de leur histoire VIH ; ils seront orientés vers une aide médicale à la procréation (AMP) en cas d'infertilité. Le TAR sera adapté en choisissant les antirétroviraux autorisés au cours de la grossesse.
VIH, femme et contraception
En l'absence de désir d'enfant chez une femme utilisant une contraception estroprogestative ou un traitement hormonal substitutif, il faut vérifier les interactions potentielles avec les estroprogestatifs oraux dont l'efficacité peut être diminuée par les IP/r et les INNTI, ou la toxicité majorée (risque thrombo-embolique).
VIH et hépatites
Une co-infection par VHC ou VHB est le 1er facteur de comorbidité et de mortalité en dehors du VIH et doit être systématiquement recherchée lors du bilan initial, puis au moins 1 fois par an chez les sujets séronégatifs et tous les 6 mois chez les patients à risque (Hommes ayant des relations Sexuelles avec des Hommes ou HSH et usagers de drogues, en particulier injections en contexte sexuel à haut risque ou « SLAM »).
Il est recommandé de vacciner contre l'hépatite B les patients non immunisés avec un schéma renforcé (double dose M0, M1, M2 et M6), de revacciner les personnes non répondeuses à une 1re vaccination, et de vacciner contre l'hépatite A les patients co-infectés par le VHC ou le VHB.
L'infection par le VHC concerne 16 à 19 % des personnes infectées par le VIH. Les hépatites C aiguës sont fréquentes chez les HSH et les usagers de drogue (nouvelles drogues de synthèse, chemSex, Slam). Chez les patients co-infectés, l'infection par le VIH aggrave l'histoire naturelle et le pronostic de l'hépatite C.
En cas d'hépatite C chronique, il est recommandé d'évaluer l'atteinte hépatique et la fibrose en réalisant des tests non invasifs avec l'utilisation en 1re intention du Fibroscan® en raison de sa performance diagnostique pour le diagnostic de cirrhose et son accessibilité ; et éventuellement un ou plusieurs tests biochimiques (Fibrotest®, Hépascore®, FibroMètre®). En effet, la gravité de la maladie hépatique dépend du degré de fibrose : F0 ou F1, fibrose absente ou minime ; F2, fibrose modérée ; F3, pré-cirrhose ; F4, cirrhose.
En cas de concordance des tests, la biopsie hépatique est inutile ; en cas de discordance ou en cas de comorbidités associées, une biopsie hépatique peut être envisagée. Il est également recommandé de rechercher un carcinome hépatocellulaire et d'éventuelles manifestations extra-hépatiques liées au VHC (cryoglobuline, lymphome B, gammapathie monoclonale, glomérulonéphrite extra-membraneuse, thyroïdite auto-immune).
Les patients cirrhotiques doivent être adressés à un hépatologue pour la prise en charge des complications et au centre de transplantation hépatique avant la 1re décompensation.
Un traitement anti-VHC doit être débuté chez tout patient ayant une hépatite C, quel que soit le degré de fibrose hépatique, qu'il soit naïf de traitement ou en échec de traitement antérieur. Le bénéfice est individuel et collectif. La prise de décision thérapeutique se fera en réunion de concertation pluridisciplinaire. Le traitement sera choisi en fonction des interactions éventuelles avec le traitement antirétroviral. En cas d'interactions attendues, le traitement antirétroviral peut être modifié en privilégiant des molécules n'ayant pas d'interaction significative avec les traitements anti-VHC (rilpivirine, raltégravir ou dolutégravir).
Chez un patient sous antirétroviraux, les indications du traitement de l'hépatite C chronique et les schémas thérapeutiques sont les mêmes que pour un patient VIH négatif. Une attention particulière doit être portée aux interactions médicamenteuses et aux adaptations posologiques. Lire Hépatite C.
En cas d'hépatite C aiguë, il faut rechercher d'autres infections sexuellement transmissibles (IST) fréquemment associées. Le traitement n'est envisagé que si l'ARN VHC n'est pas éliminé spontanément dans les 3 mois suivant le début de l'infection, avec indication pour un traitement précoce dès la 4e semaine selon la cinétique de la charge virale. Le traitement repose sur les mêmes schémas thérapeutiques que ceux utilisés dans le traitement de l'hépatite chronique virale C, en privilégiant les combinaisons pangénotypiques. Il convient de développer une intervention éducative et un soutien social en raison du risque important de recontamination après guérison de l'infection à VHC, essentiellement parmi les HSH, du fait de leurs pratiques à haut risque.
Chez le patient co-infecté par le VHB, il faut rechercher des anticorps anti-delta (12 % des co-infections VIH-VHB).
L'évaluation de l'atteinte hépatique (détermination du degré d'activité nécrotico-inflammatoire et de fibrose) repose moins sur la PBH que sur les tests non invasifs (Fibrotest®, Fibromètre®, Hepascore® et score de Zeng) et élastométrie.
L'échographie hépatique doit être surveillée tous les 6 mois en cas d'hépatite B active (ADN VHB > 2 000 UI/ml), chez les PVVIH de plus de 50 ans ou originaire d'Asie ou d'Afrique sub-saharienne, ainsi qu'en présence d'une cirrhose.
L'objectif du traitement contre le VHB est d'obtenir une négativation de l'AgHBs, rarement observée (< 10 %) ; l'objectif plus réaliste est d'obtenir une suppression efficace et durable de l'ADN VHB et une perte de l'AgHBe (chez les patients AgHBe).
Toute PVVIH porteuse d'AgHBs doit être traitée avec des molécules ayant une activité sur les 2 virus.
L'interféron pégylé n'a pas d'indication chez les PVVIH co-infectés VIH-VHB. Concernant les analogues nucléosidiques, lamivudine, entécavir et emtricitabine doivent être évités en monothérapie. Le ténofovir (analogue nucléotidique) doit être le choix préférentiel pour traiter le VHB. L'utilisation de la seule combinaison disponible contenant du TAF, elvitégravir/cobicistat/emtricitabine/ténofovir alafénamide, est possible pour traiter les PVVIH co-infectées par le VHB.
L'utilisation de l'adéfovir et de la telbivudine, très marginale, nécessite un avis spécialisé.
Un traitement antirétroviral actif contre le VHB ne doit jamais être interrompu sans relai par risque d'un rebond.
La surveillance sous traitement repose sur la charge virale VHB tous les 3 mois jusqu'à ce qu'elle devienne indétectable, puis au moins une fois par an si l'observance est bonne. Une augmentation de plus d'1 log UI/ml doit conduire à rechercher une mauvaise observance et/ou une mutation de résistance.
Chez les patients cirrhotiques, un suivi systématique est effectué comportant une échographie abdominale tous les 3 à 6 mois, un dosage de l'alphafœtoprotéine tous les 6 mois et une fibroscopie œsogastroduodénale (FOGD) tous les 1 à 3 ans selon le stade de la cirrhose et la présence ou non de varices œsophagiennes. Il est également recommandé d'adresser le patient précocement à un centre de transplantation hépatique avant la première décompensation.
Infection par le VIH-2
L'infection par le VIH-2, qui touche principalement des patients originaires d'Afrique centrale et de l'Ouest, représente moins de 1 à 2 % des infections par le VIH en France.
Bien que son évolution naturelle soit habituellement plus lente que celle liée au VIH-1, la moindre fréquence de détectabilité de la charge virale plasmatique (mesure limitée à quelques laboratoires), et sa moindre valeur, ainsi que le nombre limité d'options thérapeutiques (résistance naturelle aux INNTI et à l'enfuvirtide, moindre sensibilité à l'atazanavir, l'amprénavir et au tipranavir), sont des arguments en faveur d'un traitement de tous les patients symptomatiques et d'un traitement précoce des patients asymptomatiques dans les cas suivants :
nombre de lymphocytes CD4 inférieur à 500/mm3,
ou diminution de plus de 30 CD4/an,
charge virale plasmatique détectable (> 1 000 copies/ml),
âge > 40 ans,
existence de comorbidités.
Le traitement associe [2 INTI] + [soit un IP/r (darunavir/ritonavir), soit un inhibiteur de l'intégrase (raltégravir ou dolutégravir)]. Il faut éviter les analogues non nucléosidiques, ainsi que l'enfuvirtide en raison d'une résistance naturelle. Il faut réaliser systématiquement un génotype (RT, protéase, intégrase) avant de débuter un traitement.
Chez les patients asymptomatiques non traités, il est recommandé de mesurer l'ARN VIH-2 plasmatique au début de la prise en charge, puis tous les 6 mois. Chez les patients traités, on préconise une mesure à 1, 3 et 6 mois après l'initiation ou le changement d'un traitement antirétroviral, puis tous les 3 mois (CD4 < 200/mm3), 6 mois (CD4 > 500/mm3), 3-6 mois (CD4 entre 200 et 500/mm3, selon l'observance et les comorbidités). La charge virale doit également être mesurée en début et en cours de grossesse.
Syndrome inflammatoire de restauration immunitaire (IRIS)
Il s'agit de l'apparition de manifestations cliniques inflammatoires inexpliquées après l'introduction d'un traitement antirétroviral efficace. Ce syndrome survient habituellement chez un patient très immunodéprimé, dans les premières semaines suivant l'instauration du traitement antirétroviral. Il révèle soit une infection opportuniste latente, soit la restauration d'une hypersensibilité retardée au cours des infections à mycobactéries et probablement fongiques. Les facteurs de risque sont les CD4 < 50-100/mm3, la dissémination de l'infection opportuniste, le début précoce (< 2-3 semaines) des antirétroviraux après le début du traitement de l'infection opportuniste, la diminution rapide de la CV (> 2,5 log copies/mL) et l'augmentation rapide du pourcentage de CD4 et du rapport CD4/CD8.
Il convient de poursuivre les antirétroviraux, sauf menace du pronostic vital, et de poursuivre ou d'initier le traitement spécifique de l'agent infectieux à l'origine de l'IRIS. En fonction de chaque situation clinique, on peut discuter de l'abstention thérapeutique ou du traitement symptomatique (antalgique, antipyrétique). Une corticothérapie à forte dose (0,5-1 mg/kg/j de prednisone) pour une durée courte (2-6 semaines) est recommandée (bien que non évaluée) dans les IRIS graves liées aux mycobactéries et aux mycoses systémiques (atteinte SNC, détresse respiratoire, etc.). Par contre, les corticoïdes sont délétères et contre-indiqués dans les IRIS liés aux infections virales, sauf situations exceptionnelles (LEMP avec effet de masse, par exemple).
Dépistage d'une infection par le VIH
Un test de dépistage doit être systématiquement proposé en cas de prise de risque sexuel, de diagnostic d'une infection sexuellement transmissible (IST), d'hépatite B ou C, ou de tuberculose, de bilan prénuptial (qui n'est plus obligatoire), de suivi de grossesse ou d'interruption de grossesse, de viol, ainsi qu'en situation de première prescription de contraception. Il doit également être systématiquement proposé au(x) partenaire(s) de la personne concernée.
L'organisation du dépistage de l'infection à VIH en France repose principalement sur l'offre de soins : professionnels de santé exerçant dans les établissements de santé et en médecine de ville, laboratoires d'analyse de biologie médicale publics et privés, structures associatives habilitées par les ARS (qui peuvent réaliser des tests rapides d'orientation diagnostique), les CeGIDD. Les personnes les plus vulnérables, les plus exposées et les plus éloignées définissent les populations clés de la manière suivante : HSH, femmes et hommes hétérosexuels nés en Afrique sub-Saharienne et dans les Territoires français d'Amérique (TFA) et usagers de drogues injectables (UDI).
Quels tests ?
Le diagnostic biologique de l'infection à VIH repose sur une stratégie en deux temps : un dépistage communément appelé test Elisa combiné de 4e génération détectant en même temps les anticorps anti-VIH-1 et 2, et l'antigène p24 du VIH-1, et une confirmation par un test Western blot ou Immunoblot sur le même échantillon. L'affirmation de l'infection par le VIH nécessite de disposer des résultats concordants de deux prélèvements distincts pour éliminer une erreur d'identité. La recherche de l'ARN VIH plasmatique est préconisée dans plusieurs scenarii de confirmation.
Le test de dépistage rapide à orientation diagnostique (TROD) est un test unitaire, à lecture visuelle. Le résultat est disponible en moins de 30 minutes généralement. Certains tests combinent la recherche d'antigène et d'anticorps.
Les autotests de dépistage de l'infection par le VIH (ADVIH) sont des tests rapides, réalisés sur le sang total, destinés à être utilisés dans un environnement domestique par des utilisateurs profanes.
Un TROD ou un ADVIH positif doit être confirmé par diagnostic biologique de l'infection par les VIH 1 et 2. Un résultat négatif ne peut pas être interprété en cas de prise de risque datant de moins de 3 mois.
Les 3 modalités de dépistage (par un professionnel de santé, une association ou à l'initiative de l'individu lui-même) sont jugées complémentaires et doivent toutes être encouragées.
Un dépistage est recommandé :
Au minimum une fois par an chez les HSH, et rapproché tous les trois mois chez ceux à haut risque d'exposition et dans les régions les plus affectées ;
Tous les ans pour les UDI et pour les personnes originaires des pays de forte prévalence ;
Au moins une fois dans la vie entre 15 et 70 ans en population générale ; cette incitation au dépistage est tout particulièrement importante à mettre en œuvre dès qu'une opportunité se présente chez les hommes et dans les régions suivantes : TFA, Ile-de-France, PACA et Auvergne Rhône Alpes.
Structures impliquées dans le dépistage et circonstances : structures associatives, médecins libéraux et spécialistes en dermato-vénéréologie, gynécologie, hépatologie, proctologie et cancérologie, médecine universitaire, médecine du travail, laboratoires d'analyses de biologie médicale, pharmaciens d'officine, médecine pénitentiaire séjours hospitaliers, urgences hospitalières.
Bilans paracliniques
Bilan paraclinique initial d'un adulte infecté par le VIH :
Sérologie VIH?: un test ELISA de 4e génération et un test de confirmation par Western blot avec différenciation VIH1/VIH2.
Numération des populations lymphocytaires T CD4/CD8.
Dosage de l'ARN VIH plasmatique (charge virale VIH).
Test génotypique de résistance du VIH (transcriptase inverse, protéase, intégrase) et détermination du sous-type VIH-1.
Recherche de l'allèle HLA-B*5701.
Hémogramme avec plaquettes.
Transaminases, ?GT, phosphatases alcalines, bilirubine totale et conjuguée.
Créatininémie et estimation du DFG par la méthode MDRD ou CKD-EPI.
Phosphorémie à jeun.
Glycémie à jeun.
Bilan lipidique à jeun : cholestérol total, LDL et HDL, triglycérides.
Recherche d'une protéinurie (bandelette urinaire) ou dosage du rapport protéinurie/créatininurie.
Marqueurs de l'hépatite virale B : Ag HBs, anticorps anti-HBs et anti-HBc.
Sérologie de l'hépatite virale C.
Sérologie de l'hépatite virale A (IgG).
Sérologie de la syphilis.
Sérologie de la toxoplasmose.
Test IGRA (Quantiféron ou T-spot TB) pour le dépistage de la tuberculose latente.
Chez les femmes : consultation gynécologique avec cytologie cervicovaginale.
Chez les HSH, sujets à partenaires multiples et femmes avec ATCD de condylomatose et/ou pathologie cervicale : consultation proctologique pour le dépistage des lésions précancéreuses de l'anus et prélèvements PCR à la recherche d'IST (chlamydia, gonocoque) au niveau anal, urétral et/ou pharyngé selon circonstances.
Chez les patients provenant d'une zone d'endémie tuberculeuse : radio thoracique.
Si CD4 <100/mm3, dosage de l'antigène cryptocoque et sérologie CMV (si positive : PCR CMV et fond d'œil).
Bilans intermédiaires et annuels
Les différents bilans (initial, intermédiaire, annuel de synthèse) d'une PVVIH sous traitement antirétroviral sont détaillés dans les tableaux disponibles dans le rapport « Prise en charge médicale des personnes vivant avec le VIH ». Recommandations du groupe d'experts. Suivi de l'adulte vivant avec le VIH et organisation des soins, avril 2018, pages 13, 19, et 21-23.
Primo-infection par le VIH
Le diagnostic de primo-infection est une urgence virologique et thérapeutique, qui repose sur une charge virale détectable associée à un test ELISA encore négatif, ou un test ELISA positif avec ≤ 5 bandes sur le Western blot. Les tests sérologiques combinés Ag/Ac (dits de 4e génération) peuvent être positifs dès 15 jours après la contamination, grâce à la détection de l'Ag P24 (antigène P24), alors que le Western blot est encore négatif. Les TROD et autotests peuvent être pris en défaut et être négatifs en primo-infection.
Le patient doit être informé du risque élevé de transmission du VIH au moment de la primo-infection.
Un test génotypique de résistance (étudiant les gènes de la transcriptase inverse, protéase et intégrase) doit être prescrit dès le diagnostic afin d'adapter secondairement le traitement antirétroviral.
Il convient de rechercher d'autres IST (gonocoque, chlamydia, syphilis), une infection par le VHC ou par le VHB.
Les objectifs du traitement sont : cliniques (réduction de la durée et de l'intensité des symptômes), virologiques (obtention d'une CV indétectable à M6 et une baisse rapide des réservoirs sanguins circulants (l'indétectabilité peut être retardée jusqu'à M12 en cas de CV initiale élevée), immunologiques (maintien ou restauration d'un nombre élevé de lymphocytes CD4 et un rapport CD4/CD8 > 1), épidémiologiques (réduction de la transmission sexuelle).
Il est recommandé de démarrer rapidement (au mieux dans les 24-48 heures et sans attendre le génotypage ou le HLA-B*5701) le traitement antirétroviral pour toute primo-infection à VIH-1, dès le diagnostic de primo-infection à VIH-1 établi, indépendamment de la présence de symptômes, des niveaux de CD4 et de charge virale, l'objectif étant de limiter la constitution des réservoirs cellulaires et tissulaires.
Une trithérapie antirétrovirale est recommandée, comportant [ténofovir disoproxyl fumarate + emtricitabine] + [un IP/r (en particulier le darunavir 800 mg, boosté par le ritonavir), ou un inhibiteur de l'intégrase (dolutégravir grâce à sa barrière génétique et sa bonne diffusion dans les différents compartiments génitaux, digestif et LCR)], en adaptant le traitement, si besoin, à la clairance rénale.
Chez une femme enceinte, le traitement repose sur [l'association ténofovir disoproxyl fumarate + emtricitabine] + [darunavir boosté par le ritonavir (600 mg/100 2 fois/jour), ou en cas d'intolérance au darunavir, + raltégravir]. Pour rappel, le dolutégravir est contre indiqué chez la femme enceinte.
Le traitement antirétroviral sera adapté dès l'obtention des résultats du génotypage. On observe globalement en France une stabilité de la prévalence des virus résistants chez les patients au stade de primo-infection ou chroniquement infectés et non traités, de 9,3 % globalement et 4,3 % pour les INTIs ; 8,4 % pour les INNTIs ; 2,4 % pour les IP ; 6 % de résistance à la rilpivirine et/ou à l'étravirine ; et 2,7 % aux anti-intégrases.
Le traitement sera accompagné d'une éducation thérapeutique et d'un soutien psychologique. Il est recommandé de poursuivre le traitement, sans l'interrompre à distance de la primo-infection, comme dans l'infection chronique.
Prophylaxie et traitement des infections opportunistes
Prophylaxie primaire :
En cas de CD4 < 200/mm3, la prophylaxie primaire de la pneumocystose et de la toxoplasmose est systématique et fait appel au sulfaméthoxazole-triméthoprime (actif sur Pneumocystis carinii et Toxoplasma gondii). En cas d'allergie : associer pyriméthamine + disulone ou atovaquone. En cas d'intolérance : insister sur les conseils hygiénodiététiques. En cas de sérologie négative de toxoplasmose : bien cuire la viande, laver les fruits et les légumes, éviter le contact avec les chats et leur litière et contrôler la sérologie tous les 3 mois.
La prophylaxie primaire des infections à mycobactéries atypiques par azithromycine si le taux de CD4 < 75/mm3 n'est plus recommandée.
Prophylaxie secondaire :
Prophylaxie secondaire (thérapie suppressive après une infection manifeste) :
Pneumocystose et toxoplasmose : elle est identique à la prophylaxie primaire.
Cryptococcose : fluconazole. En cas d'impossibilité, itraconazole ou voriconazole. Voriconazole si résistance au fluconazole.
Mycobacterium avium complex (MAC) : clarithromycine + éthambutol ± rifabutine.
Cytomégalovirus (rétinites) : valganciclovir.
Traitements
Les traitements de la pneumocystose, de la toxoplasmose cérébrale, de la tuberculose, des infections à Mycobacterium avium, des infections à CMV, de la cryptococcose neuroméningée, des candidoses digestives, de la leishmaniose viscérale, des parasitoses intestinales, de l'infection herpétique et de la syphilis figurent plus loin, dans la rubrique Médicaments cités dans les références.
Vaccinations
Les vaccins vivants atténués sont soit formellement contre indiqués (BCG), soit utilisables à la condition que les CD4 soient supérieurs à 200 mm3 (fièvre jaune, rougeole).
Le BCG (vaccin vivant atténué) est strictement contre-indiqué en raison du risque de bécégite locorégionale ou généralisée.
Le vaccin contre la fièvre jaune (vaccin vivant atténué) est déconseillé si CD4 < 200/mm3 (risque d'encéphalite post-vaccinale). Dans le cas où la vaccination a été faite, la durée de protection contre la fièvre jaune est désormais considérée acquise pour la vie et aucun rappel ne sera effectué (OMS).
Vaccination contre la rougeole (vaccin vivant atténué) : en raison de l'épidémie de rougeole évoluant depuis 2008 en France, les adultes infectés par le VIH doivent bénéficier d'une sérologie de la rougeole (+/- BHCG) et, en cas de sérologie négative, de 2 injections de ROR à 1 mois d'intervalle si les CD4 sont supérieurs à 200/mm3 (immunogénicité faible si CD4 < 200/mm3).
Pour la vaccination contre la varicelle (vaccin vivant atténué), une sérologie VZV doit être effectuée chez les patients vivant avec le VIH n'ayant pas d'antécédent de varicelle. Chez les patients non immunisés, si le taux de CD4 est > 200/mm3 et en l'absence de grossesse, 2 injections de vaccin varicelle sont recommandées à un mois d'intervalle ; si les CD4 sont < 200/mm3, le vaccin est contre-indiqué et les immunoglobulines spécifiques pourront être proposées en cas d'exposition à un cas de varicelle. En cas d'exposition à la varicelle, la vaccination peut être réalisée chez le patient non immunisé dans les 3 jours suivant l'exposition, à condition que les CD4 soient > 200/mm3.
Une meilleure réponse vaccinale associée à une restauration immunitaire ayant été observées sous antirétroviraux, il est recommandé, avant de vacciner, d'attendre que le taux de CD4 soit > 200/mm3 et que la CV soit contrôlée.
Les vaccinations contre le tétanos, la diphtérie, l'hépatite B et l'hépatite A chez les sujets non immunisés, ainsi que les vaccinations contre le pneumocoque et la grippe, sont recommandées.
La vaccination contre l'hépatite B est recommandée chez tous les sujets sans marqueur du VHB (AgHBs, anticorps anti-HBs et anti-HBc négatifs). La réponse au schéma vaccinal standard (3 doses IM) étant moins bonne chez les patients VIH, un schéma vaccinal renforcé est proposé (4 doubles doses IM de 40 µg administrées à M0, M1, M2 et M6) avec contrôle du titre des AC antiHBs 1 à 2 mois après la dernière injection (possibilité de 3 injections supplémentaires). Un contrôle sérologique annuel est recommandé afin de proposer une dose de rappel en cas de titre d'anticorps anti-HBs < 10 mU/ml.
La vaccination contre l'hépatite A est recommandée chez les patients non immunisés : 1 dose, puis une 2e dose 6 mois après la première.
La vaccination contre le pneumocoque est recommandée chez tous les PPVIH , l'incidence des infections pulmonaires ou invasives à pneumocoque étant supérieure à celle de la population générale : 1 dose de vaccin pneumococcique conjugué 13-valent suivie d'1 dose de vaccin pneumococcique polyosidique 23-valent 2 mois plus tard, au plus tard 1 an après.
La vaccination contre le méningocoque C peut-être rattrapée jusqu'à l'âge de 24 ans. Après 24 ans, elle est recommandée chez les hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes (HSH) et les personnes fréquentant des lieux de convivialité et de rencontre gay.
La vaccination antigrippale annuelle (vaccin inactivé) est recommandée chez tous les PVVIH.
La vaccination HPV est recommandée à l'âge de 11 ans et en rattrapage jusqu'à 19 ans révolus, selon un schéma à trois doses (0, 2, 6 mois) en fonction de l'AMM des vaccins GARDASIL, GARDASIL 9, à la fois chez les jeunes filles et garçons, ainsi que pour les HSH jusqu'à l'âge de 26 ans.
La vaccination contre la COVID-19 est recommandée :
Le schéma primo-vaccination comporte deux doses pour les vaccins à ARN (quel que soit le vaccin utilisé, en respectant un espacement entre deux injections de 3-7 semaines pour COMIRNATY et 28 jours pour SPIKEVAX. Un schéma de primo-vaccination monodose est valide en cas d'infection avant ou 15 jours au plus après la première injection (stimulation antigénique équivalente à l'injection d'une seconde dose de vaccin). Pour le NUVAXOVID (vaccin sous unitaire recombinant) utilisable uniquement chez les patients refusant un vaccin à ARN, le schéma de primovaccination comporte deux doses à 21 jours d'intervalle (18-28).
Rappels : une dose est recommandée 3 mois après la 2e dose, et 3 mois (immunodépression sévère) ou 6 mois après le 1er rappel. Le 2e rappel doit être effectué avec un vaccin à ARNm monovalent ou bivalent. Le NUVAXOVID peut être utilisé pour les rappels, de même que le VIDPREVTYN BETA qui a été récemment commercialisé (HAS, décembre 2022). En cas de COVID-19 survenu entre la dernière injection et la date prévue du rappel, un délai minimal de trois mois après l'infection est nécessaire. Pour les PVVIH éligibles à un 2e rappel 6 mois après le premier, en cas de COVID-19 intercurrent, le 2e rappel avec un vaccin à ARNm monovalent ou bivalent est recommandé?, dès 3 mois après l'infection, en respectant un délai minimal de 6 mois après l'injection.
Prévention de l'infection par le VIH
1. Prévention de la contamination
La prévention reste de la responsabilité de chacun quelle que soit sa situation vis-à-vis du VIH.
Elle relève d'une association de méthodes de prévention comportementales (utilisation des préservatifs, stratégies de choix des partenaires et des pratiques sexuelles), de stratégies de dépistage, et du traitement antirétroviral (précoce pour toutes les personnes séropositives, pour les personnes séronégatives en post exposition et parfois en pré-exposition).
Les politiques de dépistage doivent être développées pour augmenter la proportion de personnes séropositives prises en charge, traitées par antirétroviraux, seul moyen d'infléchir la progression de l'épidémie en France.
2. Traitement prophylactique post-exposition : TPE (ou PEP)
Le TPE a une efficacité préventive certaine. Il s'applique aux suites d'accidents d'exposition au sang ou d'exposition sexuelle (AES). Ce traitement est d'autant plus efficace que son délai d'initiation est court. Il faut s'efforcer de le débuter dans les quatre premières heures qui suivent l'exposition et au plus tard jusqu'à 48 heures. Le choix du traitement se fera au cas par cas, et le recours à un médecin référent pour le VIH s'impose.
Le rapport Morlat 2018 préconise de prescrire chez l'adulte une trithérapie, le choix préférentiel (sauf en cas de grossesse) étant : l'association ténofovir disoproxil (TDF)-emtricitabine-rilpivirine compte tenu de sa bonne tolérance, sa simplicité de prise, du faible risque d'interactions médicamenteuses et de son plus faible coût en comparaison aux combinaisons à base d'IP ou d'INI. Il faut informer le patient de la nécessité de prendre la rilpivirine avec des aliments, et tenir compte du risque d'interaction avec les inhibiteurs de la pompe à protons et les anti-H2.
Les choix alternatifs sont :
soit l'association [ténofovir TDF-emtricitabine] + [darunavir/r ou raltégravir],
soit la co-formulation ténofovir TDF + emtricitabine + elvitégravir/c,
chez une femme enceinte ou susceptible de l'être, l'association ténofovir TDF-emtricitabine avec darunavir/r est recommandée. La posologie de darunavir/r est de 800/100 mg une fois/jour si le traitement prophylactique post-exposition est prescrit au cours du premier semestre de la grossesse et de 600/100 mg deux fois par jour au cours du dernier trimestre.
Il est inutile de prescrire un traitement prophylactique post-exposition au-delà de 48 heures après l'AES.
La durée du traitement post-exposition est de 4 semaines.
Un bilan est nécessaire à l'initiation du traitement, comportant des sérologies initiales, la NFS, la fonction rénale, le bilan hépatique et un éventuel test de grossesse. Ultérieurement seront réalisés, pendant le traitement, une évaluation de la tolérance et un bilan sanguin, recommandés vers J14 et à la fin du traitement à J28.
3. Traitement prophylactique pré-exposition : PrEP
L'association fixe ténofovir disoproxyl fumarate-emtricitabine, associée à des pratiques sexuelles à moindre risque, a une AMM dans la prophylaxie pré-exposition pour réduire le risque d'infection par le VIH-1 par voie sexuelle, à partir de 12 ans chez les sujets à haut risque de contamination. Les stratégies de prévention comportent une information détaillée sur la transmission du VIH et ses méthodes de prévention, la promotion de l'usage de préservatifs, le recours au dépistage régulier du VIH et des autres infections sexuellement transmissibles qui peuvent faciliter l'acquisition du VIH, la connaissance de la sérologie VIH du/des partenaire(s), ANSM, novembre 2019.
La prescription, initialement réservée aux médecins hospitaliers ou exerçant en CeGIDD (centres gratuits d'information, de dépistage et de diagnostic des infections par le virus de l'immunodéficience humaine, les hépatites virales et les infections sexuellement transmissibles), est autorisée depuis le 1er juin 2021 à tout médecin. Le traitement est remboursable à 100 % par la Sécurité sociale pour les patients de 15 ans et plus. L'ouverture de la primo-prescription de la PrEP VIH à tous les médecins s'accompagne d'une proposition de formation (FormaPrEP) en libre accès et inscrite comme une action du développement professionnel continu (DPC).
Deux schémas sont possibles, selon le profil et les besoins du patient :
un schéma continu : 1 cp par jour ;
un schéma discontinu (hors AMM) : 1re prise de 2 comprimés à prendre en même temps entre 2 h et 24 h avant le rapport sexuel ; 2e prise de 1 comprimé à prendre environ 24 h (± 2 h) après la 1re prise ; 3e prise de 1 comprimé à prendre environ 24 h (± 2 h) après la 2e prise. En cas de rapports répétés, poursuivre avec 1 comprimé par jour jusqu'à 2 jours après le dernier rapport sexuel (« La prophylaxie pré-exposition (PrEP) au VIH par TRUVADA », HAS, avril 2019). Le schéma discontinu ne doit pas être utilisé chez les hommes infectés par le virus de l'hépatite B et n'a été étudié que chez des hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes.
La PrEP ne protège pas contre les autres IST et doit donc être associée au port du préservatif. Un suivi régulier, incluant un dépistage du VIH au minimum tous les trois mois et une surveillance de la fonction rénale, est indispensable. Chez les adolescents, un suivi rapproché (idéalement tous les mois) doit être mis en place en raison de problèmes d'observance plus fréquents que chez l'adulte. Il devra être proposé, selon le calendrier vaccinal, les vaccins contre les infections à VHB, le virus de l'hépatite A et le papillomavirus.
Considérant que le préservatif reste l'outil de prévention le plus efficace contre l'infection par le VIH et les autres IST, que l'efficacité de l'association fixe ténofovir disoproxyl fumarate-emtricitabine est démontrée mais partielle, dépendante de l'observance (réduction relative du risque de 44 à 86 % selon les études), qu'elle expose des personnes non malades à une toxicité, notamment rénale et osseuse, la HAS estime que l'association fixe ténofovir disoproxyl fumarate-emtricitabine peut être prescrite aux sujets à haut risque d'acquisition du VIH par voie sexuelle ayant choisi de recourir à la prophylaxie pré-exposition, lorsqu'elle apparaît indispensable pour réduire la transmission du VIH.
Les personnes à haut risque sont :
1) Les hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes ou personnes transgenres et au moins l'un des critères suivants :
rapports sexuels anaux non protégés avec au moins 2 partenaires sexuels différents dans les 6 derniers mois ;
épisodes d'infections sexuellement transmissibles (IST) dans les 12 derniers mois (syphilis, gonococcie, infection à chlamydia, primo-infection hépatite B ou hépatite C) ;
recours répété à la prophylaxie post-exposition (PEP) dans les 12 derniers mois ;
usage de drogues psycho-actives (cocaïne, GHB, MDMA, méphédrone) lors des rapports sexuels (chemsex).
2) Autres personnes en situation à haut risque d'acquisition de l'infection par le VIH chez lesquelles une PrEP peut être envisagée au cas par cas :
travailleurs du sexe (TDS)/prostitués avec rapports sexuels non protégés ;
sujet en situation de vulnérabilité exposant à des rapports sexuels non protégés avec des personnes appartenant à un groupe à prévalence du VIH élevée ;
sujet originaire de région à forte prévalence pour le VIH ;
sujet ayant des partenaires sexuels multiples ;
sujet usager de drogues injectables ;
sujet ayant des rapports non protégés avec des personnes ayant des facteurs physiques augmentant le risque de transmission de l'infection par le VIH chez la personne exposée : ulcération génitale ou anale, IST associée, saignement ;
autre situation jugée à haut risque d'acquisition du VIH par voie sexuelle.
Suivi et adaptation du traitement
Objectifs fixés par la stratégie nationale de santé
Dans le cadre de la lutte contre l'épidémie du VIH, les objectifs fixés d'ici 2030 sont 95-95-95, à savoir 95 % des PVVIH diagnostiquées, 95 % des personnes diagnostiquées sous traitement antirétroviral et 95 % des personnes sous traitement antirétroviral avec une charge virale contrôlée.
Surveillance des PVVIH sous traitement antirétroviral
Au cours des premiers mois, la surveillance est focalisée sur l'efficacité, la tolérance et l'observance du traitement antirétroviral, jusqu'au succès virologique.
Une consultation précoce 8 à 15 jours après l'initiation du traitement est systématique pour vérifier la tolérance, la bonne compréhension du schéma thérapeutique, renouveler les conseils et détecter les difficultés d'observance. La fréquence des consultations ultérieures est fonction de l'état clinique du patient et des difficultés qu'il rencontre avec le traitement (effets indésirables, observance). Il est recommandé de proposer une consultation à 1 mois, puis tous les 3 mois la 1re année, puis, en cas de succès virologique et de bonne tolérance, 3 à 4 fois par an, voire semestriellement si les CD4 > 500/mm3, consultations intercalées avec un bilan annuel de synthèse hospitalière. La surveillance virologique (dosage de la CV) et immunologique (dosage des CD4) doit être réalisée tous les mois puis tous les 3 mois. L'absence d'indétectabilité à 6 mois lors d'un 1er traitement antirétroviral témoigne presque toujours d'une mauvaise observance, parfois d'interactions médicamenteuses, rarement d'un sous-dosage, qui doivent être recherchés et corrigés sans délai.
Des contacts intermédiaires à J15 et M2 (téléphoniques ou en consultation, voire consultation infirmière) pourront être proposés selon les situations individuelles. Ce suivi peut être alterné entre médecin traitant et médecin hospitalier. Des consultations d'observance et d'éducation thérapeutique doivent être systématiquement mises en place et poursuivies en fonction des résultats viro-immunologiques.
Les bilans intermédiaires et annuels figurent dans le rapport « Prise en charge médicale des personnes vivant avec le VIH. Recommandations du groupe d'experts. Suivi de l'adulte vivant avec le VIH et organisation des soins », avril 2018, pages 13, 19 et 21-23.
La surveillance initiale et au long cours (outre le maintien de la réponse immuno-virologique) est centrée sur :
Le dépistage et la prise en charge des co-infections (hépatites B et C, IST), des facteurs de risque (tabagisme, alcoolisme, toxiques, addictions), des comorbidités (troubles métaboliques, hypertension artérielle, maladie cardiovasculaire), des troubles psychologiques et psychiatriques.
Le dépistage et la correction : d'une éventuelle iatrogénie des ARV sur les fonctions hématologiques, rénales, hépatiques ; d'un échec clinique ou virologique et de son analyse en particulier grâce aux dosages (concentrations résiduelles plasmatiques des IP et/ou des INNT) dont les les résultats sont interprétés de manière collégiale en cas d'échecGrade A ; d'interactions médicamenteusesGrade B, d'insuffisance hépatique ou de co-infection par le VHC ou VHBGrade B, chez l'enfantGrade B et la femme enceinteGrade C, d'effets neuropsychiatriques (céphalées, insomnie, vertiges, rêves anormaux, et plus rarement troubles de l'humeur, anxiété, voire idées ou comportements suicidaires) rapportés avec les inhibiteurs d'intégrase, ce qui doit conduire à les utiliser avec prudence en cas d'antécédent de dépression ou de maladie psychiatrique.
La créatinine et la protéinurie doivent être tout particulièrement surveillées en cas de traitement par ténofovir.
Les modifications éventuelles du traitement ARV dans les situations suivantes :
En cas d'échec virologique (lié essentiellement à des problèmes d'observance et de pharmacocinétique), le traitement doit être modifié rapidement, en se basant sur les données du test génotypique de résistance (étudiant les gènes de la transcriptase inverse, protéase et intégrase), en s'assurant que le patient était sous traitement antirétroviral au moment du prélèvement.Grade A Le choix du traitement de relais doit être réalisé le plus souvent possible lors d'une réunion de concertation multidisciplinaire associant cliniciens, virologues et pharmacologues.
En cas d'effets indésirables graves (hypersensibilité, insuffisance rénale, atteinte hépatique) ou d'effets indésirables pouvant à terme entraîner une gêne significative pour le patient ou une mauvaise observance (troubles digestifs, troubles du sommeil, dépression, dyslipidémie, événement cardiovasculaire).
Chez les patients en succès virologique depuis plus de 6 mois par le traitement initial (2 INTI + 1 IP/r ou 2 INTI + 1 INNTI), une optimisation du traitement peut être proposée dans le but d'améliorer sa qualité de vie, de diminuer la toxicité potentielle au long cours d'une molécule (IP) et de favoriser l'observance sur le long terme, par exemple par une combinaison fixe en une prise par jour.
Synthèse annuelle : une synthèse au moins annuelle avec un médecin hospitalier spécialiste est indispensable, au cours de laquelle les bilans réalisés seront adaptés à l'âge, le sexe, et les facteurs de risque.
Dépistage et suivi des complications
Complications associées au VIH et aux traitements antirétroviraux
La survie prolongée des patients infectés par le VIH impose l'évaluation régulière des comorbidités, avec synthèse annuelle dans une structure spécialisée pour un bilan adapté aux différents risques. Les complications cardiovasculaires, métaboliques, hépatiques, rénales, osseuses, neurologiques, tumorales sont plus fréquentes chez les patients infectés par le VIH que dans la population générale. Le tabagisme, plus fréquent chez les patients VIH, est un facteur de risque important. L'infection VIH semble accélérer le vieillissement : l'activation immune persistante, même lorsque la charge virale est contrôlée, et l'inflammation chronique, sont considérées comme des facteurs favorisant la plupart des complications.
Risque cardiovasculaire
Dyslipidémies
Les maladies cardiovasculaires constituent la 3e cause de décès des patients infectés par le VIH.
Une prise en charge pluridisciplinaire des facteurs de risque cardiovasculaire (âge, antécédents familiaux de maladie coronaire précoce, tabagisme, HTA, diabète de type 2, dyslipidémie) doit être organisée chez toutes les PVVIH, avec un bilan annuel de synthèse chez les PPVIH à risque. La stratification du risque doit se baser sur le calcul du risque de Framingham à 10 ans. L'outil « SCORE » (Systematic Coronary Risk Estimation) évalue le risque de mortalité cardiovasculaire à 10 ans, en fonction du sexe, de l'âge (de 40 à 65 ans), du statut tabagique, de la pression artérielle systolique et des concentrations de cholestérol total.
Le dépistage de la dyslipidémie (seuil LDL-cholestérol > 1,6  g/l, diminution du HDL-cholestérol < 0,40 g/l et hypertriglycéridémie > 1,5 g) doit conduire à une prévention active hygiénodiététique et/ou médicamenteuse.
L'objectif de LDL cholestérol doit être < 1,9 g/L si risque faible (SCORE < 1 %), < 1,3 g/L si risque modéré (SCORE entre 1-5 %, < 1,0 g/L si risque élevé (SCORE 5-10 %), < 0,7 g/L si risque très élevé (SCORE > 10 %).
La modification du traitement antirétroviral peut comprendre la substitution de l'IP/r au profit d'un INNTI comme la névirapine, l'étravirine ou la rilpivirine, ou plus récemment au profit du raltégravir et du maraviroc, qui améliorent le profil lipidique. En revanche, on observe une augmentation significativement plus importante des paramètres lipidiques (cholestérol total, LDL, HDL et TG) sous ténofovir alafénamide que sous ténofovir disoproxil fumarate. Les statines sont le traitement de référence pour abaisser le LDL-cholestérol, mais seule l'utilisation de statines non métabolisées par le cytochrome P450 ou CYP 3A4 est recommandée : pravastatine et rosuvastatine. En cas de risque cardiovasculaire élevé, de l'aspirine à faible dose (75 à 325 mg par jour) associée à une statine est recommandée. Lire Risque cardiovasculaire : évaluation et prévention.
En cas d'hypertriglycéridémie sévère (> 10 g/L) et persistante, exposant au risque d'ostéonécrose et de pancréatite aiguë, les mesures diététiques doivent être drastiques et un traitement par fibrates est justifié.
Dans tous les cas, encourager l'activité physique (au moins 1 heure 3 fois par semaine) et le sevrage tabagique (utilisation de substituts nicotiniques, buproprion, varénicline), surveiller le poids, limiter la consommation de boissons alcoolisées et les apports glucidolipidiques, surtout s'il existe une hypertriglycéridémie.
Hypertension artérielle
L'objectif thérapeutique est une pression artérielle (PA) < 140/90 mmHg chez tous et une PA < 130/80 en cas de risque cardiovasculaire élevé. Le bilan d'une HTA (recherche de l'atteinte d'un organe cible) est une priorité et s'effectue lors du bilan initial et au cours du suivi annuel du patient hypertendu. Une HTA compliquée impose un contrôle tensionnel strict, un suivi cardiologique, un traitement selon les recommandations pour la population générale avec mesures d'hygiène de vie (restriction sodée et contrôle des autres facteurs de risque cardiovasculaire), initiation d'une bithérapie médicamenteuse si les mesures hygiéno-diététiques ne sont pas suffisantes.
Diabète
L'incidence reste élevée chez les PVVIH vieillissantes. Les principaux facteurs de risque sont ceux retrouvés dans la population générale. La lipodystrophie est associée à un risque accru de diabète. Certains antirétroviraux peu/plus utilisés majorent le risque de diabète (IP de première génération, D4T, DDI, ZDV). Il n'a pas été retrouvé d'association entre le risque de diabète et le ténofovir ou les molécules de dernière génération.
Le traitement comporte toujours une prise en charge hygiénodiététique.
Le recours à des antirétroviraux récents (rilpivirine, inhibiteurs d'intégrase) dont le profil métabolique est plus favorable que celui de l'efavirenz ou des IP/r pourrait être proposé. La metformine doit être utilisée en 1re intention, en débutant à dose faible et en évaluant la tolérance digestive.
Syndrome métabolique
Le syndrome d'insulinorésistance ou syndrome métabolique, situation à haut risque de diabète mais aussi de maladie cardiovasculaire et de stéatose hépatique, est défini par l'association d'au moins 3 éléments clinico-biologiques parmi l'obésité abdominale, l'augmentation de la pression artérielle, l'hyperglycémie, l'hypertriglycéridémie et le HDL-cholestérol bas.
La prise en charge repose sur l'éducation hygiéno-diététique, l'arrêt du tabac, le traitement de l'hypertension si besoin, la modification du traitement antirétroviral en favorisant les molécules dont le profil métabolique est plus favorable.
Lipodystrophie
La modification de la répartition du tissu adipeux corporel atteint 17 % des patients traités depuis plus de 6 ans, et est associée aux troubles métaboliques glucidiques et lipidiques et à une augmentation du risque cardiovasculaire.
La prise en charge repose sur les règles hygiénodiététiques et l'exercice physique régulier, indispensables, l'adaptation thérapeutique (éviction de la stavudine et de la zidovudine, utilisation d'antirétroviraux autres que les IP et l'efavirenz moins délétères au plan métabolique, recours à la rilpivirine, ou un inhibiteur d'intégrase comme 3e agent (lipohypertrophie).
Les interventions réparatrices dans la lipoatrophie peuvent être proposées : produits de comblement injectables résorbables (New-Fill®, Restylane SubQ®, Radiesse®), chirurgie au niveau du visage par autogreffe de tissus adipeux ou lipostructure par la technique de Coleman, remodelage par une technique de lipoaspiration, en cas d'accumulation de graisse au niveau cervical, mammaire ou abdominal importante et invalidante.
Prise en charge des complications osseuses
Ostéoporose
On note une accélération de la dégradation osseuse chez les PVVIH (effet des traitements et de l'infection elle-même) chez qui le risque d'ostéoporose est 6 fois plus élevé que dans la population saine. La prévalence de l'ostéoporose chez les PVVIH varie de 3 à 22 % (42 % chez les femmes), justifiant un dépistage ciblé par ostéodensitométrie en cas de facteurs de risque classiques ainsi que chez les hommes infectés par le VIH âgés de plus de 60 ans, et de moins de 60 ans s'ils ont un IMC bas ou un nadir de CD4 < 200/mm3. En présence d'une ostéoporose, il convient de rechercher une étiologie qui nécessiterait un traitement spécifique (carence en vitamine D, hyperparathyroïdie, autre endocrinopathie).
Une carence en vitamine D doit être compensée et des conseils alimentaires doivent être privilégiés en cas de carence d'apport calcique. Le traitement repose le plus souvent sur la classe des bisphosphonates (alendronate ou risédronate, en respectant les modalités de prise et en prévenant le patient des effets digestifs possibles).
Chez les patients ayant des antécédents de fracture sévère et/ou à risque élevé de chute et/ou un T-score < 2,5 à l'ostéodensitométrie, il est recommandé de modifier le traitement antirétroviral avec remplacement du ténofovir disoproxil par le ténofovir alafénamide dans le cadre de l'association fixe EVG/c/FTC/TAF ou par l'abacavir si HLA-B*5701 négatif et en l'absence d'infection par le VHB, ainsi que de remplacer l'IP/r par dolutégravir ± rilpivirine lorsque c'est possible.
Ostéonécrose aseptique (ONA)
La prise de corticoïdes, l'alcoolisme et le tabagisme représentent des facteurs de risque importants, ainsi que les antécédents de Sida, le nadir bas de lymphocytes CD4 et la durée d'exposition aux antirétroviraux. Une plus grande vigilance doit être exercée chez les patients avec hypertriglycéridémie importante et/ou exposés aux corticoïdes. En cas de suspicion clinique, l'IRM confirme le diagnostic. La scintigraphie dépiste des formes multifocales. La prise en charge de l'ONA chez les PVVIH n'a pas de spécificité par rapport à celle de l'ONA en population générale.
Prise en charge des complications rénales
Atteinte rénale
Le vieillissement de la population atteinte par le VIH et la toxicité potentielle de certains médicaments (risque de tubulopathie avec le ténofovir, syndrome de Fanconi) augmentent les risques d'atteinte rénale. Les principaux facteurs de risque de maladie rénale sont l'âge > 50 ans, le sexe féminin, l'origine ethnique (africaine ou antillaise), les co-infections VHB/VHC, l'HTA, le diabète, la dyslipidémie, un taux de CD4 < 200/mm3 et l'exposition à l'atazanavir, au darunavir et au ténofovir. Une surveillance toute particulière est recommandée chez ces patients, avec mesure du débit de filtration glomérulaire et recherche de protéinurie sur échantillon urinaire (plus sensible que la bandelette) au minimum tous les 6 mois. En cas de néphropathie liée au VIH (HIVAN), l'introduction d'un traitement antirétroviral permet d'améliorer significativement le pronostic de la maladie rénale.
Le groupe d'experts recommande d'explorer toute anomalie rénale et de surveiller la fonction rénale après toute introduction d'antirétroviral, pour différencier :
les situations avec élévation rapide mais limitée de la créatininémie liée à une diminution de la sécrétion tubulaire de créatinine (+ 10-12 µmol/L à M1 stable à M3), observées avec dolutégravir, rilpivirine, elvitégravir, cobicistat et IP/c ;
les altérations progressives de la fonction rénale liées soit à une toxicité des antirétroviraux (ténofovir, atazanavir, lopinavir), soit à la survenue d'une comorbidité rénale liée ou non au VIH, soit à la co-prescription d'un autre médicament néphrotoxique.
Il est recommandé d'adapter le traitement antirétroviral en cas d'insuffisance rénale en considérant les options suivantes :
quand le DFG est compris entre 50 et 30 ml/min, réduire la dose de ténofovir disoproxil ou envisager le remplacement du ténofovir disoproxil par le ténofovir alafénamide si la prescription de l'association fixe EVG/c/FTC/TAF (seule forme galénique comportant du ténofovir alafénamide mise à disposition en France en mai 2017) est adaptée à la situation du patient, ou par l'abacavir en l'absence d'infection par le VHB et si l'allèle HLA-B*5701 est négatif ;
envisager le remplacement du traitement en cours par une association sans INTI, par exemple dolutégravir + rilpivirine lorsque c'est possible (notamment en l'absence d'infection par le VHB) ;
arrêter le ténofovir disoproxil et le ténofovir alafénamide si le DFG est < 30 ml/min ;
arrêter les IP/r en cas de diminution persistante et non expliquée du DFG ;
ne pas oublier d'adapter la dose de la lamivudine et de l'emtricitabine en fonction du DFG.
Lithiase : l'atazanavir est l'antirétroviral le plus inducteur de lithiase. Un bilan doit être réalisé dès le premier épisode. Si l'origine médicamenteuse est confirmée, l'atazanavir doit être arrêté, et sa prescription discutée quelle que soit l'origine de la lithiase.
Transplantation rénale et VIH : la transplantation rénale doit être envisagée chez les patients dialysés suivis régulièrement ayant une infection virale contrôlée et un niveau de CD4 > 200/mm3. Ces patients doivent être inscrits sur liste de greffe.
Risque hépatique
Les hépatopathies étaient en 2010 la 3e cause de mortalité chez les PVVIH, la co-infection VHB ou VHC impliquée dans 96 % des décès, associée dans 37 % à la consommation excessive d'alcool. Les PVVIH présentent un risque important de stéatose (30-40 %).
Atteintes précoces (premières semaines de traitement) :
Il peut s'agir d'une hépatite de type immuno-allergique ± syndrome d'hypersensibilité, ou d'une toxicité mitochondriale ou d'une toxicité directe, ou d'un syndrome de restauration immunitaire avec atteinte hépatique. Acidose lactique, signes d'hypersensibilité, ictère à bilirubine conjuguée, insuffisance hépatocellulaire avec une baisse du taux de prothrombine et du facteur V et/ou augmentation des transaminases de grade 4 imposent l'arrêt du traitement.
Atteintes tardives métaboliques : stéatose et stéatohépatite
Stéatose et stéatohépatite sont multifactorielles : impact direct de certains antirétroviraux (toxicité mitochondriale), perturbations du métabolisme glucido-lipidique, syndrome métabolique, insulinorésistance.
La recherche d'une stéatose est recommandée chez les PVVIH présentant des troubles métaboliques ou une élévation inexpliquée des transaminases ; l'IRM est un examen plus sensible.
Le respect des règles hygiénodiététiques (exercice physique régulier, arrêt de l'alcool, régime équilibré et hypocalorique en cas de surpoids) est recommandé.
Risque pulmonaire
Bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO)
Le risque relatif de BPCO chez les PVVIH est supérieur à celui de la population générale, en liaison avec le tabagisme, la consommation de cannabis, les infections broncho-pulmonaires bactériennes et la pneumocystose.
Il faut envisager une spirométrie à la recherche d'une BPCO chez toute PVVIH de plus de 40 ans exposée à un tabagisme chronique de plus de 20 paquets-années, complétée par une EFR en cas d'anomalie, et d'entreprendre une prise en charge par des spécialistes des pathologies respiratoires et du sevrage tabagique pour optimiser les stratégies thérapeutiques et le suivi des capacités respiratoires.
Hypertension artérielle pulmonaire (HTAP)
La prévalence actuelle de l'HTAP chez les PVVIH (de 0,50 %) est 2 à 3 fois plus fréquente que dans la population générale et l'incidence est plus élevée chez les femmes et les usagers de drogue par voie intraveineuse. Le premier symptôme de l'HTAP est la dyspnée, justifiant un bilan minimal comprenant une radiographie pulmonaire, des gaz du sang et une échocardiographie. La prise en charge diagnostique et thérapeutique relève d'un centre spécialisé.
Dépistage des troubles neurocognitifs
Les troubles cognitifs légers, dont la prévalence pourrait dépasser 25 % dans certaines cohortes, restent encore trop souvent méconnus et doivent être dépistés compte tenu de leur impact sur la vie quotidienne et sur l'observance des traitements. Devant un trouble neurocognitif avéré chez un patient infecté par le VIH, une enquête étiologique à la recherche d'une cause acquise doit être effectuée : syphilis, infection par le VHC, hypothyroïdie, carence en vitamine B12, diabète, syndrome métabolique, maladie inflammatoire du système nerveux central, maladie tumorale, maladies cérébrovasculaires, exposition aux produits psychoactifs.
Un dépistage précoce par des tests neuropsychologiques devrait être systématiquement proposé chez tous les patients âgés de plus de 50 ans et/ou co-infectés par le VHC, mais aussi en cas d'échec inexpliqué d'une 1re ligne de traitement antirétroviral, afin de vérifier qu'un trouble cognitif ne soit pas à l'origine d'une inobservance non perçue par le patient lui-même.
En présence de troubles cognitifs liés au VIH, le premier objectif est de rendre la charge virale indétectable dans le plasma et, secondairement, de corriger les facteurs de risque cognitifs (carence vitaminique, hypothyroïdie, contrôle des facteurs de risque cardiovasculaires et métaboliques, limitation de la prise de toxique et de psychotrope, prise en charge d'un syndrome dépressif associé et d'une éventuelle apnée du sommeil).
En cas de stagnation ou d'aggravation clinique des TNC, surtout en cas de réplication virale dans le LCR, une optimisation du TAR en favorisant le recours à des antirétroviraux actifs dans le compartiment cérébral est indiquée.
Troubles psychiatriques
Les troubles psychiatriques sont plus fréquents chez les PVVIH (conduites addictives, les troubles les plus fréquents étant les troubles dépressifs, les troubles anxieux généralisés, les troubles paniques et les états de stress post-traumatiques) souvent en lien avec leur sexualité.
En dehors des possibles interactions médicamenteuses et des anomalies métaboliques, les thérapeutiques font appel aux mêmes molécules que la population générale.
Cancers au cours de l'infection par le VIH
Du fait du vieillissement de la population infectée par le VIH et de son accroissement lié à une meilleure survie, le nombre total de cas de cancers chez les PVVIH est en augmentation.
Depuis la mise en place des traitements antirétroviraux, les cancers sont globalement plus fréquents chez les PVVIH que dans la population générale (d'un facteur 2 à 3 selon les études), les plus fréquents étant la maladie de Hodgkin (associé à EBV), le cancer du poumon, le cancer du canal anal (associé aux HPV) et le cancer du foie (associé à VHB ou VHC).
Le risque de maladie de Kaposi (MK), de lymphome non hodgkinien (y compris lymphome primitif cérébral) et du cancer du col est fortement associé à l'immunodépression et à la réplication virale du VIH, et le fait d'être sous antirétroviral a un effet protecteur.
Le cancer du poumon, notamment le cancer bronchique non à petites cellules dont l'adénocarcinome, est le plus fréquent des cancers non classant sida et le cancer au plus mauvais pronostic (incidence 2 à 4 fois supérieure à celle de la population générale), sans doute liée à un tabagisme plus important dans la population VIH, l'immunodépression étant plus récemment reconnue comme un facteur de risque indépendant du tabac, et en prenant en compte le rôle possible de la consommation de cannabis. Toute symptomatologie pulmonaire persistante chez un fumeur ou ancien fumeur doit faire évoquer un cancer bronchique et faire réaliser un scanner thoracique. La lutte contre le tabagisme et la consommation de cannabis chez les PVVIH doit être renforcée et un rapprochement vers les centres d'addictologie ou antitabac est fortement encouragé.
On observe également des cancers liés aux infections à HPV (cancers de l'anus, de la vulve, du pénis, en plus des cancers du col et peut-être cancer ORL et de la cavité buccale) et des hépatocarcinomes liés aux hépatites B et C.
Dépistage du cancer du col : il est recommandé de proposer chez toute femme infectée par le VIH un dépistage par cytologie cervico-utérine lors de la découverte de la séropositivité.
Le rythme de dépistage sera établi au cas par cas :
Patiente sans antécédents de lésion malpighienne intra-épithéliale cervicale de bas grade ou de haut grade, avec cytologie initiale normale. La cytologie est contrôlée de façon annuelle pendant 3 ans. Au bout de 3 cytologies consécutives normales, sous réserve d'une charge VIH contrôlée et d'un taux de CD4 > 500/mm3, la cytologie est réalisée tous les 3 ans, au même rythme que la population générale.
Dans les autres situations, la cytologie doit être contrôlée tous les ans.
En cas de cytologie anormale :
une cytologie « ASC-US » peut, soit conduire à la recherche d'HPV HR et en cas de positivité, à la réalisation d'une colposcopie, soit d'emblée conduire à la réalisation d'une colposcopie,
une lésion malpighienne intra-épithéliale de bas grade ou de haut grade nécessite un contrôle par colposcopie.
L'existence d'une lésion du col doit faire réaliser un examen du canal anal.
Le dépistage du cancer du col doit être poursuivi au-delà de 65 ans chez toutes les femmes vivant avec le VIH. Les femmes ayant reçu un vaccin HPV devront faire des cytologies de dépistage au même rythme que les femmes non vaccinées car, comme en population générale, la vaccination HPV ne dispense pas du dépistage du cancer du col.
Dépistage du cancer de l'anus : il est recommandé chez les hommes qui ont des rapports sexuels avec des hommes (HSH), chez toute personne ayant des antécédents de condylomes et chez les femmes ayant présenté une lésion du col. Ce dépistage doit être effectué par un examen proctologique associant un examen de la marge anale, un toucher rectal et une anuscopie à l'œil nu qui permettra de faire le diagnostic de cancer de l'anus ou de lésion(s) précancéreuse(s) macroscopique(s). Le suivi ultérieur dépendra du bilan initial.
Les cancers cutanéomuqueux seront dépistés une fois par an par un examen complet de la peau et des muqueuses.
Traitement antirétroviral (TAR) et cancer
L'existence d'une néoplasie ne contre-indique pas le traitement antirétroviral qui reste recommandé quel que soit le taux de CD4 et à maintenir durant le traitement carcinologique, le contrôle de la réplication virale étant associé à une nette amélioration de la survie des patients traités pour lymphome.
Il faut tenir compte des interactions antirétroviraux-chimiothérapie/immunothérapie qui peuvent impacter l'efficacité et la toxicité des traitements. Compte tenu d'un potentiel d'interaction limité et d'un profil de tolérance favorable, le raltégravir (glucuronoconjugué et non métabolisé par un CYP), le maraviroc (bien que métabolisé par le CYP3A4, il n'est ni inducteur, ni inhibiteur des CYP), le dolutégravir, la rilpivirine (risque d'interaction néanmoins possible), et l'enfuvirtide (T20) sont à privilégier chaque fois que possible.
Une chimioprophylaxie vis-à-vis de la pneumocystose et de la toxoplasmose voire d'une infection à CMV doit être instaurée indépendamment du taux de CD4, du type de tumeur et du traitement carcinologique, ainsi qu'une prophylaxie anti-HSV/VZV chez les patients avec herpès récurrent et/ou en cas de chimiothérapie cytopéniante.
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