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COMIRNATY, premier vaccin autorisé contre la COVID-19 chez l’enfant âgé de 5 à 11 ans

Les États-Unis et l’Europe ont récemment approuvé l’utilisation du vaccin à ARNm COMIRNATY chez l’enfant âgé de 5 à 11 ansSur quelles données et quelles sont les questions qui peuvent se poser à propos de la pertinence de cette autorisation ?
 
Élisabeth LECA 21 décembre 2021 Image d'une montre16 minutes icon Ajouter un commentaire
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Deux injections de 10 microgrammes espacées de 3 semaines (illustration).

Deux injections de 10 microgrammes espacées de 3 semaines (illustration).

 
Résumé :
Le vaccin à ARNm modifié de Pfizer-BioNTech (COMIRNATY), codant la glycoprotéine Spike (S) du SARS-CoV-2, a obtenu, de la FDA (Food and Drug Administration) aux États-Unis et de l'EMA (European Medicines Agency) en Europe, une extension d'autorisation de mise sur le marché (AMM) chez l'enfant âgé de 5 à 11 ans.

La posologie pédiatrique est de 10 µg par dose (un tiers de la dose adulte) et la vaccination nécessite deux injections espacées de 3 semaines. Le vaccin pédiatrique est disponible en France depuis le 15 décembre 2021. La Haute Autorité de santé (HAS) a, dans un premier temps, recommandé ce vaccin chez les enfants âgés de 5 à 11 ans à risque de faire une forme grave de la maladie et pour ceux vivant dans l'entourage de personnes immunodéprimées ou vulnérables, non protégées par la vaccination (stratégie de « cocooning »). Puis, le 20 décembre, la HAS s'est prononcée en faveur de la vaccination de tous les enfants âgés de 5 à 11 ans.

Dès lors, il apparaît utile de détailler les données ayant permis l'extension d'AMM du vaccin COMIRNATY chez les enfants et de s'interroger sur la pertinence de la vaccination chez ceux « à risque » de forme grave et chez ceux « non à risque ».

Le dossier d'évaluation du vaccin pédiatrique COMIRNATY est le même pour toutes les instances qui l'ont autorisé. Il comporte les données d'efficacité et de tolérance obtenues chez environ 2 000 enfants âgés de 5 à 11 ans.

Les caractéristiques de l'étude ayant permis l'extension d'AMM chez l'enfant
Après qu'une étude de phase 1, menée chez une vingtaine d'enfants âgés de 5 à 11 ans, a permis d'établir, aux vues de la réponse des anticorps, une posologie optimale de 10 µg (deux doses séparées de 21 jours), un essai clinique de phase 2/3 a comparé le vaccin COMIRNATY (deux doses de 10 µg séparées de 21 jours) et un placebo (sérum physiologique), dans cette même classe d'âge. 
Cette étude (C4591007), randomisée 2:1, a été menée chez 3 109 enfants vaccinés par COMIRNATY et 1 528 ayant reçu un placebo. Cette population réunissait deux cohortes :
  • la cohorte 1 comprenait 1 518 enfants ayant reçu le vaccin et 750 un placebo, parmi lesquels 1 444 (95,1 %) et 714 (95,2 %), respectivement, ont eu un suivi de tolérance d'au moins 2 mois après la deuxième dose (D2) ;
  • la cohorte 2 comprenait 1 591 enfants ayant reçu COMIRNATY et 778 un placebo, qui ont eu un suivi médian de 2,4 semaines après D2.
 
Les enfants ayant eu une infection antérieure par le SARS-CoV-2 ou atteints d'autres pathologies (infection à VIH, hépatites, etc.) n'ont pas été exclus.
 
L'efficacité immunologique a été appréciée dans la cohorte 1, à l'inclusion, puis 1 mois après la seconde dose, par le titre d'anticorps neutralisants à 50 % (NT50) contre le SARS-CoV-2. La réponse sérologique était établie en cas d'augmentation d'un facteur > 4 du NT50 par rapport à l'inclusion.
Les données (moyennes géométriques des titres [MGT] en anticorps) d'une partie des patients de l'essai princeps (264 enfants âgés de 5 à 11 ans sans antécédent d'infection) ont été comparées à celles d'un groupe de 253 enfants plus âgés (16 à 25 ans) vaccinés selon le schéma adulte, tirés au sort dans la population d'un autre essai de phase 2/3 (étude C4591001). Le succès immunologique était établi si le ratio était > 1 et si la limite inférieure de l'intervalle de confiance bilatéral à 95 % était > 0,67.

L'efficacité clinique a été déterminée par la recherche d'une infection COVID-19 symptomatique et confirmée, survenue à partir du 7e jour post-D2 chez les enfants sans preuve d'infection antérieure à SARS-CoV-2, et également qu'ils aient été auparavant infectés ou non. Elle a été évaluée chez tous les enfants randomisés.

Les effets indésirables ont été, pour certains, demandés de façon systématique, pour d'autres recueillis après signalement ou car étant estimés « d'intérêt ».
  • Les effets recherchés de façon spécifique, entre J1 et J7 après D1 et D2, étaient ceux concernant le site de l'injection ainsi que des effets systémiques : fièvre, fatigue, céphalées, frissons, diarrhée, vomissements, douleurs musculaires et articulaires.
  • Tous les effets indésirables rapportés spontanément, survenus 30 minutes après chaque injection, non graves jusqu'à 1 mois post-D2 et graves jusqu'à 6 mois post-D2 au moment du recueil ont été colligés.
  • Les effets indésirables dits d'intérêt incluaient : lymphadénopathie, myocardite/péricardite, anaphylaxie, paralysie de Bell, appendicite, syndromes inflammatoires multisystémiques.
 
La population étudiée comprenait 2 285 enfants âgés de 5-11 ans : moyenne d'âge : 8,2 ans ; sexe masculin : 52 % ; sujets blancs : 79 % ; Étatsuniens (70 %) ; infection antérieure par SARS-CoV-2 (8,8 %).

Une comorbidité était présente chez 20,6 % du groupe vaccin versus 20,3 % : obésité (11,5 %), asthme (7,8 %), atteinte neurologique (1,3 %), cardiopathie (1 %), diabète (0,2 %). La médiane de suivi a été de 2,3 mois (0-2,5) après la seconde dose.

Une efficacité établie au plan immunologique et clinique
Un mois après la seconde injection, la réponse immunitaire, chez les enfants âgés de 5 à 11 ans sans antécédent de SARS-CoV-2, a été jugée « non inférieure » à celle observée chez les sujets âgés de 16 à 25 ans. En effet, les moyennes géométriques des titres (MGT) en anticorps (MGT [IC95%]) étaient de 1 198 [1 106-1 297] chez les 264 enfants étudiés et de 1 146 [1 045-1 257] chez les 253 adolescents de 16-25 ans, soit un rapport des MGT 5-11 ans /16-25 ans de 1, 04 [0,93-1,18]. La borne inférieure de l'intervalle de confiance à 95 % (> 0,67) et le ratio (> 1) remplissaient donc les critères demandés par la FDA.

De plus, l'augmentation de la MGT entre l'inclusion et un mois après D2 a été de 118,2 (versus 1,1 avec le placebo) chez les 5-11 ans et de 111,4 (versus 1 avec le placebo) chez les 16- 25 ans.

La proportion d'enfants remplissant les critères d'une séroconversion était de 99,2 % (97,3-99,9) chez les 5-11 ans, similaire à celle des 16-25 ans, soit une différence entre 5-11 ans/16-25 ans de 0 % [-2,0 ; 2,2], résultat qui remplissait aussi les critères d'équivalence de la réponse sérologique.

Ces réponses immunologiques ne variaient pas en fonction des sous-groupes d'âge (i.e. 5-6 ans, 7-8 ans et 9-11 ans), du sexe, de l'ethnicité, de l'obésité ou de l'ensemble des comorbidités.

Les données de nature exploratoire observées avec la souche de référence et le variant Delta (34 patients sous BNT162b2 versus 4 sous placebo, tirés au sort), évaluées 1 mois après D2 chez des sujets indemnes d'infection antérieure par SARS-CoV-2, vont dans le sens d'une efficacité du même ordre : MGT avec la souche de référence versus placebo : 365,3 [279-478,4] versus 10 [10-10] et, avec le variant Delta : 294 [214,6-405,3] versus 10 [10-10].

L'efficacité clinique a été analysée après un suivi médian de 2,3 mois chez 1 968 enfants (1 305 ayant reçu COMIRNATY et 663 un placebo), sans trace sérologique ou virologique d'infection au SARS-CoV-2. Parmi eux, 20 % avaient une comorbidité les prédisposant à un risque accru de formes graves de COVID-19, dont 11 % d'obèses. Le nombre de cas confirmés de COVID-19 survenus à partir du 7e jour suivant la 2e dose a été de 3 dans le groupe vaccin et de 16 dans le groupe placebo, soit une efficacité clinique du vaccin de 90,7 % (IC95 % : 67,47-98,3) à partir du 7e jour suivant la 2e dose.

L'analyse du sous-groupe des enfants ayant une comorbidité a montré une efficacité clinique vaccinale de 100 % (IC95% : -12,1-100 %).

En l'absence de forme grave dans les deux groupes, il n'a pas été possible de conclure sur l'efficacité du vaccin sur les hospitalisations ni sur la mortalité y compris en cas de comorbidité.

En l'absence de données sur les infections asymptomatiques, cette étude n'a pas permis d'évaluer l'efficacité vaccinale sur la transmission du SARS-CoV-2 chez ces enfants.
 
Un peu plus d'effets locaux et un peu moins de réactions systémiques
Les données de tolérance portent sur 1 518 enfants vaccinés, avec un suivi médian de 2 mois après la seconde dose (cohorte 1 ; versus 750 sous placebo) et sur 1 591 (cohorte 2 ; versus 796 sous placebo), avec un suivi médian de 2,4 semaines post-seconde dose.

Une réactogénicité (entre J1 et J7 après D1 et D2) a été recherchée chez les 1 511 enfants de la cohorte 1 ayant reçu le vaccin. Une réaction au site d'injection (75 %) après D1 et D2, des effets systémiques (50 %) ont été mis en évidence. Aucun décès n'est survenu.

Les enfants du groupe vaccin ont eu plus d'événements indésirables locaux et généraux que ceux du groupe placebo, mais ces réactions ont été transitoires (1 à 2 jours) et non graves : après la 1re dose, douleur au point d'injection (74 % versus 31 %), rougeur (15 % versus 5,7 %) et gonflement (10,5 % versus 3 %), et, après la 2e dose, douleur au point d'injection (71 % versus 30 %), rougeur (18 % versus 5,4 %) et gonflement (15 % versus 2,7%).

La fréquence de la fatigue, des céphalées et des frissons était similaire dans les deux groupes au décours de la première dose, mais plus fréquents dans le bras vaccin que dans le bras placebo après la seconde dose (fatigue : 40 %, céphalées : 28 % ; douleur musculaire : 12 %). La fièvre a été plus fréquente après la seconde dose (13 %) qu'après la première dose (5 %) de vaccin.

Globalement, la plupart de ces réactions locales et systémiques étaient toujours minimes ou modérées, avec un délai de survenue médian de 2 jours, se résolvant en 1 à 2 jours. Avec le vaccin, quatre effets graves locaux (3 rougeurs et 1 gonflement) et un effet grave systémique (douleur musculaire) ont été observés.

Les lymphadénopathies survenues jusqu'à 1 mois post-D2 ont été plus fréquentes avec le vaccin qu'avec le placebo dans la cohorte 1 (0,9 % versus 0,1 %) et similaire dans la cohorte 2 (0,4 % versus 0,4 %).

Le nombre d'enfants ayant un effet indésirable dit d'intérêt a été de 19 avec le vaccin versus 6 avec le placebo. Il s'agissait essentiellement de réactions allergiques (0,92 % versus 0,53 %) dans la cohorte 1 et, dans la cohorte 2, de réactions d'hypersensibilité (0,57 % versus 0,51 %) et d'angio-œdèmes (0,19 % versus 0,13 %). Un enfant de 6 ans du groupe vaccin a développé un purpura de Schönlein-Henoch non grave, 21 jours après D1.

Dans l'ensemble des deux cohortes, des douleurs thoraciques ont été décrites chez 12 enfants (6 et 6), résolutives en 1 à 2 jours et n'ayant justifié ni investigation cardiaque, ni hospitalisation.

Aucun cas de myocardite, péricardite, hypersensibilité, syndrome d'inflammation multi-systémique n'a été relevé.

Les points encore non résolus
Au total, les données disponibles montrent que le vaccin COMIRNATY (deux doses de 10 µg à un intervalle de 21 jours), induit, chez des enfants âgés de 5 à 11 ans, une réponse immunitaire, 1 mois après la seconde injection, non inférieure à celle constatée chez les sujets âgés de 16 à 25 ans, vaccinés par deux doses de 30 µg (dose adulte) et une efficacité clinique de 90,7 % (67,4-98,3) à partir du 7e jour suivant l'administration de la 2e dose. Le profil de tolérance est semblable à celui observé chez les sujets plus âgés avec un peu plus d'effets locaux et un peu moins d'effets systémiques.
En revanche, le dossier d'évaluation ne permet pas de connaître :
  •  l'efficacité du vaccin sur les formes sévères, les hospitalisations, les hospitalisations en unité de soins intensifs et la mortalité, en raison de l'absence de ces formes dans les deux groupes ;
  • l'efficacité du vaccin sur la transmission, en raison de l'absence de données sur les infections asymptomatiques ;
  • le profil de tolérance spécifique chez les enfants à risque de COVID-19 sévère, en raison de l'absence d'une analyse des données de sécurité chez ces enfants ;
  • La survenue d'effets indésirables rares à très rares (1/1 000 à 1/ 10 000), en raison de la taille insuffisante de l'effectif et d'un suivi post-seconde dose de seulement 3 mois.
Quelle pertinence de la vaccination des enfants âgés de 5 à 11 ans ?
La pertinence de la vaccination des enfants âgés de 5 à 11 ans doit prendre en compte, le bénéfice individuel et le risque individuel du vaccin, dans cette classe d'âge, le bénéfice indirect par une réduction de la transmission du virus. 

Quel bénéfice individuel pour les enfants de 5 à 11 ans ?
Le rapport bénéfice-risque positif du vaccin est établi pour l'ensemble des enfants de 5 à 11 ans inclus dans le dossier d'AMM, analysé par les autorités de santé des pays l'ayant autorisé. Il démontre une diminution du risque de formes non graves de COVID-19 et une bonne réponse immunologique, mais ne permet pas de connaître l'efficacité du vaccin sur les formes sévères. Dès lors, on ne peut que s'appuyer sur ce que l'on sait de la COVID-19 chez le jeune enfant et sur les données du vaccin en population chez les adolescents.

Il est établi que les enfants infectés par le SARS-CoV-2 ont des formes souvent asymptomatiques ou des symptômes moins sévères que les adultes. Ainsi, en France, depuis le début de l'épidémie (mars 2020), sur les 5,77 millions d'enfants âgés de 5-11 ans, (Insee, janvier 2021), près de 420 000 cas de COVID-19 ont été confirmés et enregistrés, dont 28 % symptomatiques avec 1 284 hospitalisations, dont 226 admissions en soins critiques et 3 décès directement liés au COVID-19.

Parmi les complications plus spécifiques de l'enfant, les « syndromes inflammatoires multi-systémiques pédiatriques » (PIMS) ressemblant à la maladie de Kawasaki, peuvent survenir 4 à 6 semaines après l'infection et entraîner des myocardites dans deux tiers des cas. Les PIMS, sont peu fréquents puisque depuis le 2 mars 2020, 781 cas ont été signalés dont 318 ont nécessité un séjour en réanimation et 199 une hospitalisation en unité de soins critiques. Par ailleurs, les « COVID long » concernent moins les enfants et les adolescents que les adultes et ne semblent pas persister au-delà de 12 semaines chez les enfants.

Comme chez l'adulte, les comorbidités représentent chez l'enfant, un risque de forme sévère de la maladie. En effet, chez les patients de 0 à 17 ans ayant souffert d'une forme sévère de COVID-19, 21 % avaient des comorbidités alors que la prévalence des comorbidités de cette classe d'âge est de 6 % (données françaises non publiées). De même, sur 106 cas de PIMS ayant un lien confirmé avec la COVID-19, 26 avaient des comorbidités (Ouldali N et al.).

Quel risque individuel du vaccin pour les enfants ?
La taille insuffisante de l'effectif inclus dans l'essai du dossier d'AMM et la courte durée de suivi des événements indésirables ne permettent pas de définir un profil de tolérance spécifique pour les enfants, ni de détecter des réactions indésirables rares ou retardées. Force est donc, en attendant le recul nécessaire, de prendre en compte d'autres données concernant la tolérance du vaccin dans des populations plus âgées.

On pense ici particulièrement au lien probablement causal établi entre myocardite/péricardite et vaccins à ARNm (SPIKEVAX à 100 µg et COMIRNATY). La vaccination contre la COVID-19 avec ces vaccins à ARNm augmente globalement le risque de myocardite et de péricardite dans les 7 jours suivants chez les personnes âgées de 12 à 50 ans, avec une évolution clinique généralement favorable e t une durée moyenne de séjour hospitalier de 2 à 4 jours. L'association de risque de myocardite apparaît plus marquée chez les hommes de moins de 30 ans, en particulier au décours de la deuxième dose de SPIKEVAX. L'excès de risque après la seconde dose est moindre avec le vaccin COMIRNATY (11,5 cas sur 1 million pour le vaccin Pfizer-BioNTech), comparativement à SPIKEVAX 100 µg (36,2 cas sur 1 million). Aussi, la HAS a recommandé, pour la population âgée de moins de 30 ans, le recours au vaccin COMIRNATY plutôt qu'au vaccin SPIKEVAX, qu'il s'agisse du schéma de primovaccination ou du rappel.

La question a été d'établir si ce vaccin, qui protège de la COVID-19 et de ses formes graves, ne fait pas courir un risque vaccinal supérieur d'effets graves comme des myocardites. Pour tenter d'y répondre, 6 scenarii ont été envisagés dans le dossier de la FDA, en fonction du taux d'incidence de la maladie :
  • Scénario 1 : incidence en septembre 2021. Efficacité du vaccin contre la COVID-19 de 70 % ; contre les hospitalisations pour COVID-19, de 80 %.
  • Scénario 2 : incidence au pic de l'épidémie du variant Delta fin août 2021. Même efficacité du vaccin que dans S1.
  • Scénario 3 : incidence la plus basse (juin 2021). Même efficacité du vaccin que dans S1.
  • Scénario 4 : même incidence que S1, mais plus grande efficacité du vaccin : de 90 % contre la COVID-19 et de 100 % ; contre les hospitalisations pour COVID-19.
  • Scénario 5 : même incidence et même efficacité du vaccin que dans S1, mais avec un  taux de décès multiplié par 3.
  • Scénario 6 : même incidence et même efficacité du vaccin que dans S1, mais excès de myocardites.

Selon ces hypothèses, on distingue :
  • une efficacité à 6 mois post-D2 de 70 % contre la COVID-19 et de 80 % contre les hospitalisations dans tous les scenarii sauf le 4 dans lequel l'efficacité clinique est supérieure : 90 % contre la COVID-19 et 100 % contre les hospitalisations ;
  • un excès de myocardite/péricardite calculé sur celui observé chez les 12-15 ans.

Il en résulte que, avec les scenarii 1, 2, 4 et 5, le bénéfice de la vaccination outrepasse ses risques.
En revanche, avec le scénario 3, qui a l'incidence la plus basse, le modèle prédit un excès d'hospitalisations dû à une myocardite/péricardite comparé à la prévention des hospitalisations liées à la COVID-19, chez les garçons et dans les deux sexes.

Quels bénéfices indirects collectifs de la vaccination pour les enfants de 5 à 11 ans ?
Vacciner les enfants de 5 à 11 ans limiterait la transmission virale au sein de la population générale, mais également entre les enfants, ce qui diminuerait l'absentéisme scolaire et des activités de loisir dont on a décrit les effets délétères psychologiques, sociaux et éducatifs, dès la première vague.

Il est donc difficile de résumer l'intérêt de la vaccination des plus jeunes à la protection de l'ensemble de la population, en particulier des sujets plus âgés refusant leur propre immunisation vaccinale. Il n'en demeure pas moins vrai que, l'objectif ayant toujours été de protéger les populations contre les formes graves de COVID-19, on peut mettre en avant qu'avant de vacciner les plus jeunes, il faudrait renforcer les efforts pour favoriser la vaccination des adolescents et des adultes.

La balance bénéfice-risque individuelle de la vaccination pour le jeune enfant et ses bénéfices pour la transmission sont néanmoins à considérer à l'aune de la reprise très rapide de l'épidémie et des prises de position des personnes (ou sociétés) faisant autorité. Il faudra également savoir qui, des parents ou de l'État, prendra la responsabilité de la vaccination de l'enfant.

Depuis quelques semaines, le taux d'incidence de la COVID-19 est en forte augmentation dans toutes les classes d'âge, en particulier chez les enfants. Ainsi, une étude a montré l'importance de la circulation du variant Delta à l'école, avec un taux d'incidence, au 5 décembre 2021, proche de 1 000/100 000 enfants de 5 à 11 ans, contre 347/100 000 deux semaines auparavant. L'immunisation des enfants de cette tranche d'âge permettrait de réduire le nombre de cas, comme cela a été constaté dans les établissements du secondaire, où le taux de reproduction du variant Delta est estimé à 0,57, compte tenu de la bonne couverture vaccinale (77 % fin novembre 2021) des élèves français.

Les prises de position des personnes ou sociétés « autorisées » 
La Société française de pédiatrie estimait en novembre que, « la vaccination contre le COVID des enfants âgés de moins de 12 ans n'est pas urgente. Les réserves du Conseil national professionnel de pédiatrie (22 juillet 2021) étaient moindres sur la vaccination contre la COVID-19 des adolescents puisque la vaccination de ces derniers a été proposée dès que possible.
 
La HAS a recommandé (30 novembre 2021) ce vaccin pour les enfants de 5 à 11 ans dans les situations suivantes :
 
  • Comorbidités identifiées comme à risque de forme sévère de COVID-19 : cardiopathies congénitales, maladies hépatiques chroniques, maladies cardiaques et respiratoires chroniques (y compris l'asthme sévère nécessitant un traitement), maladies neurologiques, immunodéficience dont celle induite par des médicaments, obésité, diabète, hémopathie maligne, drépanocytose, trisomie 21.
  • Enfants porteurs d'une des comorbidités identifiées chez les adultes comme étant associée à un risque de forme grave : cancer récent, maladie rénale chronique, handicap neurologique, etc. 
  • Enfants jugés particulièrement vulnérables et pour lesquels les risques liés à la COVID-19 apparaissent majeurs sans que leur affection puisse avoir été mise en évidence par la revue de la littérature.
  • Enfants proches d'une personne immunodéprimée ou vulnérable qui ne serait pas vaccinée (stratégie de « cocooning »).
 
Le Premier ministre, a déclaré que « la vaccination des enfants est une nécessité entre 5 et 11 ans ».
 
Le Conseil d'orientation de la stratégie vaccinale considérait, le 6 décembre 2021, que « les indications de la vaccination des enfants âgés de 5 à 11 ans paraissent réunies ». Il conditionnait néanmoins sa mise en place à l'obtention de données « en vie réelle » afin d'assurer « que la balance bénéfice-risque soit favorable », ce qui pourrait intervenir après l'obtention des données américaines, « possiblement dès fin décembre ».
 
Le comité consultatif national d'éthique (CCNE) s'est prononcé (vendredi 17 décembre 2021) en faveur de l'ouverture de la vaccination à tous les enfants âgés de 5 à 11 ans mais contre son obligation.

- La HAS (20 décembre 2021) s'est déclarée favorable à l'ouverture de la vaccination aux enfants de 5 à 11 ans, sans obligation et sans que cela conditionne l'obtention d'un passe sanitaire.

Les arguments essentiels sont :
1) l'arrivée du variant Omicron, plus contagieux, va augmenter le nombre de formes sévères chez les enfants ;
2) le rapport bénéfices/risques du vaccin dans les essais est moins important que chez les adultes, mais confirmé par des données en vie réelle, portant sur plus de 10 millions d'enfants vaccinés ;
3) la réduction de la circulation du virus dans la population générale, grâce à la vaccination des enfants pourrait réduire l'impact des vagues ultérieures (à condition d'un maintien de l'efficacité vaccinale vis-à-vis du variant Omicron).
La HAS propose que les parents puissent, s'ils le souhaitent, faire vacciner leur(s) enfant(s) âgé(s) de 5 à 11 ans et que cette vaccination se fasse dans le cadre d'une décision médicale partagée avec les pédiatres et les médecins traitants. La HAS préconise de vacciner en priorité les collégiens de moins de 12 ans et de faire précéder la vaccination d'un TROD sérologique (en l'absence d'antécédent connu et documenté de COVID-19) afin de n'administrer qu'une seule dose en cas de test positif.

On s'est donc orienté vers la recommandation de la vaccination de tous les enfants entre 5 et 11 ans et la France a déjà les doses disponibles du vaccin Pfizer-BioNTech pédiatrique. Cependant, la décision de faire vacciner leur enfant sera laissée aux parents, mais on ignore si leur éventuel consentement (un seul ou les deux) devra être recueilli par écrit. Cette responsabilité laissée aux parents est extrêmement difficile à endosser au plan éthique, voire philosophique. En effet, elle est bien différente de la  situation « du soin » (ou des 11 vaccinations obligatoires) et se rapproche d'une situation de « recherche clinique » (consentement écrit des patients). Si l'obligation vaccinale concernait  les adultes, elle aurait pu se discuter pour les enfants également. 

Conclusion

L'élargissement de la vaccination aux enfants âgés de 5 à 11 ans est acquise et suivra sans doute les priorités retenues dans les populations plus âgées. Reste à savoir quelle sera la décision des parents qui attendront, pour certains, des données en vie réelle issues des pays (États-Unis ou Israël) où la vaccination de cette classe d'âge est déjà bien avancée, mais aussi des données sur l'échappement éventuel aux anticorps du variant Omicron.

©vidal.fr

Pour en savoir plus

Évaluation du vaccin

- Walter Emmanuel B. et al., for the C4591007 Clinical Trial Group. Evaluation of the BNT162b2 Covid-19 Vaccine in Children 5 to 11 Years of Age;  N Engl J Med. November 9, 2021; DOI: 10.1056/NEJMoa2116298

 - Vaccines and Related Biological Products Advisory Committee Meeting October 26, 2021 FDA Briefing Document EUA amendment request for Pfizer-BioNTech COVID-19 Vaccine for use in children 5 through 11 years of age

 - European Medicines Agency. Comirnaty COVID-19 vaccine: EMA recommends approval for children aged 5 to 11. 25 November 2021.

COVID-19 chez l'enfant

- Ludvigsson JF. Systematic review of COVID-19 in children shows milder cases and a better prognosis than adults. Acta Paedriatr. 109(6):1088-1095.

- Leca E. Atteinte multiviscérale et infection par le SARS-COV-2 chez l'enfant : les différences avec la maladie de Kawasaki. Actualité Vidal. 9 juillet 2020.

 - Wu Eveline Y et Campbell M Jay. Cardiac Manifestations of Multisystem Inflammatory Syndrome in Children (MIS-C) Following COVID-19 Curr Cardio Rep 2021; 23(11):168.

 - Ouldali N et al. Emergence of Kawasaki disease related to SARS-CoV-2 infection in an epicentre of the French COVID-19 epidemic: a time-series analysis. Lancet Child Adolesc Health 2020 ; 4 : 662-668.
 
Tolérance du vaccin


- Leca E. Myocardites et vaccins à ARNm contre la COVID-19 : d'une simple alerte à une relation causale. Actualité Vidal. 29 juillet 2021.

- Santé publique France. Point épidémiologique du 2 décembre 2021.

 Positions des autorités
 
- Position du Conseil National Professionnel de Pédiatrie sur la vaccination contre la Covid-19 des adolescents (22/07/2021)

- HAS. Communiqué de presse. Covid-19 : la HAS recommande la vaccination des enfants fragiles. 30/11/2021.

 - Avis n° 2021.0084/AC/SESPEV du 25 novembre 2021 du Collège de la Haute Autorité de santé relatif à la vaccination des enfants de 5 à 11 ans à risque de formes sévères de Covid-19 ou appartenant à l'entourage des personnes immunodéprimées.

- Paitraud D. COVID-19 : la vaccination des enfants fragiles de 5 à 11 ans recommandée par la HAS. Actualité Vidal. 1er décembre 2021.

- INSERM. Vacciner les enfants pour lutter contre la pandémie, vraiment ? 29/11/2021.

- Position des sociétés savantes de Pédiatrie et de la Société de pathologie infectieuse de langue française. La vaccination contre le COVID des enfants âgés de moins de 12 ans n'est pas urgente en France à ce jour. 15 novembre /2021.

- Comité consultatif national d'éthique. 17 décembre 2021. Proposer la vaccination contre la Covid-19 aux enfants de 5-11 ans est-il éthiquement acceptable ? Réponse du CCNE à la saisine du ministère des solidarités et de la santé.

- HAS. Communiqué de presse. 20 décembre 2021. COVID-19 : La HAS favorable à l'ouverture de la vaccination sans obligation aux enfants de 5 à 11 ans

- Terra Nova. Vaccination des enfants contre le Covid-19 : éclairer les choix des parents. 09/11/2021.

 

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